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Claude D. et l’obsession du détail

9 mars 2016 | Edition N°1698

Renens – Au deuxième jour de son procès, l’assassin présumé de Marie a longuement raconté comment il avait enlevé, puis étranglé sa victime. Avec froideur et minutie.

Présence policière, des dizaines de journalistes, un très nombreux public... Le procès de Claude D., qui s’est ouvert lundi, à Renens, est ultra-sensible. © Michel Duperrex

Présence policière, des dizaines de journalistes, un très nombreux public… Le procès de Claude D., qui s’est ouvert lundi, à Renens, est ultra-sensible.

Après un premier jour d’audience très éprouvant (La Région Nord vaudois du 8 mars), le procès de Claude D. s’est poursuivi, hier, dans une ambiance tout aussi tendue. Le Tribunal d’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois, qui siège exceptionnellement à Renens, a consacré la journée entière à l’interrogatoire du prévenu. Au cours de très longues minutes, l’accusé a pu démontrer son obsession du détail et des infinies controverses sur des éléments complètement annexes à la cause. «Je suis maniaque, ça peut devenir un défaut de toujours vouloir tendre à la perfection. Oui, ça peut être pesant», a expliqué Claude D. Par d’autres remarques, il a souligné son besoin de tout contrôler, la position de chaque objet dans son appartement, par exemple.

Il affirme avoir voulu se suicider après

Ce mode de fonctionnement est aussi ressorti lors de la longue évocation des heures fatales à Marie, 19 ans, tuée durant la nuit du 13 au 14 mai 2013. Enlevée à la sortie de son lieu de travail, au restaurant du Golf de Payerne, ligotée, les deux individus sont restés durant des heures dans la voiture de Claude D, parquée au bois de la Scie de Châtonnaye, dans la Glâne fribourgeoise. «Je lui ai annoncé que nous allions mourir. Mon idée était également de mourir», a affirmé l’accusé de 39 ans. Questionné à plusieurs reprises par le procureur général Eric Cottier sur l’attitude de Marie, il a laissé entendre que la jeune fille avait accepté son sort. Sommé de s’exprimer devant le père et la soeur de la victime si Marie n’avait pas résisté, Claude D. a refusé de répondre.

Interrogé sur la durée de la strangulation de la jeune fille, Claude D. a déclaré qu’il avait fini par dire n’importe quoi, sous la pression de la police. Selon l’acte d’accusation, il aurait serré le cou de Marie, à l’aide de la ceinture de celle-ci, pendant dix minutes et aurait bien vérifié ensuite sa mort. L’accusé aurait, ensuite, entendu un train, mais pas réussi à le situer pour se jeter dessous. Sa course effrénée, poursuivi par la police fribourgeoise, n’aurait été en fait qu’une volonté de se tuer au volant. A un endroit bien connu, contre un muret.

Frappant, à nouveau, l’assistance par son assurance, sa décontraction, son goût de la répartie vis-à-vis du Tribunal ou du procureur Eric Cottier, Claude D. a été décrit par l’inspecteur principal qui s’est occupé de lui comme un être «totalement dénué d’émotion, d’un détachement frappant et d’une froideur extrême». Chez lui, il n’y a eu «aucun regret envers la victime, par rapport à l’acte ou la famille de Marie».

Durant la matinée d’hier, l’accusé a contesté toute relation amoureuse avec Marie. Comme la veille, il a systématiquement cherché à démontrer que la jeune fille «se prostituait», qu’elle menait des vies parallèles, alors que certains la prenaient pour «une fille de pasteur», le métier de son père.

Pour expliquer l’attrait qu’il exerçait, selon lui, sur Marie, Claude D. a avancé à nouveau l’argent, les milliers de francs qu’il avait toujours sur lui. Sa façon claire de tout payer. Marie aurait misé là-dessus à plus long terme. Interrogé plusieurs fois sur les mobiles de son acte, Claude D. a répété son refus de répondre. Il a mentionné «une bande de Blacks» menaçants, que Marie aurait connus lorsqu’elle travaillait dans un fast-food. C’est aussi à cause de ces gens que lui-même aurait à tout prix essayé de se procurer une arme.

Expertises attendues

Selon Claude D, «on l’empêche» de prouver ce qu’il dit en lui refusant l’accès à des données téléphoniques. Et s’il ne veut pas donner davantage d’informations aux enquêteurs pour qu’ils puissent se lancer sur une piste, c’est parce qu’il n’a «pas confiance dans le système, ni dans l’inspecteur». L’audience se poursuit aujourd’hui avec l’audition attendue des experts psychiatres, dont le diagnostic pèsera lourd dans la décision du Tribunal. Le procès durera encore toute la semaine. Le verdict est quant à lui attendu pour le 24 mars.

ATS/Réd.