Sainte-Croix – Auteur, compositeur, interprète et poète, Michel Bühler partagera la scène avec plusieurs artistes, demain et samedi, au Théâtre Benno Besson. Rencontre avec un homme engagé.
Lorsqu’on arrive sur le pas de porte de la maison de Michel Bühler, située au coeur du village de Sainte-Croix, on se sent tout de suite réchauffé par l’ambiance qui y règne, malgré la neige et le froid extérieur. Dans son salon, une affiche d’un film avec Buster Keaton, une bibliothèque avec les aventures de Tintin, des livres de Louis Aragon et de Charles Ferdinand Ramuz, ainsi que des guides de voyage, confèrent à son intérieur un charme à la fois simple et poétique.
Après une longue période d’absence, le Sainte-Crix remontera sur scène avec des jeunes artistes, à l’occasion d’un concert qui fera la part belle à la langue française, demain et samedi, au Théâtre Benno Besson, à Yverdon-les-Bains.
Michel Bühler, pour la jeune génération qui ne vous connaîtrait pas, qui êtes-vous ?
Je suis né à Berne, un peu par hasard, mais la famille du côté de ma mère habitait à Sainte-Croix. Gamin, je n’ai eu aucune attache avec la Suisse allemande, et je le regrette. J’ai grandi dans une famille ouvrière qui travaillait dans les usines Paillard et Thorens.
Comment vous est venu cette passion pour la chanson ?
Un peu par hasard, on adorait fredonner des chansons populaires en famille. C’était un moyen d’expression et de communion incroyable.
Avant d’être chanteur, vous avez suivi une formation d’enseignant à l’Ecole normale de Lausanne. A quel moment avez-vous décidé de monter à Paris ?
A l’époque, j’avais 24 ans et je travaillais comme instituteur aux Tuileries-de-Grandson. Avec mon imprésario, Denis Niklaus, on s’est rendu à Paris, en 1969. C’était le temps des yéyés, on passait un peu pour des ploucs. Grâce au directeur artistique Roger Marouani, j’ai pu réaliser mon premier 45 tours.
Quels sont les chanteurs qui vous ont le plus marqué ?
J’ai toujours aimé les textes de Brassens, de Brel et de Ferrat pour le côté politique. Cependant, ce sont les chansons populaires de Gilles Vigneault (ndlr : l’auteur-compositeur-interprète québécois) qui m’ont le plus ému. Il avait et a toujours l’art de raconter son pays, la vie des trappeurs et des pêcheurs sur la côte nord du Saint-Laurent.
A un moment donné, j’ai eu l’envie de raconter la vie de mes voisins ; celle qui se déroule sur le Balcon du Jura est tout aussi significative que celle qui se passe à Paris ou en Ardèche. On est confrontés aux mêmes problèmes humains qu’ailleurs.
Vous vous apprêtez à remonter sur scène avec la jeune génération. Est-ce un concert d’adieux ?
S’il y a bien une chose que je n’apprécie guère, ce sont ces chanteurs qui font des adieux pendant dix ans. J’ai fait ma part dans la chanson. Je vais continuer à chanter, mais je considère qu’il n’y a rien de plus pathétique qu’un vieux chanteur sur scène. Je n’ai pas envie de susciter la pitié. Cela fait 48 ans que je suis sur scène, j’espère me retirer sur la pointe des pieds.
Comment va se dérouler ce concert ?
C’est Thierry Luisier (ndlr : l’ancien directeur du TBB) qui m’a proposé de mettre sur pied un concert avec de jeunes artistes. Chacun d’entre eux chantera trois chansons, dont l’une de mon répertoire, en duo. Les thèmes de la tendresse et de la révolte seront présents. Dans cette affaire, je suis en quelque sorte le grand-papa (rires).
Qu’est-ce que cette jeune génération retiendra de vous, dans vingt ou trente ans ?
J’espère avoir ouvert la porte aux chanteurs engagés. Garder l’envie de chanter me paraît essentiel. Enfin, j’aurais adoré réinterpréter des chansons populaires, comme le Valaisan Marc Aymon. Mais c’est un peu trop tard pour cela.
Bühler et compagnie, concert au Théâtre Benno Besson, demain et samedi, à 20h. Réservations sur : www.theatrebennobesson.ch ou au 024 423 65 84.
En compagnie de…
La langue de Molière à l’honneur ce week-end
Dans le cadre du Festival Verbophonie, consacré à la langue française, plusieurs artistes accompagneront Michel Bühler.
Soraya Ksontini, Sylvie Bourban, Marc Aymon, Entre 2 caisses et Junior Tschaka rendront hommage à cet artisan de la chanson francophone en interprétant une de ses chansons, ainsi que deux autres de leur propre répertoire.