«C’est une nouvelle aventure qui débute»
27 janvier 2015Après treize ans de Municipalité, le PLR Jean-Daniel Carrard a été élu, hier, tacitement à la syndicature de sa ville d’Yverdon-les-Bains. L’homme se sait très attendu après le basculement de l’Exécutif à droite. Entretien.
Yverdon-les-Bains tient son nouveau syndic. Seul candidat, le PLR Jean-Daniel Carrard a été assermenté hier soir, succédant au socialiste Daniel von Siebenthal, qui avait démissionné au 31 décembre dernier. Rencontre avec le nouvel homme fort de la Municipalité de la Cité thermale, un Exécutif que le dessinateur architecte de 56 ans avait intégré en 2002.
Quel est votre état d’esprit, aujourd’hui, à la veille de ce mandat de syndic?
C’est un nouveau défi, une nouvelle aventure qui débute. Bien sûr, c’est un monde qui ne m’est pas totalement inconnu. Je sais comment fonctionne l’institution. Mais la place de syndic est forcément un peu différente… et certainement plus exposée.
A quel moment vous êtes-vous dit: «C’est mon tour?»
Je n’avais aucun plan de carrière. Etre syndic n’était pas un but en soi. Cela n’était d’ailleurs même pas d’actualité jusqu’à la démission surprise de Daniel von Siebenthal. Mais c’est véritablement après le résultat du premier tour de l’élection complémentaire que j’ai commencé à y réfléchir.
Vous n’y pensiez pas le matin en vous rasant devant la glace?
Non. J’avais d’ailleurs déclaré, une fois, à mon parti, que je ne rêvais pas d’être calife à la place du calife. Les circonstances de la vie ont fait que cette possibilité se présente à moi. Après treize ans passés dans le même dicastère, je me suis dit qu’il y avait peut-être autre chose à vivre.
N’avez-vous pas de regret à quitter la police, que vous avez dirigée durant treize ans?
En même temps, treize ans, c’est long… J’ai vécu beaucoup de choses. Avec mes collègues directeurs de police, nous avons ainsi mené la campagne contre la police unique (ndlr: en 2009), ce qui a fédéré les grandes villes du canton. J’ai participé à la création de la Loi sur l’organisation policière vaudoise… C’était passionnant. Certes, je pars avec un petit pincement, mais avec le sentiment que nous avons fait juste.
Comment abordez-vous cette période de syndicature qui ne durera qu’une année, avant les prochaines élections?
Ce sera une période qui promet d’être dense. On va rentrer directement dans la campagne électorale. Le temps est court. Et les gens attendent des résultats, suite également à ce que la droite, et mon parti en particulier, a revendiqué ces derniers mois. Dans l’immédiat, j’ai mis en place des séances lors desquelles je rencontrerai tous les chefs de service en compagnie de leur municipal du tutelle.
Dans quel but?
Je leur demande de me présenter tous les dossiers, leur avancement et le calendrier pour les deux années qui viennent. Comme nous ne pouvons pas courir tous les lièvres à la fois, au risque de se disperser et de s’épuiser, je vais proposer à la Municipalité de prioriser un ou deux projets, pour mettre toutes les forces dessus.
Avez-vous déjà quelques idées quant aux projets à prioriser?
Ce serait malhonnête de m’avancer, tant que je n’ai pas terminé les auditions des chefs de service.
Votre parti avait néanmoins fait campagne sur le stationnement et la mobilité…
Ce sont des éléments qui seront bien sûr à prendre en considération rapidement.
Et le projet de parking souterrain à la place d’Armes?
Sans dévoiler de grands secrets, on peut imaginer que cette réalisation fera partie des priorités, vu que nous avons déjà un projet pour l’aménagement en surface. Mais, ce qui est important dans le fond, c’est que ceux qui veulent venir en ville puissent trouver de la place, afin d’éviter une désertification du centre.
Les attentes de la population sont énormes. Est-ce que cela vous effraie?
Si cela m’effraie… non. Il y a plusieurs voies pour répondre à ces attentes. Nous devons avoir une écoute à plusieurs niveaux. En premier lieu, avec les gens qui nous interpellent sur des projets. On a vu, par exemple, passer des pétitions sur le stationnement… Il faudra écouter. Mais on attend aussi d’un Exécutif qu’il sache trancher.
Durant cette législature, il y a eu beaucoup de tensions au sein de la Municipalité. Comment allez-vous les apaiser?
Je vous parlais d’écoute. Celle-ci commencera au sein même de la Municipalité. Nous devrons travailler ensemble. La population n’attend pas de nous que nous nous battions comme des chiffonniers. On m’a souvent dit que, maintenant que la droite a la majorité, nous étions légitimes pour faire ce que nous voulons… Bien sûr que non. C’est tout le contraire. Il faudra convaincre la partie gauche de l’hémicycle que ce que nous proposons est de qualité. Il est illusoire de croire que nous pourrons passer des projets en force. Nous devons arrêter de nous battre sur tous les domaines, trouver des compromis politiques, faire aboutir des projets ensemble même s’ils doivent être amendés en fonction des sensibilités, afin de valoriser notre ville. Yverdon a un potentiel important, mais je suis parfois froissé de voir l’image qu’en ont mes collègues du reste du canton.
Que manque-t-il, selon vous, à Yverdon, pour prendre véritablement sa place de deuxième cité du canton?
Nous devons être davantage présents dans les différents groupes de réflexion cantonaux. Nous avons peu de représentants de la ville et de la région dans ces structures, en comparaison avec l’Arc lémanique. La voix d’Yverdon doit être portée, pas forcément au Grand Conseil, mais dans des instances comme l’UCV (ndlr: Union des communes vaudoises). Il faut également améliorer les conditions-cadres.
C’est-à-dire?
Il y a par exemple la création d’installations lacustres, comme un vrai débarcadère ou un port de loisirs. Un nouvel habitant n’a aujourd’hui pas de possibilité pour amarrer un bateau, alors même que nous sommes au bord d’un lac. Cela passe aussi par la culture. La programmation théâtrale est d’une grande qualité, mais il faudrait également pouvoir compter sur une manifestation pérenne. Nous avons vu les retombées du festival Sonisphère.
Comment y arriver?
On peut bien sûr attendre à côté du téléphone qu’il sonne… Mais il faudra faire un effort, comme nous l’avons fait ces derniers temps dans le domaine du sport. Nous sommes allés chercher des manifestations, comme la Semaine européenne du cyclotourisme et la manche de Coupe du monde de paracyclisme. Cela demande du temps et du travail aux services de la Ville, mais ce sont des événements qui focalisent l’attention sur Yverdon.
On a reproché à votre prédécesseur d’avoir pris trop de mandats. Les garderez-vous?
Je n’ai pas tout conservé. J’ai choisi de garder quelques représentations dans des associations importantes, comme AggloY et Y-Parc.
Conserverez-vous les présidences de ces organismes?
Oui, compte tenu de leur importance stratégique. Pas contre, j’ai abandonné des représentations plus relationnelles, notamment celles avec l’Arc jurassien, qui ont été confiées à la municipale en charge du tourisme (ndlr: la socialiste Nathalie Saugy).
Sur un niveau plus personnel, syndic étant un poste à 100%, qu’allez-vous faire de votre bureau d’architecture?
C’est une question qui m’a beaucoup travaillé. Normalement, vous êtes élu syndic pour une législature de cinq ans. Dans mon cas, il reste une année avant les prochaines élections. Il peut arriver que je ne sois pas réélu ou, surtout, que la droite perde la majorité. Le risque est majeur de lâcher mon bureau pour seulement quelques mois. Tout en mettant la priorité sur la syndicature, je suis en train de trouver une solution afin de m’organiser avec mon travail, pour une période transitoire. Mais c’est certain, en cas de réélection en 2016, je serai un syndic à 100%.