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Le professeur Alain Cometta a resserré les liens avec les patients
Alain Cometta. © Michel Duperrex

Le professeur Alain Cometta a resserré les liens avec les patients

14 février 2021

L’ancien chef du Service de médecine a participé à une véritable révolution hospitalière

 

Professeur titulaire, le Dr Alain Cometta a transmis le témoin, début février, au Dr Rémy Pantet, à la tête du Service de médecine de l’Hôpital d’Yverdon-les-Bains. L’expression sied parfaitement à l’ancien athlète de l’Union sportive yverdonnoise (USY) qui, dès sa jeunesse, a appliqué le précepte «un esprit sain dans un corps sain». Tout au long de sa carrière, il n’a d’ailleurs jamais cessé de pratiquer le sport, même si sa passion pour le vélo, particulièrement tout-terrain (VTT), a fini par l’emporter.

Sur l’anneau du bord du lac, Alain Cometta s’est révélé être un redoutable sprinter, même s’il avoue une préférence pour le 200 et le 400 m, deux distances couvertes en à peine plus de 22 secondes, respectivement 50 secondes. Mais dans sa pratique professionnelle, le médecin a privilégié la concentration et la réflexion, la vitesse, toute relative, étant strictement réservée aux urgences.

A l’heure de passer la main, ce médecin qui a passé l’essentiel de sa vie à Yverdon-les-Bains est particulièrement bien placé pour évoquer l’évolution des traitements et de l’organisation hospitalière. De l’ancien hôpital des Quatre-Marronniers aux EHNV, que de chemin parcouru!

«Je n’ai jamais pensé que je finirais par pratiquer la médecine hospitalière», relève-t-il d’emblée. La médecine, il a commencé à s’y intéresser au gymnase du Belvédère, à Lausanne, à une époque où celui d’Yverdon était encore en gestation. Lorsqu’il est entré à l’école de médecine de l’UNIL, il y a plus de quarante ans, la détermination était bien présente. Elle s’est renforcée de jour en jour, au contact de confrères expérimentés, tel le Dr Serge Polli, avec lequel il a eu le plaisir de collaborer en tout début de carrière aux Quatre-Marronniers. Il dit avoir appris la rigueur et les exigences de chaque spécialité, à l’occasion de stages très constructifs, que ce soit aux soins intensifs ou en anesthésiologie.

C’est sans doute au département de médecine interne du CHUV, sous l’accompagnement du professeur Michel Glauser, considéré à l’époque comme l’un des grands spécialistes des maladies infectieuses – les années huitante et nonante ont été marquées par le HIV (Sida) –, que le médecin yverdonnois a définitivement choisi sa voie.

«Cela m’a aussi permis d’acquérir beaucoup de connaissances en matière d’infections hospitalières, de publier dans ce domaine», souligne le médecin reconnaissant. Un travail qui n’a rien du détail puisqu’il lui a permis d’obtenir plus tard le titre de professeur titulaire, après avoir partagé son expérience comme privat-docent dès 1997.

C’est dire que lorsqu’en 1996 l’opportunité de revenir, professionnellement parlant, dans sa ville s’est présentée, il n’a pas hésité. Il pouvait en effet se prévaloir d’une solide expérience d’interniste et d’intensiviste. Il a ainsi, durant près d’un quart de siècle, dirigé le service de médecine interne de l’Hôpital d’Yverdon.

Les établissements hospitaliers du Nord vaudois (EHNV), que le professeur Cometta vient de quitter, n’en étaient alors qu’aux balbutiements. «à l’époque, l’hôpital ressemblait à un îlot. Il y avait peu de contacts avec l’extérieur. Peu à peu, cela a changé. Nous avons mieux collaboré avec les collègues installés en ville. Sous André Allmendinger (ancien directeur), l’hôpital s’est ouvert vers l’extérieur. La stratégie de réseau s’est mise peu à peu en place», se souvient le professeur, qui avait l’avantage de connaître bon nombre de médecins.

Depuis son retour dans sa ville de cœur, le professeur Cometta a vécu la naissance du nouvel hôpital, puis celle du CHYC (Centre hospitalier Yverdon-Chamblon), et enfin celle des EHNV (établissements hospitaliers du Nord vaudois) lors du ralliement de Saint-Loup. Tout autour de cette véritable colonne vertébrale, le réseau de soins s’est développé.

Dans le même temps, la prise en charge a considérablement évolué, avec une réduction des durées de séjour en hôpital, et un grand développement de l’ambulatoire. Cette évolution, indispensable, n’a pas pour autant facilité la tâche des intervenants en milieu hospitalier. «Avec l’augmentation de l’âge de vie des gens, les patients ont de plus en plus de pathologies multiples. Les prises en charge sont plus complexes. Les patients sont mieux informés et ils ont des exigences. Il faut discuter, voire négocier. Mais tout cela s’est fait de manière naturelle et on a dû s’adapter», remarque le professeur Cometta.

Et bien évidemment, en un quart de siècle, la médecine a fait des progrès considérables. Le HIV constitue un exemple frappant. Il y a trente ans, les personnes infectées étaient parfois considérées comme des pestiférés. «Depuis 1996, on a des traitements efficaces. Et depuis la fin des années nonante, on ne va plus à l’hôpital pour ça. Il y a eu des progrès considérables dans la prise en charge des patients. On a aussi appris à mieux traiter les complications», relève Alain Cometta. Un constat qui vaut aussi pour le domaine des infarctus.

Le bilan comporte aussi sa part de contrastes. «On a assisté à l’émergence de résistances bactériologiques en milieu hospitalier. Il a fallu les combattre avec des mesures d’hygiène et de prévention. Dans ce domaine, la collaboration avec les CMS et les EMS est importante», souligne encore le médecin.

On ne pouvait évidemment éviter d’évoquer la pandémie, un véritable défi pour la médecine. «Depuis mars 2020, c’est la course. En tant qu’infectiologues, on était en plein dedans. Il fallait penser aux patients et au personnel. Au début, on naviguait à vue et il fallait souvent changer le fusil d’épaule», ajoute encore le professeur.

Autant dire qu’Alain Cometta n’a pas eu trop de temps pour «penser à l’après». «J’espère améliorer mes connaissances linguistiques en anglais. J’aime le cinéma et la musique», souligne-t-il. Et puis, le tout jeune grand-papa consacrera du temps à la famille. Car s’il a pu réaliser un tel parcours, c’est grâce à un équilibre que son épouse Christine, une native de Mathod rencontrée lors de son premier passage à l’ancien hôpital des Quatre-Marronniers, a toujours veillé à préserver, avec le concours de leurs deux enfants aujourd’hui adultes.
Le jeune sexagénaire est aussi fier de sa ville: «Je suis d’Yverdon et j’ai toujours aimé cette ville pour sa qualité de vie.»

 

Le partage du savoir et de l’expérience

 

Le professeur Alain Cometta s’est beaucoup investi dans la formation de ses confrères. Son retour à Yverdon-les-Bains a coïncidé avec la difficulté croissante à assurer la relève des généralistes. Il devenait difficile de trouver un successeur au médecin de famille à disposition de ses patients jour et nuit.

Grâce au programme ForOm, qui a fait office d’expérience pilote dans le Nord vaudois – il a été mis en œuvre par le Service de la santé publique sous l’impulsion du conseiller d’état Pierre-Yves Maillard –, le déficit de médecins dans l’arrière-pays a pu être comblé. «On a pu former beaucoup de médecins qui se sont finalement installés dans le Nord vaudois. Beaucoup de cabinets sont restés ouverts grâce à ce programme. Certains se sont installés en ville, d’autres à Echallens, Concise et Orbe», explique le professeur Cometta, qui refuse de s’en attribuer le mérite. Tout au plus, consent-il du bout des lèvres: «J’ai toujours apprécié le contact avec les médecins en formation.»

Isidore Raposo