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«Le Duc» en or

15 septembre 2015

Voile – Grandson a vécu une époustouflante finale de la Star Sailors League, avec la victoire d’un local.

Le local Patrick Ducommun et l’Américain George Szabo ont fêté le titre avec enthousiasme! DR

Le local Patrick Ducommun et l’Américain George Szabo ont fêté le titre avec enthousiasme!

De mémoire de Grandsonnois, il n’y a jamais eu autant de monde sur les quais. En effet, samedi, le public s’est déplacé en masse pour suivre, en direct sur grand écran, les dernières manches du Grand Chelem SSL, disputées par une petite bise hésitante. Les dix meilleurs équipages des sept manches courues durant la semaine prenaient part au quart de finale. C’est sans trop de surprise que les meilleurs sur le plan mondial se sont retrouvés sur la ligne de départ. Un Suisse, de surcroît régional, Patrick Ducommun, équipier de George Szabo (champion du monde 2009), figurait parmi ceux-ci.

Moments d’action sur le plan d’eau. DR

Moments d’action sur le plan d’eau.

Sept bateaux se sont élancés en demi-finale et seuls quatre d’entre eux ont accédé à la finale, dont l’équipage américano-suisse Szabo/ Ducommun, qualifié de peu. Quatrième et dernier à la première bouée au vent, il a pu recoller au passage de la marque sous le vent. L’alternance de nuages et de soleil a créé des zones plus ou moins ventées, qui semblaient favoriser le côté Jura. Cette nuance n’a pas échappé au «Duc», le navigateur du club local, et c’est donc le nord qu’a choisi l’équipage, alors que les trois autres concurrents ont privilégié le centre du parcours, voire même le sud. Cette judicieuse option a provoqué un rebondissement spectaculaire: la paire américano-suisse a passé de la quatrième place à la première et a viré, de justesse, en tête la dernière bouée au vent. Leur ultime descente est un coup de maître qui leur a permis de franchir la ligne d’arrivée avec plus de 150 mètres d’avance, sous les ovations des spectateurs. La deuxième place est disputée jusqu’à la marque sous le vent, où les Allemands Stanjek/ Kleen, ayant réussi à enrouler cette dernière à l’intérieur, se sont positionnés stratégiquement devant leurs adversaires américains Mendelblatt/Fatih. Les Croates Gaspic/ Revkin terminent au pied du podium.

Le duo Szabo/Ducommun a non seulement remporté la première place de ce Grand Chelem, mais aussi le titre de champion de Suisse de Star 2015.

Dimanche, «Le Duc» peinait à réaliser: «Ce matin, encore, je crois toujours rêver. George Szabo est un grand nom de la voile. D’abord, j’ai le privilège d’être son équipier et, ensuite, nous gagnons devant des champions de multiples fois titrés sur le plan mondial. C’est fou, c’est phénoménal!»

Moments d’action sur le plan d’eau. DR

Moments d’action sur le plan d’eau.

«L’idée de génie de la SSL d’inviter des régatiers d’autres séries que celle des Star dope le niveau. La mixité des champions est appréciée des anciens de la classe. La voile est le seul sport qui permet ce mélange, soulignait George Szabo. Il y a une synergie d’entraide entre tous ces champions qui initient les nouveaux venus à leurs réglages. C’est aussi ce côté de la voile que j’aime et c’est aussi pour cela que j’ai demandé à un local d’être mon équipier.» L’Allemand Frithjof Kleen, deuxième, ajoutait: «L’endroit est juste magnifique. J’avoue n’avoir jamais rencontré un tel professionnalisme tant à terre que sur l’eau. La SSL a fait un boulot de géant.»

Emu aux larmes, Claude Cassard, président du Cercle de la voile de Grandson, ne tarissait pas d’éloges: «Ma reconnaissance va aux dirigeants de la SSL qui ont cru en nous, en nous associant à leur compétition. Aujourd’hui, l’image de la voile, du club, mais aussi celle de Grandson, grâce à internet, rayonnent dans le monde entier. Nous avons côtoyé, durant cette folle semaine, l’élite mondiale de la voile. Ces athlètes se sont montrés reconnaissants, respectueux et véhiculent une image positive du sport. Je suis doublement fier. D’une part d’avoir oeuvré à ce succès et, deuxièmement, de pouvoir dire: j’y étais!»

Au-delà de la compétition, il y a les hommes et leurs croyances, ce qu’illustre cette anecdote: l’Américain Mark Reynolds, fabricant de voiles, remporte la médaille d’or en Star, aux JO de Barcelone, en 1992. Un de ses concurrents, le Brésilien Torban Grael, s’approche de lui, après la compétition, pour acquérir sa voile. Son père ne cesse de lui répéter que ce n’est pas le bateau qui fait la performance, mais sa voile. A Atlanta, en 1996, le Brésilien décroche, à son tour, la médaille d’or avec la voile achetée à Reynolds… Et c’est cette même voile que Torban Grael a fait jauger lors du Grand Chelem de Grandson comme voile de réserve… Alors, superstitieux?

 

Radio ponton avec les champions

Mark Reynolds (USA): double champion olympique en Star (1992 et 2000), argent en 1988 (photo avec son équipier Hal Haener).

Mark Reynolds et Hal Haener. DR«L’invitation faite à des régatiers venant d’autres séries fait souffler un vent nouveau sur le Star. Je lui prédis un avenir serein, et ceci grâce à la SSL. Bien que je sois de multiples fois titré, je vois arriver les jeunes avec plaisir. Ils ont les écoutes entre les dents et sont sans complexe, mais très professionnels et respectueux sur le plan d’eau. La relève s’annonce un excellent millésime et je m’en réjouis.»

 

Brian Fatih (USA).

Brian Fatih. DR«J’ai déjà régaté plusieurs fois en Suisse, mais jamais sur le lac de Neuchâtel. Vous habitez une magnifique région. L’organisation est fantastique, les gens sont agréables, amicaux et non intrusifs. Cela fait une semaine que je suis sur le site et j’ai pu me familiariser avec les régimes de vents. Ils ne nous ont pas posé de problèmes et nous avons rapidement appris à lire le plan d’eau. Nos adversaires sont d’un très haut niveau. Ils nous obligent à une concentration absolue, à manoeuvrer rapidement et proprement.»

 

Robert Stanjek (GER): champion du monde en titre

Robert Stanjek. DR«Quelle sensation extraordinaire de se mesurer à autant de champions réunis! Le Star a toujours été un grand réservoir de navigateurs. Ce n’est pas un hasard si plusieurs d’entre eux sont engagés dans de prestigieuses courses, telle la Coupe de l’America. La présence des meilleurs sur le plan mondial, à Grandson, fait énormément de bien à la série. La SSL redynamise la classe qui avait beaucoup perdu d’attrait et offre une audience spectaculaire. »

 

Xavier Rohart (FRA): médaillé de bronze olympique en 2004, champion d’Europe 2015 avec le régional Sébastien Guidoux.

Xavier Rohart. DR«Je connais un peu la région, mais ne peux pas dire que je sois avantagé par rapport aux autres, n’ayant fait que quelques sorties sur l’eau. Je suis un régatier de mer et la lecture des vents sur un lac est différente. La proximité de berges créée des canalisations, déviations, des zones tampons d’airs qu’il n’est pas évident de lire. Cela compte énormément dans la tactique et les résultats. Le Star est un excellent bateau où les différents gabarits et les différentes nationalités peuvent s’exprimer. Cela reste un quillard avec une stabilité naturelle sur lequel on peut rapidement s’exprimer.»

Christiane Baudraz