Yverdon-les-Bains – Les employés de Lassueur S.A. Avaient débrayé, avec le soutien d’UNIA. L’Association cantonale vaudoise des installateurs-électriciens (ACVIE) accuse le syndicat de violer la convention collective en vigueur.
Les fronts se durcissent entre les partenaires sociaux. En mettant sur pied une grève, ainsi que l’occupation des locaux de Lassueur S.A. (lire La Région du 27 et du 31 juillet), le syndicat UNIA a violé la convention collective de travail (CCT) en vigueur depuis 2014. C’est ce qu’affirme l’Association cantonale vaudoise des installateurs électriciens (ACVIE). «L’article 4.2 de la convention exclut le recours à la grève, détaille Jacques-Olivier Georges, secrétaire général de l’ACVIE. Nous aurions dû régler ce cas avec les signataires de la CCT selon un protocole établi qui est en vigueur.»
Négociations à venir
Dans un communiqué, l’ACVIE rappelle que, par deux fois, le patron de Lassueur S.A. Avait informé son personnel des difficultés momentanées que connaissait l’entreprise, sans qu’aucune revendication n’ait été formulée de la part des employés. Jusqu’à la grève du 26 juillet.
Pour mémoire, la CCT en vigueur actuellement couvre la période allant de 2014 à 2018. Ainsi, dès cet automne, les premières négociations devraient avoir lieu pour redéfinir les contours de la prochaine CCT. Autant dire qu’au vu des pratiques coup-de-poing d’UNIA (ndlr : les locaux d’une entreprise située à Etoy avaient déjà été occupés en mai de cette année), les discussions risquent bien de débuter dans un climat plus que crispé.
Rôles inversés ?
Du côté d’UNIA, logiquement, on ne voit pas les choses de la même façon. «Il faudrait faire attention à ne pas inverser les rôles, prévient Pablo Guarino, secrétaire syndical en charge du secteur de l’électricité dans le canton de Vaud. Le fait de ne pas payer les salaires à temps est une violation de la CCT. Nous avons agi sur le mandat des travailleurs, qui nous ont soumis un cas d’urgence sociale. Nous ne pouvions pas rester les bras ballants face à cette situation, et nous avons fait notre travail en essayant d’appliquer le principe de proportionnalité dans notre action.»
Les deux fronts doivent encore négocier concernant un litige sur les heures supplémentaires d’un employé.
«Comme un coup de poignard dans le dos»
Le patron de Lassueur S.A. Revient sur les événements
Les conséquences de la grève orchestrée par UNIA, les 26 et 27 juillet dernier, ont eu un impact négatif pour l’entreprise Lassueur S.A. «Au moment où je vous parle, des travaux prévus risquent bien d’être annulés à cause de cette grève, regrette Laurent Schopfer, le directeur actuel. Tout ça alors que nous sommes aujourd’hui à jour avec les salaires, que les discussions se poursuivent et qu’il ne reste qu’à fignoler les derniers détails pour la cession de l’entreprise à un repreneur.» Ce passage de témoin devait avoir lieu fin juillet mais, pour différentes raisons, celui- ci aura lieu fin août.
Attaques personnelles
Mis en cause de manière personnelle lors de la grève, le patron reste particulièrement remonté. «Oui, j’ai une maison et une voiture de sport, reconnaît–il. Mais j’ai acquis les deux biens avant de reprendre l’entreprise, en 2009. Le lien qu’UNIA a pu faire n’est pas correct. Le secrétaire syndical Laurent Tettamanti, présent lors des discussions, s’est comporté de manière odieuse avec ma femme et moi», observe-t-il encore, dégoûté. Mais ce qu’il a le plus de peine à digérer : «C’est la trahison de mon bras droit, Jean- Marc Hugentobler. En novembre 2015, je l’ai sorti du chômage, alors qu’il avait 50 ans, poursuit Laurent Schopfer. Je lui ai donné sa chance, et même plus, en l’intégrant à l’équipe de direction. Le fait qu’il ne m’ait jamais averti de quoi que ce soit concernant l’action de juillet, c’est comme un coup de poignard dans le dos.»
Commentaire
Finalement, à quoi bon se battre ?
Dans cette affaire, c’est à se demander ce que recherche le syndicat UNIA, à part de la visibilité médiatique. Comment en est-on arrivé à une situation où un partenaire social, signataire d’une convention collective de travail au niveau national, préfère une action commando potentiellement illégale à un protocole défini pour régler ce genre de cas ?
Est-ce que clouer au pilori un patron qui se démène pour sauver son entreprise, en l’attaquant publiquement, et de manière personnelle, représente vraiment la réponse idéale à des difficultés financières ? Le sens du mot «partenaire » implique davantage l’entraide que la confrontation sauvage. Les âpres batailles doivent ainsi être menées lors des négociations des CCT, autour d’une table, jusqu’à ce que les parties trouvent un accord. Et ce dernier doit être respecté, de part et d’autre. Fin de la discussion.
La solution de facilité, pour l’entrepreneur en question, aurait été de poser les plaques, de faire faillite comme tant d’autres avant lui. Cela lui aurait finalement coûté un peu d’amour-propre, évité un lynchage public, mais aurait laissé sur le carreau plusieurs employés. Avec son action, UNIA force quelque part les entrepreneurs à se poser la question : «Finalement, à quoi bon se battre ?»