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Deux aventures entre les sommets et la mer

9 janvier 2017 | Edition N°1908

Vallorbe – Isabelle Autissier et Lionel Daudet ont fait rêver le public, vendredi dernier, en présentant deux de leurs expéditions communes au Casino.

En 2016, l’Ada II a navigué aux abords du site de Torssukatak, tandis que les alpinistes découveraient les «big walls» du Groenland. ©Bigwalls-bigseas

En 2016, l’Ada II a navigué aux abords du site de Torssukatak, tandis que les alpinistes découveraient les «big walls» du Groenland.

Invités par la commission culturelle de la Cité du Fer, la navigatrice et aventurière Isabelle Autissier et l’alpiniste Lionel Daudet ont présenté les films de deux de leurs expéditions avant de répondre aux questions du public, venu en nombre au Casino de Vallorbe, vendredi dernier. La salle s’est mise à rêver lors de la présentation de l’expédition «No Man’s Land Project».

Une aventure dans l’Antarctique de deux mois et demi, qui s’est déroulée en 2010 aux confins du monde, et pour laquelle Isabelle Autissier a eu pour équipiers des marins-alpinistes, dont Lionel Daudet. Parti d’Ushuaia, l’équipage a longé la péninsule Antarctique par l’ouest. Le voilier Ada II, un robuste sloop de 18 tonnes et de 45 pieds en alu, servait de camp de base pour l’ascension de six sommets vierges. S’en est suivi une traversée d’environ 450 kilomètres jusqu’à l’Ile Pierre 1er, où les montagnards avaient pour objectif la conquête du pic Lars Christensen. Cette île, découverte tardivement en 1821, longue de vingt kilomètres et large de dix, figure parmi les dernières explorations de notre planète, inaccessible par les voies maritimes en hiver.

Le «No man’s land project» a réservé de belles surprises. ©Nomanslandproject

Le «No man’s land project» a réservé de belles surprises.

Le court été austral permet une approche périlleuse parmi les îlots affleurants, les fragments de séracs, de banquise et autres icebergs. Un siècle après sa découverte, une expédition norvégienne en a pris possession et a nommé le grand pic qu’elle aperçoit face à elle Lars Christensen, en hommage à l’armateur de ce périple austral. Une fois encore, les difficiles conditions météorologiques ont dicté leurs règles lors du «No Man’s Land Project». Pleins de bon sens, les grimpeurs ont rebroussé chemin à mi-hauteur.

«Contrairement aux marins qui ont peur avant d’avoir mal, l’alpiniste a mal avant d’avoir peur», a conclu Lionel Daudet.

Entre les falaises et la glace

Nanortalik, une commune de 1500 habitants. ©Big Walls Big Seas

Nanortalik, une commune de 1500 habitants.

Le «Big Walls Big Seas» constituait, quant à lui, une mission sportive et environnementale réunissant marins et alpinistes aguerris au Groenland, en 2016. Cette deuxième expédition présentée vendredi était également scientifique, puisque les uns ont collecté du plancton pour le Centre national de la recherche scientifique de Roscoff, et les autres ont récolté des échantillons de la flore locale. L’aventure se résume en deux défis. Le premier était alpin : «L’Ouest du Groenland reste une terre d’exploration où souffle l’esprit des pionniers, où demeure l’aventure, a commenté Lionel Daudet. Rares sont les expéditions qui tentent, dans ces endroits perdus de la planète, de gravir les grandes parois surnommées les «big walls», ces musts de l’alpinisme moderne. Le site de Torssukatak, avec ses murs verticaux et lisses, est un objectif de premier ordre pour l’alpinisme d’aujourd’hui.»

L’Ada II au confins de l’Antarctique lors de l’expedition de 2010. ©Nomanslandproject

L’Ada II au confins de l’Antarctique lors de l’expedition de 2010.

Mais l’aventure était également un défi maritime. «Naviguer dans l’Arctique est une véritable exploration que nous tentons en fonction des contact avec l’équipe d’alpinistes déposée à terre. Éloignement, isolement, contraintes de la mer et de la glace, mais du bonheur à la clé, s’enthousiasme Isabelle Autissier. Une navigation à couper le souffle au milieu des floes (ndlr : un fragment de glace flottant) sur fond de falaises rocheuses et de pics englacés. L’aller et le retour se sont faits dans les conditions exigeantes de l’Atlantique Nord. Une fois doublé le cap Farewell, la terreur des marins, nous avons embouqué la mer du Groenland. Le sud-ouest du Groenland, avec ses multitudes de fjords (ndlr : vallées érodée par un glacier et bordée de falaises élevées), offre des mouillages mythiques. Glace, villages inuits, mammifères marins au programme.»

Christiane Baudraz