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Le lynx continue à faire débat dans la région

25 juillet 2014

Le député des Charbonnières Dominique Bonny a déposé une motion demandant de réguler rapidement la population de ce grand prédateur dans le canton.

Le discret félin, dont voici un spécimen photographié à Juraparc, continue à faire des remous.

Le discret félin, dont voici un spécimen photographié à Juraparc, continue à faire des remous.

Le loup n’est pas le seul grand carnivore européen à faire parler de lui dans la région. De retour en Suisse depuis le début des années 70, le lynx semble particulièrement bien se plaire dans le Jura. A tel point que Dominique Bonny, député au Grand Conseil vaudois, a déposé dernièrement une motion demandant la régulation de ce félin sauvage.

«Je tiens à dire que je ne suis pas un ayatollah anti-lynx. Je considère que cet animal doit avoir une place mesurée dans l’écosystème de notre pays», a-t-il précisé dans le développement de son intervention.

Selon lui, la prolifération de cet animal exerce une pression sur les chamois et chevreuils, entraînant la diminution, voire la disparition de ces ongulés à certains endroits. D’autre part, «des prélèvements répétitifs sur les troupeaux sont de nature à décourager les exploitants et propriétaires, favorisant ainsi la déprise agricole en zone de montagne», soutient-t-il.

Charles-Henri de Luze, président de la Diana vaudoise, estime lui aussi que les lynx sont présents en trop grand nombre dans les Alpes et le Jura. «Le monitoring effectué durant l’hiver 2011-2012 dans le Jura a révélé qu’il y avait un lynx tous les 34 kilomètres carrés. Or, la rapport défendu par le spécialiste Urs Breitenmoser est un lynx tous les 200 kilomètres carrés», relève-t-il.

Pour le président de la fédération des chasseurs vaudois, cette surpopulation entraîne la baisse des effectifs de grand gibier. «Malgré un hiver clément, les populations de chevreuils et de chamois sont en diminution. Il y a une quinzaine d’années, chaque chasseur avait le droit de tirer un ou deux chevreuils par saison dans le Jura. Aujourd’hui, ce chiffre est limité à un, et ce, uniquement dans certaines zones», relève-t-il. Et d’ajouter : «Un lynx mange, en moyenne, un ongulé (chevreuil, chamois, cerf ou bouquetin) par semaine. Il se nourrit également d’espèces protégées, comme le grand tétras.» Pas question toutefois de se livrer à un abattage massif du félin. «Nous ne souhaitons pas qu’ils soient tués. D’autres solutions, comme leur déplacement ou le contrôle de leur reproduction doivent être privilégiées », précise Charles-Henri de Luze.

La stérilisation des lynx, une alternative également suggérée par Dominique- Richard Bonny, n’est pas une alternative nouvelle. «Sur demande de la Diana, le Canton a déjà sollicité l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) au sujet de la stérilisation des femelles lynx dans les Alpes vaudoises», signale Catherine Strehler-Perrin, cheffe de la division biodiversité et paysage. Dans sa réponse, datée du 29 mars 2012, l’OFEV a indiqué qu’il n’entrerait pas en matière, la loi sur la chasse ne prévoyant que la «capture en vue d’une réintroduction» ou le «tir» comme mesures de régulation de l’espèce.

Pour Catherine Strehler-Perrin, la vasectomie des mâles lynx et l’hystérectomie de leurs homologues féminines, envisagés comme solutions par le député des Charbonnières, n’est pas adéquate à l’heure actuelle. «Les effets d’une telle pratique ne sont pas connus. Cette technique n’a pas pu être vérifiée. Et les possibilités actuelles données par la législation sont suffisantes», argumente-telle.

Selon la cheffe de division, rien ne permet de conclure à une présence aux proportions problématiques du lynx sur l’ensemble du Jura.

S’agissant des cas de prédation sur les troupeaux, elle souligne que le félin tacheté fait souvent l’objet d’une confusion avec le renard. «En 2012, une quinzaine d’attaques de moutons nous ont été signalées. Une seule d’entre elles concernait le lynx, et encore, sans certitude. Dans les autres cas, le renard était en cause.»

«Pour l’instant, ce prédateur ne fait que très peu de dégâts dans les troupeaux», indique Daniel Mettler, responsable du Groupe développement régional de l’Association suisse pour le développement de l’agriculture et de l’espace rural (Agridea).

Si le forfait peut être imputé de manière irréfutable au lynx, l’éleveur se voit rembourser le prix de l’animal tué selon une tabelle de l’association du petit bétail. En cas de doute, ou si le troupeau n’était pas protégé de la manière préconisée, avec une clôture et un chien de protection, le montant du dédommagement s’en voit diminué.

Le nouveau plan de gestion de l’OFEV concernant l’animal, actuellement en consultation auprès des cantons, n’est pas recevable aux yeux de Dominique Bonny, en raison des «contraintes toujours aussi excessives» qu’il contient.

«A l’image du loup, les lynx auteurs d’attaques répétées sur les troupeaux pourront, si ce texte est accepté, être abattus», précise Catherine Strehler-Perrin. A noter que seul le lynx à l’origine des dommages pourra être tué et le tir devra avoir lieu sur les alpages concernés. Verdict sur le nouveau concept lynx, si tout se passe bien, d’ici la fin de l’année.


Présence sur le Plateau

Dominique Bonny.

Dominique Bonny.

Traditionnellement adepte des forêts de moyenne montagne, le lynx est présent, photos à l’appui, sur le Plateau. Un mâle, mais aussi une femelle avec plusieurs petits, semblent d’ailleurs s’être établis dans la région de la Basse Mentue.










Ludovic Pillonel