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Kimmitri, une belle aventure  qui tourne au crève-cœur
Nick Vallone, suppléant de la directrice, salu le professionnalisme de ses colllègues. 

Kimmitri, une belle aventure qui tourne au crève-cœur

25 novembre 2021

Passé le choc de l’annonce de la fermeture, les bonnes volontés s’activent pour la garderie-nursery.

L’annonce de la fermeture de la garderie-nursery yverdonnoise Kimmitri, programmée vendredi, a provoqué une véritable onde de choc. Les internautes s’emballent sur les réseaux sociaux. Tout simplement parce que, pour les parents, trouver une place d’accueil de jour en urgence vire facilement au cauchemar.

Avec une vingtaine d’enfants et seize collaborateurs, cette structure privée, exploitée en raison individuelle, semble, a priori, peu importante en regard des plus de mille enfants accueillis dans les garderies publiques. Mais dans le contexte actuel, symbolisé par des listes d’attente, chaque place compte.

Dès lors, les parents, mis devant le fait accompli, ont dû, avant même d’avoir eu le temps de se retourner, surmonter l’onde de choc. Pour résumer, tous s’activent depuis lundi pour trouver une ou des places pour leurs enfants, sollicitant les autres garderies, privées et publiques, les mamans de jour et bien entendu les proches.

Pour certains, des solutions pourraient se dessiner, mais pas forcément à court terme. D’où l’importance que la Ville, par son Service jeunesse et cohésion sociale (Jecos), apporte son soutien.

Du côté de la fondatrice, Marianne Cochard, le sentiment d’avoir échoué, en particulier dans les ultimes tentatives de sauvetage, prédomine. Et, en même temps, elle se sent responsable d’un gâchis, au terme d’une aventure de plus d’un quart de siècle. «C’est une question de finances. Pour un privé, ce n’est plus possible. On a fait le maximum. Je suis essoufflée et triste», confie-t-elle.

N’a-t-elle pas trop attendu pour appeler à l’aide? «On a déjà demandé de l’aide en août à la Commune et on a encore rencontré des responsables récemment. J’espérais que la Ville puisse nous donner un coup de pouce. On a aussi essayé de trouver d’autres moyens, via des partenariats. En vain. La semaine passée, j’espérais encore qu’une aide puisse se concrétiser», déplore Marianne Cochard. Et d’ajouter: «Je ne suis pas seule dans cette situation. Sans apport financier, on ne peut pas exister.»

Il faut dire que par rapport aux premières années d’exploitation, les normes légales imposées aux garderies, en termes de locaux, d’équipements et d’encadrement, ont été renforcées. Et cela a un coût.

Les locaux de Kimmitri ne répondaient plus aux exigences formulées par l’Office cantonal de l’accueil de jour des enfants (OAJE). La propriétaire de la garderie avait résilié le bail pour août prochain et elle s’était lancée à la recherche de nouveaux locaux. Des perspectives s’étaient ouvertes, mais loin du centre-ville. Or cette position géographique était particulièrement appréciée par certains parents.

La pandémie a également contribué à détériorer la situation. «Après le Covid, on a eu moins d’enfants, car les parents ont pu pratiquer le télétravail, confirme la fondatrice de Kimmitri. Je suis une passionnée. J’aime les enfants. Je me suis battue.» Et de rappeler: «On a aussi vécu des périodes magnifiques. On a commencé à accueillir les enfants de parents qui étaient passés, enfants, par Kimmitri. On a fonctionné comme une entreprise autonome, plutôt familiale et avec du cœur.»

Malgré le choc subi en début de semaine, le personnel de la garderie a adopté un comportement très professionnel, souligne le médiateur Jacques Macherel.

Ce que confirme Nick Vallone, éducateur et suppléant de la directrice, lui-même père de cinq enfants: «C’est dur pour les enfants, les parents et le personnel. On ne peut pas mettre de côté l’aspect affectif. Les enfants ont besoin d’être cocolés et consolés. On passe beaucoup de temps avec eux et il y a forcément des liens qui se créent.»

C’est dire qu’indépendamment du choc provoqué par la perte de l’emploi, les collaborateurs de Kimmitri, sans salaire depuis deux mois, placent l’intérêt de leurs petits protégés au-dessus de tout. Pour leur venir en aide, des mamans solidaires ont ouvert une cagnotte sur Leetchi.com.

 

Placement dans les structures publiques privilégié

 

Informé de la situation par les responsables de la garderie début novembre, Pierre-André Junod, chef du Service jeunesse et cohésion sociale (Jecos), attendait l’envoi de certains documents – listes d’enfants, éléments financiers – lorsque la direction de Kimmitri a abruptement annoncé, aux parents et aux collaborateurs, la cessation de ses activités.
Alertés par des parents lundi matin, les responsables du Jecos se sont activés pour rencontrer ceux de la garderie, ce qui a été fait le lendemain. Jacques Macherel, le médiateur désigné par Marianne Cochard, a confirmé hier la tenue de cette réunion et communiqué aux parents les pistes évoquées: accueil par d’autres crèches, mamans de jour, initiatives privées d’échanges entre parents et organisation d’espaces d’accueil, avec l’autorisation de l’OAJE. Deux déléguées de l’Office cantonal ont aussi rencontré les responsables de la garderie yverdonnoise.

Pierre-André Junod a transmis des propositions à la Municipalité qui, selon nos sources, a évoqué le sujet dans sa séance d’hier. Il a relevé que l’accueil dans les structures officielles était privilégié, au besoin avec une dérogation qui pourrait être octroyée par l’OAJE (qui est à la fois l’autorité cantonale qui délivre les autorisations d’exploiter et assure la surveillance des structures). «Nous ne pouvons pas garantir que nous trouverons une solution pour tous les parents, mais nous ferons tout notre possible. Pour le moment, nous privilégions la recherche dans les structures publiques. On fera le point en fin de semaine», assure-t-il. La capacité d’accueil d’une garderie est définie par des normes très strictes. Mais dans une situation d’urgence, on peut imaginer que, moyennant une dérogation de l’OAJE, une garderie puisse accueillir ci et là un ou deux enfants de plus.

De la vingtaine d’enfants accueillis par Kimmitri, la majorité sont domiciliés en ville d’Yverdon-les-Bains. D’autres proviennent de l’extérieur, et même du canton de Fribourg. Pour cette raison, le Jecos a sollicité le soutien des réseaux voisins, notamment celui de la région de Grandson.

Les parents continuent de leur côté à chercher des solutions, y compris dans les structures privées. Mais dans tous les cas, ils devront s’organiser pour continuer à concilier activité professionnelle et garde des enfants, ce qui n’est généralement pas très facile.

 

Le Parti socialiste pousse à la recherche de solutions

 

Dans un communiqué diffusé mardi, la section yverdonnoise du PS enjoint la Ville à réagir, et vite: «Laisser ainsi autant de familles sans solution de garde n’est pas acceptable, c’est pourquoi le Parti socialiste demande à la Municipalité d’intervenir dans les plus brefs délais pour trouver une solution urgente aux familles concernées. Certes, Kimmitri ne fait pas partie du RéAjy (ndlr: Réseau d’accueil de jour d’Yverdon), mais elle fait tout de même partie du réseau d’accueil proposé aux familles de notre région.» Une intervention de la section est prévue lors de la prochaine séance du Conseil communal, jeudi prochain.

Isidore Raposo