Adversaires de la police unie au front
28 août 2009Le comité du «Non au chambardement des polices vaudoises», animé par les principaux responsables de l’Union des communes vaudoises (UCV) a présenté hier à Epalinges ses arguments contre l’initiative D’Artagnan (police unie), lui préférant le contre-projet négocié entre les associations de communes et le Canton (police coordonnée).
A l’instar du comité pour une police unie, celui des partisans de la police coordonnée est aussi composé de représentants de quasiment toutes les sensibilités politiques. C’est dire que lorsqu’on parle de police, comme pour l’école, les positions tiennent plus à des convictions personnelles qu’à des options politiques. Même si Yvan Tardy, président du comité et de l’Union des communes vaudoises (UCV) brandit l’étendard de l’autonomie communale. Le syndic d’Epalinges avait d’ailleurs choisi le Centre de transfusion sanguine pour lancer la campagne des adversaires de l’initiative, précisant, non sans humour, que «les communes étaient prêtes à donner leur sang pour leurs concitoyens, mais pas 200 millions pour un projet sans avantage concret».
L’argument financier est d’ailleurs fréquemment avancé, mais personne ne sait au juste si une police unie coûterait, à terme, plus cher que les polices actuelles. Pour la simple et bonne raison que l’initiative est rédigée en termes généraux et que tout reste à préciser.
Municipal lausannois en charge de la police, qu’il défend becs et ongles, Marc Vuilleumier reproche justement aux initiants leur manque de clarté. Et d’asséner qu’une police unie (cantonale) ne serait pas capable d’assumer les tâches accomplies aujourd’hui par les polices municipales, notamment à Lausanne. Il préfère donc le compromis trouvé sous la forme du contre-projet à l’initiative.
Sur la lancée, la syndique de Morges Nuria Gorrite enfonce le clou. Du moment que la plupart des actes criminels sont commis en territoire urbain les polices municipales sont les mieux placées pour agir: «Dans toutes ces villes, la police a su développer des partenariats avec les différents acteurs concernés par les problèmes d’incivilités et de délinquance au fil des ans.» La syndique de Morges craint elle aussi une perte de l’autonomie communale.
Pour le statu quo…
La syndique d’Ormont-Dessous, Annie Oguey, soutient elle aussi le contre-projet… pour défendre le statu quo. Sa commune et celle de Leysin ont signé un contrat de prestations avec la Police cantonale. Elle en est très satisfaite et ne veut pas que ça change, alors qu’Alessandra Silauri, députée des Verts, craint l’aspect «périlleux» d’une «fusion-absorption». Celle-ci met en avant les facteurs humains et les risques inhérents à une restructuration profonde. Elle aussi reproche à l’initiative d’Artagnan d’avoir été rédigée en termes généraux. C’est dire que les positions sont inconciliables. Du moins jusqu’ ce que le peuple indique la voie à suivre. Heureusement, il ne reste qu’un tout petit mois…
Une police intercommunale pour la plaine de l’Orbe
Alors que le peuple ne s’est pas encore déterminé, les municipaux de police d’Yverdon-les-Bains et d’Orbe ont réuni mercredi soir à l’Hôtel de Ville d’Yverdon-les-Bains les représentants des communes de Gressy, Ependes, Suchy, Essert-Pittet, Chavornay, Montcherand et Yverdon-les-Bains afin de leur faire part d’un projet -au stade d’idée pour l’instant- de création d’une police intercommunale.
A l’évidence, les municipaux en charge de la police dans les deux communes les plus importantes de la région veulent donner de la consistance à leur corps, de manière à lui donner une masse critique indiscutable.
Maîtrise des coûts
Alors que le président du comité d’opposition à D’Artagnan, Yvan Tardy, a été interpellé sur les projets en cours, plus ou moins publics, Pierre Mercier a confirmé qu’Orbe et Yverdon-les-Bains discutaient effectivement du sujet, la Cité aux deux poissons assumant déjà la police à Chavornay. Il a aussi aujouté «qu’Essert-Pittet n’était pas contente de la Police cantonale» et «que tous les participants ont dit leur intérêt pour une police intercommunale». Et le municipal urbigène d’ajouter: «Nous avons le souci des coûts. Nous voulons garder la maîtrise de ces coûts et de notre sécurité. Il est bien normal qu’on se défende.»
Dominique Vidmer, syndic d’Essert-Pittet, tempère le discours du municipal d’Orbe, tout en allant dans son sens: «Je ne dirai pas que nous sommes mécontents, mais il me paraît primordial d’assurer la régionalisation et je soutiens à ce titre le contre-projet. Je ne suis pas favorable à la police unie, laquelle va éloigner les centres de décision et ne nous permettra pas de conserver la maîtrise des coûts, contrairement à l’association dont nous sommes en train de parler et qui me paraît une idée très intéressante».
Willy Gonin, emblématique syndic de Gressy, ne dit pas le contraire et n’a besoin de personne pour lui dicter son avis: «Il semblerait que la police unie coûterait plus cher qu’une police de proximité. Je soutiens Yverdon dans son projet. Nous avons fait partie de Police 2000 et en avons été contents».
Du côté de Chavornay, Pierre-André Leuenberger préfère attendre la prise de position de sa municipalité avant de s’exprimer, mais reconnaît être très content du constrat de prestation signé avec Orbe et constate que «le flou régnerait en cas de succès de l’initiative D’Artagnan».
Les communes de Suchy, Ependes, Essert-Pittet, Gressy, Montcherand et Chavornay attendent ainsi le résultat de la votation avec impatience, mais ont d’ores et déjà pris les devants pour s’assurer d’une police de proximité, la tendance n’allant clairement pas dans ces communes de la plaine de l’Orbe à l’acceptation de la police unie. Bonne ou mauvaise stratégie? L’avenir nous le dira, et l’acceptation de l’initiative D’Artagnan enlèverait toute pertinence à ces discussions informelles. Qui se plaindrait pourtant de l’anticipation des communes sur ce dossier si délicat?