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Le délai d’assainissement devra être respecté
La justice vaudoise a donné raison à l’Etat de Vaud dans un conflit qui l’opposait à une entreprise industrielle vallorbière qui devra réaliser des travaux d’assainissement de bruit dans le délai imparti.

Le délai d’assainissement devra être respecté

10 janvier 2025 | Textes et photo: I. Ro.
Edition N°3867

Une entreprise vallorbière contestait le délai d’assainissement du bruit imposé par la Direction générale de l’environnement (DGE). Elle a été déboutée par la justice cantonale.

L’heure c’est l’heure et un délai déterminé par une autorité doit être respecté s’il y a une urgence. Dans un arrêt rendu début décembre, la Cour de droit administratif et public (CDAP) du Canton de Vaud a débouté une entreprise industrielle qui ne contestait pas les mesures d’assainissement du bruit exigées, mais simplement le délai imposé par la Direction générale de l’environnement (DGE) pour une mise en conformité. L’affaire est intéressante à plusieurs titres, et elle montre que la cohabitation, même séparée par une rivière telle l’Orbe, n’est pas toujours évidente.

Site stratégique

Une entreprise industrielle occupe une parcelle dont elle est propriétaire dans la zone des Plans Praz, au sud de la localité. Le site est considéré comme stratégique dans le cadre du Pôle 18 et la parcelle en question s’étend de la route de desserte jusqu’au-dessus de la rive droite de la rivière. De l’autre côté du cours d’eau sont situés, à des distances variant de 110 à 140 mètres, trois bâtiments d’habitation, dont une propriété par étage (PPE). Ces immeubles d’habitation sont colloqués en zone de verdure selon le Plan général d’affectation (PGA) approuvé il y a près d’un quart de siècle par le Conseil d’Etat.

Le bruit des ventilateurs

Dans le courant de l’année 2020, la société industrielle a installé un aérorefroidisseur au nord de l’un de ses bâtiments donnant sur la lisière forestière bordant la rivière, le long d’un mur antibruit. La société industrielle a, à l’époque, fait effectuer une analyse d’impact acoustique des installations de ventilation en cause. Selon cette étude, les valeurs de planification à respecter étaient de 60 dB (décibels) de jour et 50 dB de nuit. Le rapport d’analyse précisait qu’il y avait «un potentiel de gêne sonore, induite par l’installation technique» et que la situation devait être résolue «pour éviter tout futur contentieux ». Le rapport relevait également que le mur antibruit, soit un écran acoustique à base de laine minérale, n’était pas efficient.

Problème identifié en 2021

Réagissant à une plainte, la DGE s’est intéressée au problème en novembre 2021, procédant au contrôle des niveaux sonores des installations de ventilation. La DGE relevait que les voisins les plus proches étaient dans une zone à laquelle un degré de sensibilité au bruit de II est attribué.

Les mesures effectuées depuis le bâtiment d’habitation le plus proche ont relevé 64,6 dB pour la période de nuit, autrement dit un fort dépassement  de la valeur limite d’immission (50 dB). La DGE a exigé un plan d’assainissement des installations de ventilation avec un descriptif des travaux envisagés, leur efficacité en termes de réduction des nuisances sonores et le délai de réalisation.

Procédure de rappel

Un rapport d’assainissement a été fourni au printemps 2022, qui évoquait, entre autres, les diverses mesures envisagées. Après un premier délai, la DGE a demandé un plan d’assainissement avec un délai à janvier 2023, l’entreprise s’engageant à réaliser les travaux rapidement, durant la période estivale. La procédure a pris du temps et à la suite de nouvelles plaintes, la DGE a relancé la société industrielle en mai 2024, afin de connaître l’état d’avancement des travaux. Il a été répondu à l’administration que l’ensemble des installations serait opérationnel à fin octobre. Trop tard aux yeux de la DGE qui a imparti un délai à mi-juillet 2024.

Décision maintenue

C’est contre cette mise en demeure que la société a recouru à la Cour cantonale, demandant son annulation parce qu’il ne lui était pas possible de respecter un tel délai. Quand bien même les travaux ont été réalisés, la DGE a maintenu sa décision parce qu’à fin octobre elle n’avait pas reçu un rapport avec les mesures de contrôle démontrant la conformité à la suite des opérations d’assainissement.


Le respect des plus fragiles

Dans son raisonnement qui s’appuie sur la législation en matière de bruit, la CDAP rappelle qu’il faut tenir compte de l’effet des immissions sur des catégories de personnes particulièrement sensibles, telles que les enfants, les malades, les personnes âgées et les femmes enceintes. Les valeurs limites s’appliquant au bruit et aux vibrations sont fixées de manière que, selon l’état de la science et de l’expérience, les immissions inférieures à ces valeurs ne gênent pas de manière sensible la population dans son bien-être.

Pesée d’intérêts

La loi prévoit que les installations qui ne respectent pas les limites doivent être assainies. Dans la pratique, il appartient à l’autorité compétente de fixer les délais pour l’assainissement et les mesures d’isolation acoustique en fonction de l’urgence de chaque cas. La notion d’urgence dépend de l’importance du dépassement des valeurs limites, du nombre de personnes touchées et du rapport coût-utilité.

Dans ce contexte, quand bien même le problème semble avoir été réglé, la Cour est d’avis que le délai fixé par la DGE le 5 juin 2024 avec une échéance le 15 juillet n’est pas critiquable, notamment parce qu’en raison de l’importance du dépassement la réalisation des conditions d’urgence peut être admise.

Délai proportionné

«Force est de constater qu’il y a une urgence importante à assainir les installations de la recourante, ce dont elle est d’ailleurs consciente depuis plus de deux ans. Le délai litigieux de cinq semaines et demie fixé par l’autorité intimée est conforme à la loi et proportionné au vu des circonstances précitées.» La CDAP a donc confirmé la décision de la DGE et rejeté le recours, dans la mesure où il avait encore un objet. En effet, seul un rapport de conformité était encore attendu lorsque l’affaire a été traitée.