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«Je ne pouvais pas rêver mieux»

19 décembre 2019 | Edition N°2649

Sandrine Mauron est régulièrement titulaire dans le championnat allemand qu’elle a rejoint durant l’été.

Après cinq années à converser en Züridütsch, Sandrine Mauron a dû se départir de quelques tics de langage pour se faire parfaitement comprendre de l’autre côté de la frontière, au bord du Main, où on parle le Hochdeutsch. Arrivée durant l’été en Allemagne, la jeune footballeuse nord-vaudoise découvre l’un des meilleurs championnats féminins du monde, la Bundesliga. «Je me suis tout de suite bien sentie au sein de l’équipe et sur le terrain. Le foot, c’est le plus important, alors je me suis parfaitement adaptée à tout ce qu’il y a autour», assure la milieu de terrain du 1. FFC Francfort, qui profite de la pause hivernale pour passer quelques jours auprès de ses proches.

L’équipe pointe au 6e rang du classement après treize des vingt-deux rencontres au calendrier. C’est bien, mais pas parfait. Sandrine Mauron et ses coéquipières restent sur deux défaites frustrantes, concédées en toute fin de match contre Potsdam (3-2) et le Bayern Munich (4-3). «On a à chaque fois encaissé le but décisif sur un cafouillage», grince-t-elle des dents.

C’est bien là la seule chose qui, en ce moment, courrouce la sportive. À Francfort, elle a trouvé un jardin idéal pour s’épanouir. «On a disputé de nombreux matches amicaux, ce qui m’a aidé à connaître mes coéquipières et à comprendre ce qui m’était demandé», raconte-t-elle. Dans l’enchaînement, elle a été titularisée lors de treize des quinze rencontres officielles, Coupe d’Allemagne comprise, disputées par sa formation. Ce qui n’était de loin pas couru d’avance. «Je ne m’attendais pas à de tels débuts. Je ne pouvais pas rêver mieux, s’enthousiasme celle qui évolue en tant que relayeuse. Je prends énormément de plaisir après une dernière saison plus compliquée pour moi à Zurich, durant laquelle j’ai beaucoup moins joué.»

Un autre monde

La footballeuse de Valeyres-sous-Montagny a rapidement su prendre le rythme d’une Bundesliga autrement plus relevée que la LNA suisse. En Allemagne, elle se retrouve confrontée à un jeu plus engagé, plus rapide aussi. Et elle découvre une ligue nettement plus homogène. À domicile, le 1. FFC Francfort évolue généralement devant un peu plus de mille spectateurs; plus du double pour les meilleures affiches. Tout un nouveau monde pour la Nord-Vaudoise, qui vit sa première expérience à l’étranger. «Chaque match est très disputé, peu importe l’adversaire. Cela se ressent aussi aux entraînements, lors desquelles chaque joueuse évolue à 110%. Les places sont chères.»

Dans un cocon

Logeant dans un quartier agréable à cinq minutes à vélo ou en voiture du stade, ainsi qu’à distance équivalente du site d’entraînement et à une dizaine de minutes du centre-ville en transports publics, Sandrine Mauron se plaît à Francfort. «C’est une ville très internationale, où on trouve le charme de l’ancien et du moderne. Et je ne suis qu’à cinq heures de train du Nord vaudois.»

Comme la majorité de ses coéquipières – même les Allemandes – ne viennent pas de la région, elles ne vivent pas auprès de leur famille. Ce qui fait qu’elles se retrouvent régulièrement à plusieurs en ville lors de leur temps libre. «On est très soudées entre nous.» Une bonne ambiance qui contribue à son bonheur.

Depuis son arrivée à Francfort, Sandrine Mauron ne s’est pour l’heure consacrée qu’au foot. «Ce qui m’a fait du bien pour prendre le rythme, et ça a payé. Me rendre à l’étranger constituait un petit risque, notamment pour l’équipe de Suisse, mais ça s’avère être un excellent choix. Et je suis en pleine forme.» À présent, elle se sent prête à prendre un travail à 50%, qui lui permettrait de mettre un peu de beurre dans les épinards. Ce pourrait être dès janvier, à l’administration d’une agence de voyage. Là encore, une affaire de bonne destination.

 

Pas de quoi mener grand train dans le foot féminin

Si la vie de Sandrine Mauron et de ses coéquipières tourne autour du football, elles ne peuvent pas vraiment affirmer qu’elles vivent du ballon rond. Pas plus à Zurich, où la Nord-Vaudoise a passé cinq ans de sa carrière tout en peaufinant sa formation à côté du sport, qu’à présent en Allemagne.

Dans la Hesse, la jeune femme de 23 ans – elle les fête aujourd’hui même – vit en colocation avec une autre joueuse du club, en l’occurrence une Allemande qui évolue avec la relève. Un logement qui lui a été trouvé, mais dont elle paie le loyer. «La nourriture et l’essence sont également à ma charge, détaille-t-elle. Par contre, une voiture nous est fournie.» Son salaire de footballeuse suffit à peine à couvrir les frais nécessaires pour vivre. «C’est comme ça dans le foot féminin, à quelques exceptions près. Au club, presque toutes les filles ont un travail le matin, ou alors sont aux études. La plupart comptent sur le soutien de leurs parents pour s’en sortir. Honnêtement, c’est une superbe expérience, mais sur le long terme, c’est compliqué.»

Fusion réjouissante avec l’Eintracht

Le 1. FFC Francfort va être intégré à l’Eintracht – le célèbre club masculin de la ville – l’été prochain. Cela devrait faire évoluer les choses dans le bon sens pour les filles, qui espèrent pouvoir signer de nouvelles ententes un peu plus lucratives.

 

L’espoir de disputer l’Euro au «pays du football»

Plus de 77 000 spectateurs ont assisté au match des sélections féminines d’Angleterre et d’Allemagne, en novembre dernier à Wembley. C’est dire si la perspective de disputer l’Euro 2021 au pays du thé est alléchante. «C’est le pays du football, ça fait rêver», lance, les yeux qui brillent, Sandrine Mauron, internationale suisse à douze reprises.

Pour pouvoir vivre le grand tournoi européen, l’équipe nationale devra déjà obtenir son billet dans le courant de l’année prochaine – les qualifications sont bien emmanchées. Quant à la footballeuse nord-vaudoise, elle aura pour mission de convaincre le sélectionneur Nils Nielsen de griffonner son nom dans la liste des élues. «J’espère disputer un maximum de matches avec l’équipe de Suisse courant 2020 pour faire partie du groupe, souligne celle qui compte sur ses bonnes performances en Bundesliga pour être appelée. Au milieu de terrain, il y a pas mal de concurrence avec des joueuses comme Lia Wälti, Sandy Maendly ou Vanessa Bernauer.»

Durant l’automne, Sandrine Mauron a fait partie du groupe à deux reprises: en octobre en Lituanie et en novembre, à Bienne, contre la Roumanie. Des matches de qualification pour l’Euro au cours desquels elle n’est pas entrée en jeu. Depuis l’été, l’entraîneur national est venu voir jouer deux fois l’équipe de Francfort, où elle évolue avec Géraldine Reuteler, attaquante de la Nati. Elle est dans la course.

Manuel Gremion