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«J’ai la niaque,  je vais tout donner»
© Michel Duperrex

«J’ai la niaque, je vais tout donner»

23 avril 2021

Après deux saisons quasi blanches, Estelle Perriard est de retour sur la scène internationale. La néo-Chanvannaise vise Paris 2024.

 

Octobre 2018. Estelle Perriard revient des Championnats d’Europe M23 avec une médaille d’or autour du cou, obtenue en relais, ainsi qu’un 5e rang individuel. La Vaudoise est en pleine ascension.

Printemps 2019. Coup d’arrêt: elle se blesse au dos. Sa saison est terminée.

2020. Le coronavirus s’installe, les courses se font rares. La néo-Chanvannaise participe tout de même aux Championnats du monde à Hambourg mais, victime d’un problème mécanique à vélo, elle abandonne. «Je n’étais en plus pas encore revenue en top forme. Je n’étais pas prête.»

2021. C’est l’année du véritable come-back. Retombée dans les profondeurs des tabelles – elle pointe au 340e rang mondial – durant sa convalescence, la triathlète de 26 ans est parfaitement remise, elle a les crocs comme jamais et du vécu à faire valoir. «J’ai la niaque, je vais tout donner», lance celle qui se consacre désormais à 100% au triathlon, repoussant la suite de ses études à plus tard. «J’ai réalisé, durant ces deux années, que la compétition me manquait vraiment. C’est ce que je veux faire, ce qui me fait vibrer.»

Non, il n’était pas question d’abandonner. «Je me suis blessée alors que j’avais atteint un bon niveau, mais j’étais également très stressée par mes examens, raconte l’ex-étudiante. Mon corps a dit stop. Je m’en rends compte à présent, avec le recul. En suivant des études en même temps, il est dur de se donner entièrement et de réaliser son meilleur potentiel.»
Alors elle a fait des choix, dont celui de se consacrer totalement à sa passion sportive. «Oui, j’ai peut-être perdu deux années à cause de cette blessure, reconnaît-elle quand on la lance sur le sujet. Mais je me connais désormais mieux qu’avant.»

La période n’a pas été évidente. Elle a manqué les Championnats du monde de Lausanne en 2019, alors qu’une année plus tôt, cette fois en Coupe du monde dans la capitale olympique, elle était la seule Romande au départ en élite. «Les gens criaient mon nom pour m’encourager. J’en avais la chair de poule», se souvient-elle.

C’est du passé, et Estelle Perriard a désormais le regard tourné vers l’avenir. Celui qui, dans un monde parfait, l’emmènera aux JO de Paris 2024. «Ça, c’est l’objectif ultime. Avant d’y penser, il y a de nombreuses étapes à franchir, tempère-t-elle. J’espère déjà régulièrement obtenir de bons résultats en World Series, avoir de la constance à haut niveau.»

Elle a rejoint à Champvent il y a treize mois le trialiste Jérôme Chapuis, qui partage sa vie depuis plusieurs années. C’est de là que la sportive du Tryverdon prépare ardemment son retour aux affaires, qu’elle entreprendra étape par étape. Cela démarrera par une manche de Coupe d’Europe en Italie, courant mai. «Cette année, il s’agira pour moi d’accumuler les points sur le circuit européen et en Coupe du monde, afin de remonter dans le classement.»

Dans le sillage des leaders suisses Nicola Spirig et Jolanda Annen, Estelle Perriard se situe au sein d’un groupe de cinq athlètes qui se tiennent. Une épreuve interne, qui a eu lieu il y a quelques semaines, a permis de flirter avec la limite, de se réhabituer à se mettre «dans le rouge rouge». «Mon entraîneur m’a dit qu’en me voyant courir, il m’a revue en forme comme avant.» La machine est prête à redémarrer.

 

La voie était toute tracée

 

Elle ne devait avoir que 5 ans lorsqu’elle a annoncé à ses parents qu’un jour elle ferait du triathlon, voyant ses frère et sœurs participer à une course en relais dans le Val-de-Ruz. Quelques années plus tard, alors qu’elle pratiquait déjà la natation, Estelle Perriard a remporté un cross interscolaire en Angleterre, qui a marqué ses débuts en course à pied. De retour dans le canton de Vaud, elle prend le départ du Triathlon de Préverenges et, compte tenu de sa performance, rejoint dans l’enchaînement le Rush Team d’Ecublens. Il s’agit de ses vrais débuts dans la discipline, même si la jeune sportive comptait déjà de solides bases.

Membre des cadres nationaux depuis lors, elle a ensuite obtenu un Bachelor en psychologie, tout en s’entraînant avec plusieurs des meilleurs triathlètes de France à Montpellier jusqu’en mars 2020, date du confinement et de son choix de rejoindre Champvent.

 

Une routine de solitaire

 

Depuis son départ de la structure de Montpellier, l’an dernier, Estelle Perriard est coachée par le Britannique Gordon Crawford, par ailleurs entraîneur des élite et M23 de Swiss Triathlon. Le centre d’entraînement de la fédération est basé à Wallisellen, dans le canton de Zurich. Si la Nord-Vaudoise s’y rend ponctuellement pour des semaines de stage en compagnie d’Alissa König notamment, le reste du temps, elle enfile sa tenue de sport seule, depuis son domicile chanvannais.

Elle nage ainsi soit à la piscine d’Yverdon – c’était souvent le cas durant l’hiver – soit avec le Renens Natation. A vélo, elle rejoint parfois quelques filles des environs. Enfin, en course à pied, son frère Romain Sugnaux la rejoint de temps à autre. Reste que son programme est si dense – avec trois séances quotidiennes –, qu’elle se retrouve la plupart du temps seule dans l’effort.

 

Estelle Perriard

 

Parcours de vie: elle est née en 1995 à Genolier, puis a passé sept années dans le canton de Neuchâtel, puis trois en Angleterre, avant de revenir dans la région de Morges durant son enfance. Elle est ensuite partie en Allemagne, puis en France pour ses études et le sport, avant de revenir s’installer à Champvent courant mars 2020.

Palmarès sportif: elle a été couronnée vice-championne de Suisse de duathlon et de triathlon, dans sa catégorie d’âge, dès sa première saison dans la discipline, en 2009. Elle a rejoint l’équipe nationale dans l’enchaînement et cumulé les honneurs sur le plan helvétique. Son résultat international le plus marquant est une 5e place aux Championnats d’Europe M23 2018 en Israël, où elle a aussi obtenu la médaille d’or en relais mixte avec l’équipe de Suisse.

Manuel Gremion