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Consommateurs de drogues sous pression

26 septembre 2017 | Edition N°2088

Yverdon-les-Bains – L’association Zone Bleue connaît, depuis quelques mois, une hausse de fréquentation des toxicomanes, à la suite des opérations contre le deal menées par les autorités municipales.

La Municipalité est au début d’une phase de réflexion pour gérer la problématique des personnes dépendantes. ©Valérie Beauverd

La Municipalité est au début d’une phase de réflexion pour gérer la problématique des personnes dépendantes.

Depuis le mois de mai dernier, les autorités communales yverdonnoises, en collaboration avec la Police cantonale vaudoise et Police Nord vaudois, ont mené une vaste opération contre le trafic de stupéfiants au centre-ville. Elles ont, notamment, renforcé la présence policière, afin de «déstabiliser les délinquants».

De surcroît, la mise en place de ce dispositif de sécurité a également eu des répercussions sur les consommateurs de stupéfiants. Pierre-Yves Bassin, directeur de Zone Bleue, une institution qui offre un lieu d’accueil journalier aux personnes dépendantes, constate que ces mesures exercent «une pression supplémentaire» sur les toxicomanes.

 

Une nette augmentation

 

«La tension règne. Nous avons dû faire face à des actes de violence.» Pierre-Yves Bassin, directeur de Zone Bleue

«La tension règne. Nous avons dû faire face à des actes de violence.» Pierre-Yves Bassin, directeur de Zone Bleue

«Le deal de rue devenait problématique à Yverdon-les-Bains, reconnaît le directeur. Les consommateurs ne pouvaient pas parcourir vingt mètres sans être accostés par des trafiquants. L’opération de la police a montré des résultats visibles jusqu’à un certain point. Et nous avons remarqué une hausse de fréquentation des personnes dépendantes au sein de notre institution.» Selon les chiffres de Zone Bleue, 76 personnes, en moyenne, sont accueillies chaque jour à la rue de Neuchâtel 4, depuis le début de l’année, alors qu’en 2016, ce chiffre s’élevait à 64. «La tension règne entre certains toxicomanes, poursuit le directeur. Nous avons, notamment, dû faire face à des actes de violence», poursuit le directeur.

Par ailleurs, l’offre de produits sur le marché (héroïne, ecstasy, cocaïne, méthamphétamine, etc.) s’est diversifiée au cours des dernières années. «Désormais, une multitude de produits sont consommés simultanément en fonction du marché, avec des effets imprévisibles sur les comportements, précise Pierre-Yves Bassin. Et de poursuivre que l’objectif de Zone Bleue consiste à maintenir les personnes dépendantes dans un réseau de soin. «Face à la pression, le risque pour les usagers de drogues, c’est qu’ils se retirent dans des shootoirs isolés, hors de tout contrôle.»

 

Lutter contre le deal de rue

 

La Municipalité d’Yverdon-les-Bains, par la voix de Jean-Claude Ruchet, municipal en charge du Département de jeunesse et cohésion sociale, affirme que «rien de concret» n’a encore été envisagé pour faire face au problème. «Nous sommes dans une phase de réflexion avec nos différents partenaires sociaux.» Le déplacement de Zone Bleue dans d’autres locaux pourrait représenter une solution.

Contactée, la Police cantonale vaudoise n’a, pour l’heure, pas répondu à nos questions.

 

Réduire les risques liés à la drogue

 

Depuis sa création, en 1997, Zone Bleue est l’une des quatre structures de prévention du canton présentes à Lausanne, Morges et Vevey. «Notre mission est d’offrir un lieu d’accueil où les usagers de drogues, ainsi que les parents et les amis peuvent trouver une écoute et où ils ne se sentent pas jugés, explique Pierre-Yves Bassin, directeur de l’institution yverdonnoise.

Zone Bleue offre plusieurs services. «Ici, les personnes dépendantes peuvent échanger du matériel d’injection propre, afin d’éviter tous les risques liés à l’hépatite et au SIDA, notamment», poursuit le directeur. Par ailleurs, elles peuvent prendre une douche, utiliser la buanderie, passer des téléphones administratifs et recevoir des soins.

Plus d’informations sur : www.zone-bleue.ch ou au 024 420 24 44. Du lundi au jeudi, de 11h à 17h30, et le vendredi, de 11h à 16h.

 

Un espace de consommation sécurisé prévu

 

Les personnes qui s’injectent la drogue dans les toilettes ou les parcs publics s’exposent à d’importants risques sanitaires.

Dans la capitale vaudoise, un projet pilote d’un espace de consommation (ECS) sera mis en place pour les usagers de drogues, dans le quartier du Vallon, d’ici au printemps 2018. La Suisse compte à ce jour douze ECS, répartis dans huit villes. Lausanne reste la seule ville importante à ne pas encore disposer d’un tel lieu pour les personnes dépendantes.

Selon Pierre-Yves Bassin, ce type d’espace pourrait être envisagé dans la Cité thermale, même s’il reconnaît qu’un tel dispositif à un coût non négligeable pour la collectivité. «On attend de voir quels seront les résultats du projet pilote lausannois », conclut-il.

Valérie Beauverd