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André Arrigoni était un pilier du Judo Kwai
L’équipe championne suisse de 1979, avec André Arrigoni (troisième depuis la gauche) et à sa gauche son ami Jean Meier, décédé il y a quelques mois.

André Arrigoni était un pilier du Judo Kwai

6 mai 2021

L’ancien professeur d’éducation physique et organisateur de camps sportifs est décédé à 71 ans.

 

«Mon ami André n’est plus là et cela me choque. Nous avons fait beaucoup de choses ensemble, des dizaines de camps. On s’est même souvent engueulés, mais le lendemain, c’était passé.» Professeur de sport émérite, Rémy Leuba est attristé par la disparition, survenue la semaine dernière, d’André Arrigoni. Il faut dire que trente ans durant, les deux hommes ont collaboré étroitement au collège Léon-Michaud. Et cette vie au quotidien a été, des années durant, prolongée par les camps d’été que les deux hommes animaient à Tenero (Tessin).

«Il a été un compagnon de route extraordinaire. Au Tessin, nous partions deux ou trois jours avant l’arrivée des jeunes. Il m’a fait découvrir la région d’origine de sa famille et rencontrer ses cousins. Il parlait parfaitement l’italien», explique le collègue du défunt.

Cette collaboration s’est poursuivie au-delà de la retraite. Et elle a forgé une amitié indestructible. «Après les camps, j’avais pris l’habitude de rédiger des rapports détaillés sur ce qu’on avait fait et ce qui s’était passé. Alors, quand on se retrouvait, on prenait un de ces rapports et on se remémorait les événements et les bons moments passés ensemble», se souvient Rémy Leuba, en relevant que durant cette période, ce sont des milliers d’élèves qui ont suivi leurs cours d’éducation physique.

L’ami proche est véritablement admiratif: «Avec le judo, André s’est forgé un physique incroyable. C’était un grand travailleur. La journée d’école terminée, il allait au judo, puis il enchaînait avec les travaux. Il a retapé une maison de la rue Cordey de ses propres mains. Il était très habile. Autour de chez lui, il a aménagé jardin et piscine. C’était un vrai entrepreneur.»

André Arrigoni a aussi été un grand compétiteur, qui a contribué, en 1979, à la conquête du titre national par le Judo Kwai d’Yverdon-les-Bains, avec ses beaux-frères Daniel et Jean-Marc Brauch, Eric Schopfer, Georges Jourdain et Bernard Demont.

Membre de l’équipe nationale, le défunt s’entraînait alors régulièrement avec ses collègues du club de Lausanne, qui bénéficiait des conseils d’un maître japonais.

«C’était une période incroyable. Il y avait les frères Demont, Patric Lévy. On s’entraînait alors sous la salle de gym du collège de Fontenay, à côté du local des boxeurs. Je l’ai connu par le judo, mais on était aussi voisins. Il habitait la rue de Sainte-Croix et moi le Cheminet», explique Eric Schopfer.

Et de poursuivre: «Lorsque j’ai débuté, j’avais 12 ans et lui 18. Il était très fort et nous conseillait. Il était très exigeant. Comme compétiteur, il fallait être fidèle à son engagement.» Le vigneron de Champagne ajoute: «Je l’ai revu une semaine avant son hospitalisation. J’ai été un peu choqué, parce qu’il ne pouvait plus porter un carton. Parce qu’André, c’était quelqu’un de percutant et provocateur. On a partagé un moment ensemble. J’ai senti que quelque chose se passait. Ça m’a touché.»

Président du Judo Kwai d’Yverdon-les-Bains, Pascal Gafner rend hommage à ce grand serviteur du sport yverdonnois: «Il a entraîné à tous les niveaux, des juniors aux équipes de compétition, et il a présidé le club durant 21 ans, de 1987 à 2008! Il était tout le temps là, pour les entraînements, les manifestations et l’assemblée générale. Il n’y a pas si longtemps, il donnait encore des cours aux seniors le lundi matin.»

Le président du club yverdonnois relève que le défunt était très proche de Jean Meier, autre judoka et dirigeant historique, décédé l’an dernier. André Arrigoni avait été affecté par le départ de cet ami proche.

«André était non seulement un champion de judo, un homme totalement dévoué à ce sport, mais aussi un sportif exigeant. Il tenait à une certaine rigueur, au respect des règles et du tatami», enchaîne Pascal Gafner.

Les qualités du champion et de l’éducateur étaient reconnues au plus haut niveau. Non seulement André Arrigoni a été expert Jeunesse et Sport (J+S) pour le judo, mais il est le seul judoka yverdonnois à avoir obtenu un 6e dan.

André Arrigoni était aussi membre fondateur du Panathlon Club d’Yverdon-les-Bains, le club service des sportifs, où il représentait bien évidemment le judo. Il en a assumé la présidence durant plusieurs années et durant son mandat, il a établi les bases du jumelage avec le club d’Avignon. Il a aussi siégé au Conseil communal.

Né à Sainte-Croix, André Arrigoni a vécu ensuite quelques années au Tessin. Son père Jean a repris une entreprise de pierres fines. De retour dans la région quelques années plus tard, la famille s’est établie à Yverdon-les-Bains. Le défunt y a suivi sa scolarité, puis est entré au gymnase à Lausanne. Alors qu’il était inscrit à l’université pour suivre des études économiques, il a finalement opté pour le sport et a obtenu son brevet d’enseignement en éducation physique.
C’est dans le cadre du judo qu’il a connu son épouse Monique. Le couple a eu trois enfants. La cadette, Danika, avec ses frères Bastian et Chris, relève que ces derniers mois, il venait fréquemment rendre visite à ses petits-enfants. Peut-être ce grand-papa sentait-il ses jours comptés? Comme toute personne, il avait son jardin secret. Et il ne voulait sans doute pas devenir un sujet d’inquiétude pour son entourage.

Et si André Arrigoni avait parfois tendance à s’isoler, il a bénéficié du soutien de ses proches jusqu’à son dernier souffle. «Nous étions près de lui jusqu’au dernier moment», témoigne sa fille. Si sa disparition attriste ses proches et amis, ils se consolent en pensant aux bons moments vécus en sa compagnie. Le monde du sport yverdonnois, et les nombreux élèves qui l’ont connu durant sa carrière, rendent hommage aujourd’hui à un homme dont l’engagement marquera longtemps encore les esprits.

Isidore Raposo