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«Je réalise mon rêve»
En 2021, Véronique Valdès interprétait déjà Voix humaines en collaboration avec le musicien Titta Carvelli. photo: Christian Meuwly

«Je réalise mon rêve»

31 août 2023

Art Lyrique – La chanteuse lyrique yverdonnoise Véronique Valdès se produira samedi au Victoria Hall à Genève. Elle chantera aux côtés de Sara Mingardo, son idole de jeunesse. Interview.

C’est depuis Rome que Véronique Valdès décroche son téléphone. Une voix joyeuse et pleine, même quand elle ne chante pas. Ce week-end, la mezzo-soprano se produira à Genève, où en 2021 déjà elle interprétait Voix humaines. Cette fois-ci, c’est un concert en duo avec Sara Mingardo qui attend le public.

 

Samedi vous chanterez un concert au Victoria Hall. De quoi s’agit-il exactement?

Ce n’est pas un opéra entier, mais une sélection d’extraits. Ici, on a choisi des airs tirés des plus beaux opéras baroques. C’est un florilège, une sorte de medley des meilleures pièces, vous voyez. Il y a des airs émouvants, mais aussi entraînants, pleins de fureurs, des duos d’amour parfois. Sara interprète parfois la partie d’un homme, celle des castrats, grâce à sa voix plus grave.

 

Sara Mingardo, parlons-en! Vous dites que c’est un rêve de chanter avec elle.

Oui, c’est une icône du chant baroque. Elle a une voix très rare de contralto, très sombre, très suggestive. Je n’ai pas cessé de l’écouter durant mes études. Ma mère avait tous ses disques, je l’écoutais avant même de savoir qui c’était. Elle a été comme une idole de jeunesse, un modèle parmi les chanteuses lyriques. Finalement qu’on puisse collaborer c’est un cadeau de la vie. Je réalise mon rêve malgré les difficultés.

 

Des difficultés?

Oui, comme dans n’importe quelle vie d’artiste. Le métier de chanteur lyrique est un travail permanent, qui demande beaucoup d’efforts sur soi-même, sur les contacts aussi. On est notre propre instrument, on est aussi à la fois son employé, son entraîneur et son manager. C’est beau de voir que les efforts et le travail d’une décennie paient, mais c’est une démarche personnelle, un métier très solitaire.

 

Chanter en duo, est-ce différent?

C’est une autre alchimie, un partage, une communication différente, surtout avec une collègue de renom comme Sara Mingardo qu’on admire beaucoup. ça nous porte et nous pousse à nous améliorer, comme ça on marche ensemble un moment. C’est magnifique, d’ailleurs, j’aime beaucoup. Mais à la fin, on se retrouve toujours face à soi-même et à ses doutes.

 

Et des doutes, en avez-vous eu?

Oui, mais pas concernant ma carrière. Ça, je n’en ai jamais douté, ça a toujours été évident. Ce sont plutôt des doutes concernant la direction. Est-ce que je recherche en moi les bonnes choses? Est-ce que c’est le bon choix de répertoire? Le bon rôle pour moi? Est-ce que je suis honnête, est-ce que je le dis avec mon âme? C’est exigeant. Il y a des rôles, ça fait des années qu’on les fait, mais on trouve toujours de nouvelles choses. Ils évoluent avec nos expériences de vie.

 

En parlant d’expérience de vie, il y en a une de taille qui vous attend: vous êtes enceinte de huit mois. N’est-ce pas difficile de chanter en pleine grossesse?

Je pensais que si, surtout au niveau du souffle, mais en fait ça va! C’était surtout terrible pendant le premier trimestre, avec les nausées. Quand j’ai chanté en mars, à Grandson, là c’était dur. Maintenant le bébé est assez tranquille. Cet été j’ai aussi eu des concerts, mais ça n’a posé aucun problème. Des proches m’ont même dit que c’était un plus cette grossesse, que ça donnait une énergie différente, très centrée. Comme si l’interprétation était différente. Plus profonde peut-être? Il y a des choses qu’on ne comprend pas toujours.

 

Alors, prête pour samedi? 

Je me réjouis beaucoup des duos que je vais faire avec Sara Mingardo. Son nata a lagrimar, par exemple, qui est extrait du Jules César de Haendel, où Sara Mingardo interprète le rôle iconique de Cornélia. Je me réjouis aussi de chanter l’air d’Iphigénie, qui est un rôle que j’aimerais beaucoup interpréter sur scène un jour. Il nous reste à nous ajuster avec l’orchestre: trouver les tempos, les couleurs, la cohésion… C’est là qu’il se passe des miracles, comme le dit Titta Carvelli, notre chef d’orchestre. C’est maintenant que le tableau se met en place. J’ai hâte !

Texte: Amélie Gyger