Alors que Chris Zindel, le bassiste de Bastian Baker, cherchait un job de programmateur artistique, il se retrouve à diriger des équipes techniques à Explorit. Une entrée par la petite porte qui lui vaut d’être le visage que tout le monde connaît dans la grande maison dorée d’Y-Parc.
De star à l’Olympia, à Paris, Chris Zindel est devenu l’inconnu chef de chantier d’Explorit, à Yverdon-les-Bains. Un rôle aux antipodes de la carrière artistique du bassiste de Bastian Baker, mais qui lui a permis de se faire connaître à Y-Parc. Aujourd’hui, il organise trois concerts hebdomadaires et, demain, il pourrait bien monter un label. Mais ça, c’est de la musique d’avenir, assure-t-il. Rencontre avec le conseiller des futurs stars du Nord vaudois!
Chris Zindel, comment en êtes-vous arrivé à travailler à Explorit?
J’ai atterri ici par hasard! En fait, je cherchais un travail dans la programmation musicale et on m’a redirigé vers Jean Christophe Gostanian (ndlr: fondateur d’Explorit). On s’est tout de suite bien entendus, en tout cas de mon côté (rires)! J’ai été engagé en octobre pour un 40%. Mais il n’y avait pas de travail à cause du Covid. Puis, en novembre, il m’appelle car il cherche quelqu’un pour coordonner le chantier d’Explorit.
Mais aurait-on loupé une étape? En plus d’être musicien, vous avez des compétences dans la construction?
Non, pas du tout! Mais ça, c’est typiquement Jean Christophe. C’est un fonceur et il fait confiance à ses équipes. Il m’a donné les clés de la maison et il m’a dit: vas-y! On fera un bilan après. Je me suis donc mis dans la peau d’un chef de chantier.
Et alors, comment cette reconversion extraordinaire s’est-elle passée?
Très bien! En fait, je devais surtout temporiser, calmer le jeu entre les ouvriers, leur donner le temps de m’expliquer leur problème et leur enlever de la pression. Ensuite, ils me le rendaient bien, parce que je connaissais tout le monde et dès que j’avais besoin d’un coup de main, je trouvais toujours quelqu’un prêt à m’aider.
Est-ce la même chose de gérer une équipe sur un chantier ou une bande de musiciens?
Un peu, oui. C’est peut-être mon côté social qui m’a aidé (ndlr: il a exercé en tant qu’éducateur durant près de dix ans). Par contre, c’était drôle, parce qu’ici personne ne me connaissait. Et je n’avais évidemment dit à personne de quel milieu je venais. Tout à coup, un des ouvriers vient vers moi et il me dit: mais en fait, tu es une mégastar, toi!
Que lui avez-vous répondu?
Qu’est-ce que je peux faire pour t’aider? C’est vrai que c’était peut-être la seule fois où il ne fallait pas que je sorte ma carte Bastian Baker!
Maintenant que le chantier est grosso modo fini, vous avez retrouvé votre rôle de programmateur musical?
Oui, mais je ne fais pas que ça. Je suis employé à 100% désormais à Explorit pour gérer la programmation du bar La Fabrica et pour faire du coaching au coworking BeamMeUp.
Pourquoi ajouter une corde de mentor à votre arc de musicien et chef de chantier?
Pour aider les artistes! Je me rappelle à quel point j’ai galéré au début. Je voulais passer de la scène du pub d’Echallens à celle du Comptoir, mais personne ne répondait à mes mails, classique. Ensuite, j’ai eu la chance de faire partie de la folle aventure de Bastian Baker, et là tout est allé très vite. En 2014, je suis revenu à Echallens pour cofonder une petite salle de concert, le ZR Live music. C’est là que j’ai réalisé qu’il y avait énormément de demandes de groupes.
Avez-vous pu les aider dans leur première expérience de la scène?
Oui, je leur donnais quelques tips (ndlr: conseils) que personne ne vous confie, des choses qu’on ne peut apprendre dans aucune autre école que dans celle de la scène. J’ai rencontré des musiciens qui étaient excellents seuls, mais en groupe, cela ne fonctionnait pas.
Les problèmes entre artistes, est-ce que vous avez connu ça avec Bastian Baker?
Il y a toujours des tensions dans les groupes, mais avec Bastian, on est une team soudée. On ne parle pas de boulot, on est juste une bande de potes. Quand il y avait le salaire qui tombait on était contents, mais c’était surtout le fait de jouer ensemble devant un public qui nous motivait. C’est cette atmosphère-là que j’essaie de transmettre aux artistes que je rencontre.
Maintenant, vous pouvez utiliser votre nom et votre carnet d’adresses pour aider les talents de demain.
Exactement! C’est un investissement que je fais sur eux parce qu’ils ne me paient pas, mais si je les coache bien, ils pourront se faire connaître, signer avec un label et, là, on pourra faire un contrat de management. Je veux aider à faire briller les talents, exactement comme Carmelo Bisognano souhaite faire avec son espace de coworking BeamMeUp, à Explorit. C’est pour cela qu’il m’a engagé pour coacher les créatifs, que ce soit les chanteurs, les musiciens, les peintres, etc. Pour moi, ça fait partie du truc, je dois le faire parce que j’ai eu la chance d’accéder directement à la grande scène avec Bastian. C’est comme quand je me fais engueuler parce que je vide le stock de plectres durant les concerts pour les lancer au public. Pour moi, c’est un petit truc que je dois faire parce que je sais que ça peut apporter tellement de bonheur aux gens!
Avez-vous déjà repéré des pépites dans le Nord vaudois?
Oui, typiquement les Yverdonnois Stain of Light. Eux, ils doivent absolument aller sur le devant de la scène parce qu’ils ont tout pour réussir. Mais je sais que sans mon aide, ils n’arriveront pas à se faire connaître, parce que ce sont d’excellents artistes mais cela ne suffit pas pour percer. Il faut être au bon endroit au bon moment, il faut des contacts, il faut savoir se vendre, etc.
Qu’allez-vous faire pour ces Yverdonnois et les autres artistes nord-vaudois à BeamMeUp?
J’organise trois concerts par semaine à La Fabrica (ndlr: le bar situé dans l’atrium d’Explorit), avec le jeudi des soirées acoustiques, le vendredi une programmation plus funky et le samedi des concerts. Mais je ne peux pas faire jouer quelque chose de boiteux sur cette scène. L’idée est donc de lancer des castings tous les trois mois. Là, j’en choisis dix, dont deux que je vais travailler au corps pour les faire jouer sur la grande scène, à l’extérieur. Puis le groupe qui nous aura le plus séduits gagnera un mois de coaching avec moi pour qu’ensuite on puisse proposer ses morceaux à un label et à des radios.
Au fait, pourquoi ne pas avoir créé directement un label?
Je ne voulais pas prendre une route toute tracée. Je veux rester quelqu’un d’accessible. En travaillant à Explorit, les gens savent que s’ils veulent me voir, ils peuvent! Ils sauront que je suis présent à tous les concerts. J’ai trop souvent eu affaire à des personnes inatteignables, je ne veux pas être comme ça.
Donc vous n’excluez pas le fait de fonder un label par la suite, si je comprends bien?
Pourquoi pas un jour. Mais pour l’instant, ce qui m’anime est de faire de la place à tout ce qui a du sens et qui a du talent. Il faut les trouver ces pépites. Et faire de la place à ces personnes qui sortent du lot, comme Stain of Light.