Bilan encore très flou
28 janvier 2025 | Textes: Jean-Philippe Pressl-WengerEdition N°3879
Inauguré il y a un peu plus d’un an, le parc éolien de La Gittaz et du Mont des Cerfs, sous la responsabilité de Romande Energie, n’est pas encore en mesure de transmettre un bilan. Aucun chiffre concernant la production n’a été communiqué pour l’instant. Par ailleurs, le bruit et les problèmes liés aux oiseaux demeurent des préoccupations actuelles.
Pas de chiffres, mais des problèmes de givre
Le premier parc éolien du canton de Vaud est censé produire 22 millions de kWh par an. Mis en service en novembre 2023, puis inauguré en janvier de l’année suivante, il a vécu une première année d’exploitation. Le temps de tirer un premier bilan. «Cette première année d’exploitation n’est pas représentative du potentiel de production car c’est la phase de réglage indispensable à toute nouvelle installation», détaille Michèle Cassani, la porte-parole de Romande Energie. On évite donc ici soigneusement de chiffrer la production effective après plus de 12 mois d’activité. Ces chiffres n’ont d’ailleurs pas non plus été transmis à la Municipalité de Sainte-Croix (lire interview ci-contre). L’entreprise basée à Morges annonce également que la production de cette première année «s’inscrit parfaitement dans nos projections», donc les chiffres existent bel et bien. Sachant que les éoliennes produisent les 70% de la capacité annuelle entre octobre et mars, Romande Energie devrait logiquement communiquer à nouveau dans quelques semaines.
Par ailleurs, le givre joue des mauvais tours aux exploitants. «A la suite du risque de formation de givre sur les pales et afin d’augmenter la sécurité des randonneurs et des tracés touristiques, nous avons décidé d’arrêter préventivement les machines en début d’année ainsi qu’en décembre dernier, poursuit Michèle Cassani. En parallèle, nous avons installé des panneaux de sensibilisation par rapport à des risques de projections et chutes de glace.» Les éoliennes devraient posséder un système de chauffage ou de dégivrage. Toutefois, il semble qu’une fois mis en route, de la condensation se forme et, en conséquence, de la glace et du givre.
Les défenseurs de la nature inquiets pour les oiseaux
Au-delà des nuisances sonores et du manque d’information concernant la production récente du parc, une autre problématique inquiète. Quelles sont les véritables conséquences pour la faune, et plus particulièrement pour les oiseaux? Premièrement, la présence des éoliennes peut avoir un impact direct sur les oiseaux, comme une collision avec une pale. De surcroît, les lumières sur les éoliennes peuvent attirer les oiseaux migrateurs lors de nuits de brouillard et augmenter le nombre de collisions. Mais il y a aussi des impacts indirects ; les petites espèces, de même que les chauves-souris, peuvent être jetées à terre par les turbulences ou elles peuvent être victimes de la variation importante de pression due au mouvement des pales. Cet effet peut entraîner une hémorragie interne fatale sans blessures apparentes (barotraumatisme). Biologiste installée dans le Nord vaudois, Chantal Guggenbühl s’intéresse particulièrement à cette problématique, pas seulement pour la région de Sainte-Croix, mais également pour la région de la Grandsonnaz qui pourrait accueillir un parc éolien de l’entreprise Enova, détenue par les Services industriels de Genève. «Les oiseaux migrateurs ont l’habitude de suivre les crêtes jurassiennes pour s’orienter dans leur vol, détaille-t-elle. Toutefois, ils ne sont pas habitués à faire face à des mâts de la taille de ceux construits près de Sainte-Croix.» Il faut noter que les responsables du parc ont installé un radar pour récolter des informations sur les différents flux migratoires.
Plusieurs autres espèces pâtissent également de la présence même des éoliennes. «La bécasse des bois par exemple, pointe Chantal Guggenbühl. Le mâle utilise l’espace entre les sapins pour son vol nuptial. Et le survol de son territoire peut s’avérer problématique. On peut également citer l’alouette lulu et le faucon pèlerin (tous deux sur la liste rouge des espèces vulnérables) qui pourraient être en danger en raison des pales des éoliennes.» Par ailleurs, une famille d’aigles royaux est installée dans le Val de Travers. Le territoire de ce majestueux rapace s’étend parfois jusqu’à 100 kilomètres carrés. Autant dire que les crêtes du Jura en font forcément partie.
Le comptage des oiseaux frappés par des pales s’avère plutôt compliqué en raison de la faune locale qui débarrasse rapidement les carcasses tombées du ciel.
Yvan Pahud: «Nous aurions peut-être dû nous montrer un peu plus curieux»
Yvan Pahud, avez-vous reçu des chiffres précis concernant la production du parc éolien de la part de Romande Energie?
Non. Nous avons rencontré nos partenaires de Romande Energie en début de semaine dernière. Nous avons eu de bons échanges sur plusieurs sujets, mais nous n’avons pas reçu de chiffres concernant la production. Nous aurions peut-être dû nous montrer un peu plus curieux.
La Commune de Sainte-Croix est-elle rétribuée par rapport à la production du parc éolien?
Non, pas du tout. Un paiement préalable a été effectué par Romande Energie et nous ne sommes absolument pas rémunérés par rapport à la production.
Concernant la réfection de la route de la Gittaz, un dépassement du budget initial a été constaté. Comment la Commune va-t-elle régler la situation?
Pour l’instant, tout est en discussion avec Romande Energie. Nous attendons surtout que toutes les factures soient rentrées, de façon à connaître tous les tenants et aboutissants. Ensuite nous pourrons trouver une solution.
Plusieurs habitants, dans certains quartiers, sont incommodés par le bruit régulièrement généré par les éoliennes, que ce soit le changement d’orientation ou le bruit des pales. Des mesures sont-elles prévues?
Dans cette thématique des nuisances sonores, il existe une problématique liée à la prise des mesures. Actuellement, il n’y a pas encore de protocole reconnu par les autorités pour mesurer les bruits d’un parc éolien. Beaucoup de données autres que le bruit en question entrent en ligne de compte.