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Aux petits soins pour les papilles des patients
Emile Binggeli (à dr.), surnommé Milo, réside à l’EMS Le Château de Corcelles depuis six mois. Le Nord-Vaudois âgé de 93 ans apprécie les plats concoctés par le cuisinier Philippe Deckert. ©Carole Alkabes

Aux petits soins pour les papilles des patients

6 septembre 2018 | Edition N°2326

Le milieu hospitalier s’adapte de plus en plus aux besoins alimentaires de ses hôtes. La restauration est devenue un secteur clé, notamment du côté de l’EMS Le Château de Corcelles et des EHNV.

Emile Binggeli, surnommé Milo, est confortablement installé dans la salle à manger de l’Etablissement médico-social (EMS) Le Château de Corcelles. Le résident âgé de 93 ans attend avec impatience le plat du jour. «J’ai commencé à cuisiner lorsque ma femme est décédée il y a quelques années, précise celui qui vit depuis six mois à l’EMS. Mais ils font très bien à manger ici, je ne manque de rien et on peut se resservir.»

La qualité de la restauration a été une des priorités pour Dominique Willer, dès son arrivée à la tête de l’établissement en 2008. L’ancien étudiant de l’Ecole hôtelière de Lausanne sourit en voyant le cuisinier Philippe Deckert arriver avec l’assiette garnie de viande, de gratin de pommes de terre et d’asperges, pour le plus grand plaisir de Milo. «J’ai dit immédiatement que je ne voulais plus de produits déjà transformés et que l’on devait travailler avec des fournisseurs locaux.»

Le Château de Corcelles, qui héberge 34 personnes, est labellisé Fourchette verte senior et a obtenu, en 2017, la note C+ – sur une échelle qui va de A à G – de l’indicateur Beelong, qui analyse l’impact environnemental de l’alimentation selon plusieurs critères comme la provenance ou le mode de production des aliments.

Une étude a démontré que 75% des produits utilisés dans les plats de l’EMS de Corcelles-près-Concise sont bruts, alors que 25% sont des ingrédients déjà transformés. «L’alimentation joue un rôle très important au niveau de la santé. Nous voulons équilibrer les menus tout en proposant des plats que les résidents ont l’habitude de manger.»

Contre le terme de «nourriture d’hôpital»

Le service de restauration des Etablissements hospitaliers du Nord vaudois (EHNV) requiert une grande organisation (lire encadré), mais la qualité est aussi au rendez-vous puisqu’il affiche également un taux de 75%. «Nous ne voulons plus que les gens parlent de nourriture d’hôpital, relève Marc Allemann, responsable hôtelier des EHNV. Plusieurs millions de francs sont dépensés pour la restauration et cet important budget permet de travailler avec de bons produits. La direction générale et médicale des EHNV a bien compris les enjeux liés à l’alimentation.»

Mais est-ce vraiment possible de contenter l’ensemble des patients et des résidents? Pour satisfaire les exigences de ces clients particuliers, un menu standard, élaboré avec le service  nutrition et diététique des EHNV (lire encadré gris), est décliné en une vingtaine de repas, en fonction des régimes alimentaires de chacun et des problèmes médicaux particuliers liés à la mastication et à la déglutition. «Nous avons des retours de manière indirecte puisque c’est le personnel soignant qui sert les plats, mais ils sont bons, affirme Marc Allemann. Nous sommes aussi en train de mettre en place des formulaires pour que les patients puissent nous donner directement leur avis.»

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Environ 1800 repas servis chaque jour

«Difficile à planifier»

En 2017, les cuisines des Etablissements hospitaliers du Nord vaudois (EHNV) ont servi environ 1800 repas chaque jour, dont 750 pour les patients, 350 pour les résidents et 370 pour les collaborateurs. Sur les sites d’Yverdon-les-Bains et de Saint-Loup, les menus sont établis en fonction de quatre cycles de six semaines.

«Le but est de proposer des produits de saison, mais il faut que l’on fasse preuve de flexibilité, précise le responsable hôtelier Marc Allemann. L’approvisionnement est un véritable challenge, c’est souvent difficile à planifier.»

Sur les sites de Chamblon, de la Vallée et d’Orbe, la planification est plus simple puisqu’elle s’étend sur une année. «Les attentes ne sont pas les mêmes pour des patients qui restent quelques jours ou des résidents en EMS qui sont là plus longtemps, les repas sont appréhendés différemment.»

Problème sous-estimé

Traiter la dénutrition

Le service nutrition et diététique des Etablissements hospitaliers du Nord vaudois (EHNV) travaille en étroite collaboration avec celui de la restauration. Sa mission principale? Prendre soin des personnes souffrant de dénutrition. «En Suisse, cela concerne 30 à 40% des personnes hospitalisées. Ces patients ont des besoins nutritionnels spécifiques, le but étant de leur faire reprendre du poids, relève Anne Blancheteau, responsable du service et diététicienne ASDD (Association suisse des diététiciens). Les soins doivent être accompagnés par une bonne alimentation.»

Gianluca Agosta