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Ils ont créé une petite arche de Noé

11 novembre 2014

La famille Junod élève trois races d’animaux menacées, des légumes et des fruits anciens au Champ Lequet, sur les hauteurs de Bonvillars.

La famille Junod, représentée ici par Isabelle, Christoph et leur fille cadette Emma, ont décidé de peupler leur ferme du Champ Lequet de races en voie de disparition. © Michel Duperrex

La famille Junod, représentée ici par Isabelle, Christoph et leur fille cadette Emma, ont décidé de peupler leur ferme du Champ Lequet de races en voie de disparition.

Une fois n’est pas coutume, le brouillard enveloppe Le Champ Lequet, pourtant situé à 1040 mètres d’altitude. Cette ferme, devenue le lieu de résidence permanent de la famille Junod (Isabelle, Christoph, et les petites Erika et Emma) depuis 2008, abrite des représentants du bestiaire fermier que cherche à préserver la Fondation suisse pour la diversité patrimoniale et génétique liée aux végétaux et animaux ProSpecieRara (lire ci-dessous).

«J’ai toujours eu envie de revenir ici. C’est un rêve qui se réalise », commente Isabelle Junod. Ancienne employée des CFF, elle a quitté son poste et obtenu son brevet de paysanne pour redonner vie à l’alpage de ses grands-parents. Son mari, rencontré sur les bancs d’école à Grandson, l’accompagne dans son projet, mais conserve son emploi à 100% dans l’entretien lacustre et des cours d’eau. Cette attitude prudente, dictée par la situation actuelle dans le milieu de l’agriculture, la taille de l’exploitation et ses caractéristiques topographiques, a donné une autre vocation au Champ Lequet, qui sert, notamment de sanctuaire aux chèvres paon. Originaires des Grisons, ces caprins combatifs sont le coup de foudre du couple Junod. «Mon voisin de Villars-Burquin en avait», précise Christoph.

Viande et fromage

Les animaux de leur élevage, au nombre de quatorze lors du reportage, ont à leur disposition un vaste pâturage à proximité de la ferme et une étable à stabulation libre. Isabelle Junod s’attèle à la confection des fromages de mai à septembre, durant la période de fabrication laitière. Ceux-ci sont vendus, notamment, à la fromagerie de Villars-Burquin. La production de viande est, elle aussi, marginale. Elle couvre principalement les besoins de la famille.

Deux des poules appenzelloises huppées. © Michel Duperrex

Deux des poules appenzelloises huppées.

Hormis les chèvres, l’exploitation des hauteurs de Bonvillars héberge des chevaux, trois cochons laineux et autant de poules appenzelloises huppées. Des contingents que la maîtresse de céans aimerait faire progresser par l’élevage. Les animaux ne sont pas les seuls bénéficiaires du sanctuaire du Champ Lequet, dont le jardin de 350m2 produit des légumes anciens, comme des carottes géantes de Colmar, du fenouil perfection et des pommes de terre bleues de Saint- Gall, pour ne citer que ceux-là. Un verger, lui aussi composé de variétés d’époque, complète le tableau.

A terme, la famille nord-vaudoise n’exclut pas d’ouvrir Le Champ-Lequet aux personnes désireuses de découvrir tous ces trésors. Dans l’intervalle, rendez-vous sur le site Internet: www.champlequet.ch.

 

Des ambassadeurs dans le Nord vaudois

Un cochon laineux. © Michel Duperrex

Un cochon laineux.

Créée en 1982, la Fondation ProSpecieRara a pour but de préserver la diversité des animaux de rente et des plantes de culture en Suisse. Responsable du projet animaux pour la Romandie, Claudia Steinacker Chollet explique qu’outre les donateurs, «les associations d’élevage sont des partenaires essentiels, principalement basées en Suisse allemande. Nous souhaiterions avoir en leur sein davantage d’interlocuteurs francophones pour les éleveurs potentiels en Romandie».

Outre-Sarine, la fondation et le label du même nom jouissent d’une bonne notoriété, ce qui n’est toujours pas le cas dans notre région linguistique. A ce propos, les exploitations comme celles de la famille Junod ont un rôle précieux à jouer. Hormis ces derniers, ProSpecieRara a d’autres ambassadeurs animaliers dans le Nord vaudois. Claudia Steinacker Chollet pense notamment à Frank Siffert, expert pour les cochons laineux, et dont le domaine agricole de La Coudre, à Bonvillars, oeuvre à la conservation de divers végétaux et animaux.

Laine teinte régionale

A Fontanezier, Céline Ammann teint la laine des moutons miroirs avec des plantes de son jardin ou cueillies dans la région. Benoît Breton, de Bretonnières, entretient, avec des chèvres bottées et des vaches d’Interwald appartenant à la Confédération, les prairies maigres de la région de Romainmôtier, dans le cadre d’un programme de protection national.

Ce répertoire est proche de l’exhaustif, dans la mesure où il est établi sur la base des listes transmises chaque année par les associations d’élevage. «Chaque personne qui fait partie d’un des programmes de conservation –il en existe pour 26 animaux de rente- devient automatiquement membre actif de ProSpecieRara», précise-t-elle.

Ludovic Pillonel