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«Il faut créer des emplois de proximité»

20 novembre 2015

Nord vaudois – L’Association pour le développement du Nord vaudois (ADNV) a publié son programme d’actions, afin de fixer la stratégie des quatres prochaines années. Le point avec son directeur: Jean-Marc Buchillier.

Pour Jean-Marc Buchillier, directeur de l’ADNV, l’enjeu est d’arriver à diversifier le tissu économique d’une région particulièrement dépendante de l’industrie et des exportations. © Michel Duperrex

Pour Jean-Marc Buchillier, directeur de l’ADNV, l’enjeu est d’arriver à diversifier le tissu économique d’une région particulièrement dépendante de l’industrie et des exportations.

Vous venez de publier votre programme d’actions prioritaires pour 2016-2019. A quoi cela sert-il?

Il faut commencer par préciser que nous nous inscrivons dans une durée. C’est en 1983 que l’ADNV publia son premier rapport, qui compilait alors beaucoup de statistiques. Le document actuel fixe, pour les quatre prochaines années, le cadre du développement de notre région. Il définit les grandes options, que ce soit au niveau du logement, de l’économie ou des équipements publics.

Quelles sont les options les plus marquantes?

Certaines font partie de notre ADN comme l’appui à la création et à l’implantation d’entreprises. Mais il y a aussi des nouveautés. Nous avons, ainsi, fait du tourisme un axe à part entière, ce qui n’était pas le cas avant. Nous allons aussi nous engager fortement au niveau de la formation pour adultes: que ce soit la formation continue pour actifs, le maintien des seniors dans le monde professionnel ou le retour au travail des mères de famille. Mais, surtout, durant la prochaine période, nous voulons sortir de cette logique de rattrapage.

Rattrapage… Que voulez-vous dire par là?

Pendant longtemps, le Nord vaudois s’est inscrit dans une dynamique dont le but était de rattraper un retard. Il est temps d’en sortir. Car, par exemple, si durant plusieurs décennies, notre région a été au-dessus de la moyenne cantonale en termes de taux de chômage, elle est, en 2008, passée en dessous. Pour y rester. Et cela, nous ne le répétons pas assez.

Quels sont alors les objectifs?

Le principal objectif est d’accompagner la croissance démographique de la région avec de la création d’emploi de proximité, afin de limiter le mouvement pendulaire. La difficulté, c’est que la nouvelle Loi sur l’aménagement du territoire (LAT) -c’est tout son paradoxe- nous mettra des bâtons dans les roues. Dans les deux-trois prochaines années, les contraintes de construction vont être plus sévères et les procédures seront rallongées… Et ceci, alors que, à part à Y-Parc, nous n’avons plus un m2 de disponible pour des activités industrielles et artisanales dans l’agglomération yverdonnoise qui compte, je le rappelle, 40 000 habitants.

Comment parvenir à créer des emplois?

Le tissu économique du Nord vaudois est fortement tourné vers l’industrie et les exportations. L’enjeu est la diversification, par, notamment, le tourisme, comme cité avant, et l’innovation, à travers nos trois incubateurs.

Justement, trois incubateurs, à Orbe, Sainte-Croix et Yverdon-les-Bains n’est-ce-pas trop pour une seule région?

Au contraire, je milite pour la distribution de l’innovation sur le territoire. C’est important de combattre la volonté de centralisation de certains, qui souhaitent limiter la recherche en Suisse sur deux sites: Dübendorf et l’EPFL. Nos trois incubateurs sont basés dans des endroits différents, ils ont des partenaires différents. C’est une richesse. Regardez le Technopôle de Sainte-Croix, il renferme une entreprise de soudure certifiée par l’Agence spatiale européenne -ce n’est pas anodin- et a su créer une collaboration unique avec le CPNV.

Au niveau de l’emploi, la question des frontaliers exaspère de plus en plus. A témoin, le fort score de l’UDC dans la région lors des dernières élections fédérales. Comment répondre à ce mécontentement?

Il ne m’appartient pas de donner des analyses politiques. Mais j’ai bien sûr remarqué que les gens réagissent à la question frontalière. Même si nous ne sommes -et de loin- pas dans la situation du Tessin, les gens ont des peurs au niveau de l’emploi, liées à la crainte du dumping salarial… La difficulté, c’est qu’il est, aujourd’hui, difficile d’influer sur la politique des entreprises.

Pour quelle raison?

L’industrie du Nord vaudois a connu un changement majeur, que les gens n’ont pas encore véritablement intégré. Auparavant, la direction des principales industries étaient basée dans notre région. Aujourd’hui, elles sont toutes ailleurs: aux Etats-Unis pour Dentsply Maillefer, en Allemagne pour Schott Guinchard ou au Liechtenstein pour Hilcona…

Justement, plusieurs entreprises ont délocalisé ces derniers temps: Bucherer et Bacab à Sainte-Croix, ou Cablecom à Yverdon. Avez-vous des craintes pour l’avenir?

Pas particulièrement. L’ADNV a été créée en 1969 pour contrer la monoculture industrielle de Paillard, qui avait le monopole quasi exclusif des emplois, qu’ils soient directs ou indirects. Nous n’avons plus cette dépendance, ce qui nous permet de nous relancer plus rapidement.

Yan Pauchard