Logo
«Laissons les jeunes exprimer la mode, la provocation, l’originalité!»
© Michel Duperrex

«Laissons les jeunes exprimer la mode, la provocation, l’originalité!»

24 octobre 2020

La rédaction connaît mon goût pour la mode et me propose de m’intéresser cette semaine à une polémique qui gonfle dans le canton de Genève et pollue gentiment la tranquillité vaudoise: la tenue vestimentaire à l’école, avec le fameux t-shirt contesté et dit «de la honte».

Le nombril à l’air, le string provocateur, le décolleté accrocheur, le caleçon visible se retrouvent au pilori de la morale. On parle bien ici de l’habillement des élèves et non de l’institutrice à petites graines, ou du régent, fan de la chemise à carreaux. Toute époque a eu ses modes ou ses provocations, ce qui pourrait engendrer, à l’avenir, la tenue uniforme des instituts privés et des collèges bourgeois, à l’anglaise. Loin de moi l’idée de défendre la tenue sexy des minettes et le falzar qui rafle sous les fesses des petits mecs, mais nommer un psy afin de régler l’affaire ou introduire une nouvelle branche vestimentaire pour les enseignants en pleine déprime pédagogique risque de prolonger des études qui deviennent déjà presqu’aussi longues que celles des spécialiste du CHUV!

Un clin d’œil rigolo explique certains de mes fantasmes, puisque, lors de ma première année scolaire, on nous affublait, en hiver, sous le pantalon, de bas en laine accrochés avec une sorte de jarretelle à gros élastique, et, par-dessus, la blouse indispensable! Après, le jean a conquis notre rêve américain, puis vinrent le béret du Che et la veste kaki dénonçant la guerre du Vietnam. La minijupe sévissait déjà au collège, suivie d’une légère baisse à l’école normale, avec les robes frangées du début de la période poterie, hippie et tomme de chèvre. Mais les instits ont aussi eu leur période mode, puisque la cravate était inamovible aux yeux de l’inspecteur, et que, parfois, pendant nos études, celle du secrétaire sympa au Château d’Yverdon sauvait la mise des imprudents qui osaient la contester.

Vint ensuite le col roulé blanc ou noir, à l’image des pasteurs ou des éducateurs qui ajoutaient le collier de barbe fine et la pipe droite, pendant les colloques. Durant mon extraordinaire aventure enseignante, les garçons étaient assez classiques, mais les filles exprimaient déjà leur liberté de plaire avec plusieurs tenues originales, dont le fameux short moulant. Après, débarquèrent le training et le legging, donnant des allures de mamies aux gymnastes du matin, mais qui rassurèrent les «petits chefs» du terreau scolaire.

Aujourd’hui, laissons les jeunes exprimer la mode, la provocation, l’originalité sans trop se soucier de ces mouvements moralisto-belliqueux, nous venant d’Amérique, selon le célèbre écrivain polémiste français Pascal Bruckner, dans son nouveau livre: «Un coupable presque parfait»!

Et choisissons entre deux options: celle du politicien conciliant, affirmant que la minijupe doit être comme un bon discours, «assez courte pour conserver l’attention, mais suffisamment longue pour contenir l’essentiel». Ou celle du libertin: «Avec ma femme, on part en vacances dans un camp de nudistes, ainsi elle ne se plaint pas de n’avoir plus rien à se mettre!»

Denis Meylan