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Explorit a-t-il réussi son décollage?
Yverdon, 18 août 2021. EXPLORIT. © Michel Duperrex

Explorit a-t-il réussi son décollage?

24 août 2021

Yverdon – Le centre de loisirs et découvertes s’est implanté au cœur d’Y-Parc avec l’ambition de devenir un pôle d’attraction pour toute la région, voire la Suisse romande. Il a ouvert ses portes secteur par secteur depuis mai. Après «l’effet wow», que reste-t-il?

Viser la lune et tutoyer les étoiles: tel était le grand rêve de Jean Christophe Gostanian en apportant son concept d’Explorit à Yverdon. Présenté comme un projet novateur pour les familles et les entrepreneurs, il était attendu de pied ferme par les Nord-Vaudois depuis longtemps. L’an dernier, les habitants ont découvert l’incroyable design carré-bossu du bâtiment habillé de noir, d’or et de formules scientifiques. Avant même son ouverture, il faisait déjà briller Y-Parc et même la Cité thermale. Puis, en février, les premiers locataires ont ouvert leurs portes, permettant aux clients de Medicit-y, un centre de compétences pédiatriques, d’entrer dans cet édifice imposant, mais encore en chantier. Dès le mois de mai, d’autres surfaces ont inauguré leurs locaux, comme Kindercity et Sciencity (des espaces ludo-éducatifs imaginés par Jean Christophe Gostanian pour les familles), Denner, le bar-restaurant La Fabrica, le palais du jeu Henigma et Cinéstudio avec ses salles de projection design. Aucune grande inauguration n’a pu se faire pour l’instant en raison des mesures sanitaires, d’une part, et d’autre part parce que certaines surfaces sont encore en travaux aujourd’hui. On attend notamment l’arrivée d’Exploria (un centre de conférences et d’e-game), un espace fitness-wellness au dernier étage, une crêperie, un autre restaurant et les espaces extérieurs.

Après quelques mois d’ouverture, les plus curieux ont déjà pu faire un tour à Explorit et tester quelques activités. La Région fait partie de ceux-là. Entre expériences personnelles et retours d’autres visiteurs, l’heure est au bilan. Et visiblement, quelques ombres viennent gâcher l’éclat du projet de Jean Christophe Gostanian.

Loin d’être aveugle et plutôt franche, Elodie Waquet, responsable du marketing et de la communication, planche déjà sur des solutions. «L’endroit est incroyable mais il est aussi difficile à gérer de par sa taille et sa diversité. Même si on ne s’est pas perdus devant l’ampleur de la tâche, on doit améliorer certaines choses. On va devoir avoir une discussion qui fait mal, mais qui est essentielle pour avancer, car le lieu en vaut vraiment la peine», concède celle qui croit fermement au potentiel d’Explorit. Toutefois, elle a remarqué que l’expérience client n’était pas encore à la hauteur du site. «Cela doit être l’élément primordial. La catastrophe, c’est les commentaires négatifs, car c’est une arme de destruction massive à retardement, prévient-elle. On est encore en phase d’adaptation et d’ajustement, on a encore des chantiers, mais on ne lâchera rien!»

Yverdon, 18 août 2021. EXPLORIT. © Michel Duperrex

 


Les plus

Un décor incroyable

De jour comme de nuit, l’édifice attire les regards par son originalité et son jeu de lumières. Et aucun visiteur ne reste de marbre en découvrant l’atrium où trône l’incroyable rampe en bois, fabriquée avec des arbres de la région. «L’effet wow» se lit sur tous les visages et les yeux scannent automatiquement cette sculpture impressionnante, avant de regarder dans tous les coins pour découvrir les nouveautés qui se cachent autour. Au-delà de ce colimaçon design, le public a également apprécié les ambiances féeriques de Kindercity et Sciencity. Les salles de cinéma ont aussi marqué les esprits. Il faut dire qu’entrer dans une pièce qui ressemble à la grande bibliothèque d’Harry Potter, ou se prélasser dans des fauteuils en cuir façon salon VIP – avec (bientôt) la possibilité de se faire servir du champagne sur un plateau d’argent – plonge immédiatement les cinéphiles dans un autre monde.

Une offre originale

Sur le papier aussi, le programme proposé à Explorit s’avère original à plus d’un titre. Tout d’abord avec les expositions sur le système solaire et les explorateurs des temps modernes comme Raphaël Domjan (Sciencity). Un étage plus haut et, visiblement un cran au-dessus également au niveau des activités, réside le terrier des merveilles de Kindercity. Là, c’est le royaume des tout-petits (idéalement 1 à 6 ans) où ils peuvent apprendre comment fonctionnent la permaculture, l’énergie hydraulique et d’autres ressources naturelles. Même s’il y a de nombreux jeux, il ne s’agit pas d’un parc d’attractions, ce qui signifie que les parents doivent accompagner les enfants pour leur expliquer les rouages. Premier bilan de l’été: les expositions ont attiré les foules malgré la situation sanitaire estivale, selon la porte-parole Elodie Waquet. «Dans tous les centres de loisirs, c’était l’hécatombe cet été car les gens voulaient partir en vacances. On s’y attendait alors on a prévu un plan d’action: communiquer et animer les campings avec notre mascotte. Cela a bien fonctionné jusqu’à ce qu’il y ait les inondations», assure-t-elle.

Un accueil chaleureux

Que l’on entre dans Explorit par la partie «Business», du côté de la plaine, ou par l’atrium, il faut reconnaître qu’une ambiance particulière saisit les passants immédiatement. Les commerçants disent bonjour, les serveurs sont extrêmement aimables et souriants avec les clients qui viennent seuls, en famille ou avec un chien. Même s’il manque parfois quelques panneaux, le visiteur est vite renseigné par les collaborateurs.


Les moins

Il manque une vraie signalétique

En entrant dans cette grande bâtisse, le visiteur peut vite s’y perdre. Car il n’y a pas, ou peu, de panneaux, et surtout pas de guichet d’accueil dans l’atrium. Ainsi, les gens doivent comprendre seuls que derrière l’indication Coworking se cache en réalité Henigma, un haut lieu du jeu, et déterminer ce que signifient les noms «Exploria» ou «La Fabrica». Interpellée sur le sujet, Elodie Waquet ne nie pas le problème, mais elle peut l’expliquer: «On commence avec deux handicaps, selon moi: la rampe, qui est à l’envers, à mon avis, puisque son entrée aurait mieux été devant les portes, mais il a été décidé de la mettre devant la billetterie pour des questions pratiques et d’harmonie de la structure, et l’informatique (lire ci-contre).» Et d’ajouter: «Normalement, ce sont des robots qui doivent accueillir les visiteurs. Ils fonctionnent mais ils ne sont pas encore tout à fait prêts. On a mis des panneaux en attendant leur arrivée à la rentrée.» Pour l’heure, seule Orea, le robot-serveur de Coffee Island fait l’animation, à l’instar de la machine qui imprime des logos et des images sur la mousse de lait.

Des problèmes techniques

Une fois que le public s’est repéré dans ce hall impressionnant, il peut explorer les expositions. Et là, plusieurs défauts ont été soulignés: problèmes de billetterie, jeux cassés ou retirés à Sciencity et à Kindercity, tourniquets et caisses parfois en panne… Au cinéma, plusieurs personnes ont remarqué que les salles n’étaient pas toujours nettoyées entre chaque séance et ceux qui ont acheté des places numérotées en ligne ont appris à leurs dépens que les sièges choisis sur internet n’étaient pas réservés en réalité… «On doit travailler tout ça, les problèmes de billetterie sont en phase finale de correction», relève Elodie Waquet. Entre un budget qui n’est pas extensible et un service marketing qui doit encore faire ses preuves, l’équipe va devoir faire des efforts pour apporter les changements souhaités. Mais elle le répète: «On ne lâchera rien, car ce lieu a beaucoup de potentiel. Le choix des matériaux est incroyable, maintenant il faut qu’on améliore cette expérience client.»

Des prix jugés trop élevés

Combien coûte un après-midi à Explorit? Cela dépend de ce qu’on y fait évidemment. Mais les attractions phares imaginées par Jean Christophe Gostanian restent Kindercity et Sciencity. Qu’on ait des enfants ou non, on paie un ticket pour voir les deux expositions (qui resteront cinq ans à Yverdon). Pour un adulte, il faut compter 22 francs, 18 francs pour les étudiants et AVS, 16 francs pour les jeunes de 4 à 15 ans et 8 francs pour les jeunes de 1 à 3 ans, ce qui fait jaser. Pourquoi faire payer ces tout-petits? «C’est une question qui revient souvent. C’est pertinent qu’il y ait un prix pour les jeunes enfants puisque l’exposition est prévue pour eux, pour les 1 à 5 ans, mais il faut un prix symbolique. On a décidé de faire moitié prix dans un premier temps et, maintenant, ce tarif a été enlevé, c’est donc gratuit, note Elodie Waquet. En tant que maman dans la cible d’Explorit, je trouve normal de payer, mais il faut que l’expérience soit complète, sans mécanismes cassés. C’est là où on peut s’améliorer.» Avant de séduire la Suisse romande, il va falloir convaincre les Yverdonnois qui, eux, n’ont pas tous de gros budgets. Les responsables en sont conscients, d’ailleurs, ils aimeraient animer les samedis avec des activités familiales gratuites. Il y aura aussi les bateaux sur l’étang et les voitures électriques pour 5 francs les 10 minutes.

Orea ©Maillard

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Christelle Maillard