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La Suisse se pare d’un tapis de fleurs
Kurt Peterhans sème ici 400 mètres de bande fleurie indigène, accompagnée de haies, au bord de sa parcelle à Fontaines-sur-Grandson. © Michel Duperrex

La Suisse se pare d’un tapis de fleurs

20 avril 2021

Cette année, les abeilles trouveront un refuge et de la nourriture jusqu’à l’automne chez 400 agriculteurs suisses. L’action La Suisse fleurit tend à protéger les pollinisateurs grâce à des fleurs sauvages. Un projet qui tient à coeur à Kurt Peterhans, agriculteur de Fontaines-sur-Grandson.

Les oiseaux ont chanté l’arrivée du printemps, annonçant dans la foulée l’éclosion de belles couleurs dans les champs suisses. Si les terres helvètes sont souvent occupées par des récoltes en monoculture, cette année les paysages seront davantage colorés, puisque 400 agriculteurs suisses s’engagent à planter des multitudes de fleurs sauvages. C’est le cas de Kurt Peterhans, qui a récemment reçu ses semences dans le cadre de l’action La Suisse fleurit, mise en place par l’Union Suisse des Paysans (USP).

En Suisse, les abeilles et autres insectes pollinisent les plantes durant le printemps jusqu’au début de l’été. Mais une fois les floraisons terminées, ces petits volatiles peinent à trouver de la nourriture. L’USP a réagi à cette problématique menaçant les insectes, qui sont eux-mêmes vitaux pour l’homme. La faîtière distribue donc gratuitement à tous les agriculteurs inscrits des sacs de semences contenant différentes variétés de plantes. L’ensemble garantira des fleurs jusqu’à la fin de l’été, grâce à des périodes de croissance échelonnées.

«Là nous allons planter des bandes fleuries sur 400 mètres, ce qui fera un total de 1 200 mètres carrés de prairie sauvage», montre Kurt Peterhans en faisant le tour de son domaine à Fontaines-sur-Grandson. D’ici deux à trois semaines, les premières fleurs pointeront le bout de leur tige, après avoir été semées à la main par Kurt Peterhans et son équipe.

Un coup de pouce à la nature et à la faune que l’USP a fortement encouragé. «Nous avons reçu les graines gratuitement par l’USP et en échange de la légère perte financière nous recevrons une petite rémunération, car cela deviendra de la surface écologique. C’est très important d’avoir une bonne diversité», explique, passionné, l’ex-syndic de la commune.

Mais ce coup de pouce, la nature le rend bien aussi. Et ça, Kurt Peterhans l’a compris il y a déjà bien longtemps. «Les fleurs nous amènent des auxiliaires, comme les coccinelles qui mangent les pucerons par exemple. On a déjà planté pas mal de haies, de jachères florales et d’arbres à hautes tiges», explique-t-il en désignant les jeunes noyers qui poussent au bord des cultures, sur des terres moins riches. «Dans les jachères, on y voit souvent le passage de chevreuils, de lièvres et d’insectes. On a aussi installé des tas de pierres pour les reptiles.»

En regardant le domaine de Kurt Peterhans de plus près, on y repère divers petits espaces sauvages, accueillant tout un écosystème. Et ces espaces sont en partie imposés en Suisse, qui demande un minimum de 7% de surface écologique sur les terres agricoles. En réalité, les surfaces écologiques représentent plutôt 19% des surfaces totales. «Nous faisons déjà pas mal de récoltes sans fongicides. Cette année, nous testons le blé dur et le seigle sans herbicides, en essayant notamment la méthode du sarclage. Si c’est concluant, nous développerons de plus en plus cette façon de faire», explique l’agriculteur, soucieux de la biodiversité, tout comme ses trois filles, elles aussi agricultrices. «Je suis encore de la vieille école! C’est surtout ma fille qui fait des études dans l’agriculture qui me pousse à le faire (rires). Cela dit, je récupère déjà 700 tonnes de purin des autres fermes, ainsi que les déchets végétaux des habitants pour en faire du compost. Notre domaine est également à 90% végan, puisque nous avons majoritairement des grandes cultures et seulement 10% avec un petit troupeau de vaches allaitantes et des poules.»

Une belle initiative que l’on pourra prochainement admirer chez Kurt Peterhans ainsi que chez les 400 autres familles qui participent à cette éclosion collective.

 

Un retour en arrière

 

Si ce projet vient illuminer les prairies suisses, Kurt Peterhans s’assombrit à l’idée des deux initiatives phytosanitaires votées le 13 juin prochain. Selon lui, l’idée est bien pensée, mais pas assez pour prendre en compte les réelles conséquences sur les agriculteurs.

«Je pense que ces initiatives sont surtout faites pour mettre un coup de pression sur l’agriculture. Et c’est très bien, il faut un changement. Ici, nous avons déjà diminué de 50% l’utilisation de glyphosate en trois ans. Nous utilisons moins de pesticides, d’herbicides et avons investi dans de nouvelles machines.» Mais le problème pour la famille Peterhans se définirait par un changement total du système sur le domaine, qui a pourtant évolué en fonction du mouvement vert. «Nous avons un domaine principalement végan (90%). Pour répondre à l’initiative, nous devrions revenir en arrière avec de la production animale, car elle seule permet de produire du bio à 100%, quand les terres sont trop appauvries.» S’il ne se dit pas inquiet, Kurt Peterhans, bientôt à la retraite, pense surtout à ses filles, qui ont suivi le même chemin que leur papa!

 

Infos pratiques

Vous aussi, vous souhaitez planter des fleurs sauvages?

L’USP encourage également les particuliers à fleurir leur propriété, aussi petite soit-elle! (un balcon peut déjà en accueillir). Pour ce faire, l’USP envoie gratuitement des graines à votre domicile. Un concours clôturera le projet pour les participants.

A commander directement sur le site:
www.die-schweiz-blueht.ch
(dans la limite du stock disponible).

Léa Perrin