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Un pianiste volant réveillera les Yverdonnois en douceur

15 août 2019 | Edition N°2560

Le Jurassien Alain Roche viendra présenter une nouvelle version de son projet Piano Vertical, intitulée Chantier, dans le cadre de la 20e édition du Castrum. Trois représentations sont prévues.

«J’ai toujours été fasciné par la lumière de l’aurore, elle dégage une énergie différente de celle du crépuscule, explique Alain Roche. On se dirige gentiment vers l’éveil.» Le pianiste jurassien viendra présenter Chantier le nouveau volet de son spectacle Piano Vertical, de vendredi à dimanche à «l’heure bleue», dans le cadre du Castrum, à Yverdon-les-Bains. Il faudra donc se lever tôt pour assister à sa prestation: les premières notes se feront entendre à 5h15 précises dans la cour du collège Pestalozzi, mais les spectateurs sont attendus sur place vingt-cinq minutes plus tôt. «Nous devons équiper les gens avec des casques audio», précise le musicien. Car ce n’est pas seulement d’un concert de piano dont il s’agit, mais bien d’une véritable performance qui réunit musique, sons d’ambiance et bruits de chantier. Et pour couronner le tout, l’artiste jouera sur un piano accroché à la verticale à la grue du chantier de la nouvelle salle de gymnastique du collège Pestalozzi. «L’idée du piano vertical m’est venue en travaillant sur un album. Je souhaitais renverser la situation en sortant la musique des salles de concert, amener de la poésie aux gens dans la rue, les surprendre dans leur quotidien, se remémore Alain Roche. Dresser le piano et le faire quitter la terre ferme était une façon de casser les codes.»

Un gros travail a ensuite été nécessaire afin de concrétiser le projet. Au niveau de l’instrument tout d’abord, un piano à queue «traditionnel» que le facteur de pianos Fernand Kummer a adapté aux besoins de la performance, mais également  sur le plan de la sécurité. «Au début, il m’arrivait d’avoir peur de tomber, confie Alain Roche. Puis je me suis efforcé de lâcher prise et de me concentrer sur la musique. C’est devenu un pur plaisir, je n’ai plus de mauvaises sensations.» Le pianiste a aussi dû s’entraîner physiquement. «Au début, je tenais à peine cinq minutes. Mais petit à petit, j’ai appris à inverser les lois de l’apesanteur. Car lorsqu’on joue sur un piano posé au sol, on utilise le retombé du coude et de l’épaule. à la verticale, tout est différent.»

Un concept qui a évolué

Si l’idée de base était de jouer sur l’effet de surprise en s’installant dans un lieu fréquenté sans que les passants n’en aient été informés au préalable, le concept, créé en 2013, a quelque peu évolué avec le temps. «Pour ce nouveau spectacle, je voulais à la fois opposer les bruits pianistiques à ceux d’un chantier, tout en parvenant à une certaine harmonie.» Les sonorités étant différentes d’un lieu à l’autre, l’un des six membres de l’équipe qui l’accompagne en tournée se rend préalablement sur chaque chantier pour réaliser des enregistrements. Ceux-ci sont ensuite diffusés dans les casques audios fournis aux spectateurs le jour J, et se mêlent aux mélodies du piano et aux bruits d’ambiance captés par des micros sans fil. «Le but est que les gens vivent un moment exceptionnel, qu’il y ait une sorte de communion malgré les casques.» Et l’aspect visuel est aussi bien présent. En effet, durant la représentation, une metteuse en scène-chorégraphe décide des mouvements effectués par le piano qui vole, redescend et tourne autour de quatre axes, en collaboration avec le grutier du chantier.

Le pianiste, qui compte plus de 120 représentations à son actif et se produira pour la deuxième fois à Yverdon-les-Bains, est un habitué des festivals. «C’est un cadre que j’adore, car cela me permet de rencontrer d’autres artistes. Et c’est d’autant plus nourrissant quand la programmation est pluridisciplinaire comme au Castrum.»

Muriel Ambühl