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L’art du gâteau décoré
Sophie Yanes est devenue en 20 ans une calure dans la pâtisserie et plus spécifiquement la décoration de gâteaux.

L’art du gâteau décoré

4 février 2025 | Textes: Jérôme Christen | Photos: Michel Duperrex
Edition N°3884

La commune d’Orbe s’est enrichie en décembre dernier d’une référence en matière de «gâteaux décorés», art culinaire mieux connu sous le terme de «cake design». Sophie Yanes a quitté il y a bientôt 20 ans son poste d’assistance de direction dans une grosse entreprise d’horlogerie à Paris pour se former à la pâtisserie, à ses aspects visuels ainsi qu’en cuisine.

«Mon travail consiste à réaliser des gâteaux d’un jusqu’à douze étages et à les décorer pour les rendre les plus beaux possible pour les anniversaires. Et les plus glamours pour les mariages qui constituent la partie la plus importante de mon activité», explique Sophie Yanes qui a installé son atelier au rez-de-chaussée d’un bâtiment qui porte le No 9 à la rue de la Tournelle.

De l’horlogerie au gâteau

D’origine grecque et arménienne, née à Instanbul, cette passionnée n’était pas prédestinée à faire de cet art culinaire son métier et à se retrouver en charge de l’enseignement de la pâtisserie à l’École-club Migros de Lausanne.  Après avoir vécu 30 ans à Paris, un cursus universitaire en gestion et comptabilité, et une carrière bien huilée comme assistante de direction entre Paris et Hong Kong pour une entreprise active dans l’horlogerie, elle a décidé de changer d’orientation professionnelle « pour voir grandir son fils – aujourd’hui âgé de 18 ans – et profiter de ces moments éphémères qui passent si vite ».

Formation à Paris et Londres

Pour réussir cette reconversion professionnelle, elle a suivi successivement une formation à Paris, puis à Londres pendant deux ans par tranches de cinq semaines, faisant des allers-retours depuis la Neuveville où elle a rejoint son mari en 2009, engagé comme médecin à l’Hôpital de Neuchâtel. En 2023, Sophie Yanes a obtenu son brevet fédéral de formatrice d’adultes.

Un métier à part entière

«On me dit souvent, c’est sympa, ton hobby… Mais c’est un métier à part entière! Je ne suis pas une gentille dame qui fait un gâteau sur un coin de table et le vend entre 300 et 500 francs…  Je voulais être à la tête de mon entreprise et pouvoir aménager mes heures, explique cette passionnée des arts de la table en général : « La cuisine et la pâtisserie, j’ai bien sûr grandi avec et c’est ma passion. Dans ma famille, les arts de la table font partie de notre culture, comme dans celle de mon mari, originaire du Moyen-Orient. Mais de là à en faire ma profession, à 45 ans, c’était un sacré défi…»

Passionnée de cuisine

Au fil du temps, en suivant des formations, elle a appris la cuisine grecque, libanaise, palestinienne, arménienne, turque, orientale, espagnole et aussi italienne par amour pour ce pays, mais s’est toujours concentrée professionnellement sur la pâtisserie et un service traiteur restreint à un apéritif buffet sucré/salé.

Un espace mieux adapté à Orbe

«J’ai bien sûr connu des échecs. Il faut se relever et continuer. Il n’est jamais trop tard pour aller jusqu’à bout de ses idées. Ce que j’aime par-dessus tout, c’est qu’à chaque commande, c’est un défi, je veux me prouver que je peux faire toujours mieux. »  Sophie Yanes exercait jusqu’ici son art chez elle, récemment à Lutry. Mais en raison du développement de son activité, il devenait indispensable de trouver un espace mieux adapté dans lequel elle organise également des ateliers privés. Et c’est à Orbe qu’elle a trouvé son bonheur.


Une invention française

Cet art du gâteau décoré (ou cake design) ne date pas d’hier, puisqu’il est apparu au XVIIe siècle grâce au pâtissier français Antonin Carême, puis s’est développé au XIXe avec l’arrivée du four à thermostat qui a grandement facilité la confection de gâteaux. La discipline a ensuite essaimé aux Etats-Unis et connu un développement fulgurant avec les frères Wilton dans l’Illinois qui ont remporté un formidable succès que ce soit auprès de professionnels ou de particuliers.


Comment ça se passe?

«Les futurs mariés me contactent via mon site internet ou Instagram. Ils m’écrivent pour me dire ce qu’ils veulent pour quelle date et le nombre de personnes. Dans un premier temps, je leur réponds en leur donnant une fourchette de prix et ensuite, ils viennent à Orbe. Certains arrivent avec un modèle bien défini, d’autres sans la moindre idée, mais c’est rare. Il y a dix ans, il fallait tout dessiner de A à Z. Aujourd’hui avec Pinterest et Instagram, ils ont souvent une idée assez claire. J’ai besoin de savoir comment sont la robe et le bouquet de la mariée, ce qu’elle porte comme bijoux et de comprendre si elle est plutôt Barbie rose, diamants-rubans, bling-bling ou plutôt neutre épuré. Le gâteau, c’est très important, c’est le point final qui doit représenter le couple et le ton du mariage. »

Sur cette base, Sophie Yanes leur fait une proposition sur croquis, puis elle établit un devis détaillé avec la description complète du service afin d’éviter la moindre erreur. Ses formules s’adaptent à différents budgets. Elle insiste sur le fait qu’elle ne demande jamais de paiement à l’avance, car le plus important, c’est que le couple soit content et satisfait de son gâteau.


La dimension et les produits

Pour qu’ils puissent se représenter l’idée de la dimension du gâteau, Sophie Yanes utilise une maquette en sagex et polystyrène. A titre d’exemple, cinq étages, c’est pour 250 personnes. Mais il est possible d’en faire une partie factice pour l’adapter au nombre de personnes et conserver le côté spectaculaire du gros gâteau. Généralement, les mariés ont un grand gâteau pour leur table et les autres invités ont le même sous la forme d’une cupping cake (petit gâteau ou gâtelet).

«Je n’utilise ni produits congelés, ni déjà transformés ou déjà cuits, je n’achète jamais des génoises dans les commerces en gros, je n’utilise pas de poudres à émulsionner avec de l’eau du robinet pour faire des crèmes. Le gâteau est entièrement fait maison avec des œufs, de la farine, des citrons, du beurre. Je n’ai pas recours à des margarines ou des beurres de pâtisserie qui contiennent beaucoup d’eau», souligne-t-elle.


Le mariage évolue

«Je fais des gâteaux pour des mariages de 15 à 300 invités», explique Sophie Yanes. Selon son expérience, en Suisse, le nombre de personnes varie en moyenne entre 60 et 80. Les mariages de 200 ou 300 personnes, ce sont essentiellement  pour des mariés d’Afrique ou du Moyen-Orient. Ou alors des mariages mixtes. Avant la pandémie Covid, les mariages avaient lieu quasi exclusivement entre avril et septembre. Maintenant c’est toute l’année, mais à la saison froide, c’est surtout des seconds mariages.