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Images d’un impossible voyage dans le Sahara
Antoine Blanc et Régis Colombo. © Michel Duperrex

Images d’un impossible voyage dans le Sahara

10 octobre 2019

Régis Colombo, photographe, et Antoine Blanc, journaliste, vous invitent au pays des dunes et des rêves.

Chamboulé, pour ne pas dire plongé dans le chaos de la géopolitique, le Sahara est devenu inaccessible aux touristes, et même aux explorateurs. Il en reste des images fantastiques, telles celles figurant dans le livre «Sahara», publié aux Editions Favre par Régis Colombo, photographe, et Antoine Blanc, journaliste et designer graphique à 24heures. Ces deux comparses ont partagé plusieurs expéditions dans les étendues de sable et de roches. Ils en ont retiré une philosophie et de belles d’images.

«Sahara, le royaume des dunes et des rêves» a connu une première version il y a tout juste quinze ans. Cette terre des extrêmes, qui s’étend de l’Atlantique à la Mer Rouge, n’avait alors pas encore connu les bouleversements qui ne cessent de l’agiter depuis. On pense bien-sûr à la Libye, mais les conflits tribaux et les actions terroristes, avec leur lot d’enlèvements et d’exactions, ont fait que cette partie du monde s’est à nouveau refermée. Exception faite de quelques «spots» dans le sud algérien et en Mauritanie. Car si le tourisme a fait parfois des dégâts, sa quasi disparition a plongé des populations entières dans la précarité.

Un accès difficile et risqué

«La particularité, c’est qu’on ne peut plus y aller comme avant», explique Antoine Blanc, qui avoue son amour exclusif pour cette région du monde. Son compagnon d’aventure Régis Colombo aime saisir les lumières si particulières dans les espaces désertiques. Son métier lui a permis d’en parcourir de nombreux, notamment celui de Gobi, en Mongolie.

Recherches compliquées

Le livre qu’ils viennent de publier n’est pas une réédition fidèle de la version 2004. «Il a fallu actualiser les textes», relève Antoine Blanc. Et Régis Colombo de souligner que cette nouvelle version tient du miracle: «La société qui a réalisé la première impression  a disparu. Il nous était impossible de récupérer les fichiers. Il aurait été trop cher de tout refaire.» Fort heureusement, le photographe a conservé quelques CD et le disque dur de son ordinateur avait préservé des éléments importants: «On a réussi à récupérer une partie des fichiers sur le disque dur.»

Le matériel de base retrouvé, encore fallait-il le transférer sur un logiciel récent. Et pour Antoine Blanc, s’assurer que l’écriture tienne compte de l’évolution géo-politique. «A l’époque, j’avais eu trois mois pour faire les textes. Pierre-Marcel Favre nous avait prêté une pièce dans son bureau.»

Heureusement, il n’était pas nécessaire de refaire les images. «C’est que le Sahara, c’est immuable. Il n’y a pas grand chose qui a changé. Le problème c’est qu’on ne peut plus y aller comme on veut», relèvent les auteurs. Ils s’estiment privilégiés: «On a été au bon moment au bon endroit.» Régis Colombo se souvient d’avoir été embarqué dans cette aventure en 2000, alors qu’Alger était déjà ébranlée par les premiers attentats. «Je me suis retrouvé embarqué parce que la compagne d’Antoine ne voulait plus y aller. Dans le désert, il n’y avait pas de traces de pas, ni de véhicules, en raison des attentats.»

Les expéditions successives ont permis aux auteurs de vivre des moments épiques. Régis Colombo se souvient ainsi d’avoir obtenu lors d’une escale, en route pour le Niger, qu’on nettoie son hublot: «Ils ont simplement déplacé l’échelle pour le faire. Cela m’a permis de faire de belles photos aériennes!»

La réédition, remaniée, du livre de Régis Colombo et Antoine Blanc a été réalisée à l’occasion de la création de la Fondation Reverdir le Sahara, une région du monde dominée par la couleur de l’espoir il y a encore 5500 ans. Dans un livre publié également aux Editions Favre, l’ingénieur Jean-Edouard Buchter propose des solutions pour un retour à la végétation dans l’étendue la plus aride de la planète, exception faite des  zones recouvertes par les calottes glaciaires.

Des chantiers en cours démontrent que ce défi peut être relevé. Jean-Edouard Buchter est d’ailleurs convaincu que ce sont les populations qui y croient et y travaillent qui «induisent la pacification, plus durablement que les armées». L’ingénieur formé à l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) affirme qu’il n’est pas irréaliste de multiplier ces opérations par milliers.

Pour compléter la panoplie, les Editions Favre publient simultanément une réédition du Guide littéraire consacré au Sahara, préfacé par Théodore Monod. Les personnes intéressées par cette zone proche de l’Europe y trouveront des textes évoquant la découverte et la vie dans cette région à la fois  proche de l’Europe et tellement isolée.

Des photos à voir à Onnens

Hasard du calendrier, la Galerie du Vieux-Pressoir, à Onnens, accueille dès dimanche et jusqu’au 10 novembre (ouvert du jeudi au dimanche de 15h à 19h) une exposition de photos de Maximilien Bruggmann, consacrée au Sahara. L’explorateur yverdonnois, décédé en 2016, a réalisé une soixantaine d’expéditions dans les zones désertiques du monde, d’où il a ramené quelque 150 000 diapositives. Au Sahara, il s’est rendu dans les coins les plus reculés pour rencontrer ses amis nomades et photographier l’art rupestre, qui s’est développé à une époque où tout était vert.

www.editionsfavre.com

Isidore Raposo