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Léna Bühler au volant d’une Formule 3

23 décembre 2020

La pilote de Valeyres-sous-Montagny roulera pour l’écurie française R-Ace GP, en 2021, dans le championnat européen de F3. Le contrat est signé, mais il reste encore à réunir le demi-million de francs nécessaire pour finaliser son budget.

Elle est rayonnante, Léna Bühler. Le mois de décembre a démarré plein gaz pour elle, qui vient de passer des tests au volant d’une Formule 3 sur les circuits Paul-Ricard, en France, et de Barcelone. Un total de six jours très onéreux, certes, mais qui lui ont permis de décrocher un baquet pour la saison 2021 de la F3 européenne. «Je suis super contente. C’est une chance incroyable de rouler en Formule 3. Je me souviens que lorsque j’étais encore au volant d’un karting et que je voyais certains de mes amis rouler en monoplace, je me disais que ce serait impensable de pouvoir un jour me retrouver là.»

Il lui a bien fallu quelque tours pour s’habituer à son nouveau bolide, elle qui vient de terminer sa première saison en Formule 4 dans le championnat espagnol. D’un coup, elle est passée d’une formule frisant avec les 230 km/h à une monoplace capable d’atteindre les 260 km/h et bien plus aérodynamique que ce qu’elle a connu, ce qui permet notamment de freiner plus tard avant les virages. «La monoplace est bien plus grosse et réactive qu’en F4. Au début, ça fait bizarre. Tu te sens un peu un microbe.» Mais tout s’est bien passé, très bien même.

Pourtant, certains lui prédisaient qu’elle ne serait probablement pas capable de tenir le coup physiquement, dans des engins – sans direction assistée, contrairement aux catégories supérieures en monoplace, et avec un volant proche du corps – réputés très exigeants à piloter. «Tout le monde me disait que les filles n’y arrivaient pas. On m’a raconté que certaines n’étaient même plus en mesure de tourner le volant après quelques tours», souligne celle qui a passé tous les tests avec panache. Notamment durant les quatre jours intensifs passés en Catalogne, sur un circuit technique. «J’ai même réalisé une simulation de course et, non, je n’ai pas eu de problèmes particuliers pour tenir le coup. J’ai senti quelques courbatures oui, mais je n’étais pas pendue au volant», assure la petite boule de muscles de 23 ans, 1m61 sous la toise pour 50 kilos de dynamite.

C’est que la pilote de Valeyres-sous-Montagny est aussi déterminée qu’acharnée. Au cours de cette année, l’athlète a gagné 5 kilos de muscles sans prendre de poids. Alors qu’elle découvrait la catégorie, les prestations, autant physiques que sur le plan des chronos, de Léna Bühler durant les essais ont fini de convaincre l’écurie française R-Ace GP de lui confier un volant pour le championnat 2021. «Je me suis sans cesse améliorée tout au long des tests, sans non plus atteindre mes limites. Une progression qui était attendue par le team.»

Le manager de Léna Bühler, Xavier Feuillée, entretient de bonnes relations avec l’écurie. C’est lui qui a initié les contacts, assurant notamment que sa protégée était bien préparée. La Nord-Vaudoise n’a ainsi fait des essais qu’avec une seule équipe, et a convaincu. R-Ace GP a notamment remporté trois fois le titre en Formule Renault. Cette année, le pilote brésilien Caio Collet a fini vice-champion de la catégorie. «Cela faisait quelque temps qu’ils me suivaient et s’étaient montrés intéressés à m’engager. Je ne voulais pas perdre de temps à tester plusieurs écuries, alors que j’étais certaine de pouvoir compter sur une excellente équipe qui travaille bien», relève celle qui sera certainement l’une des seules filles, voire la seule, à rouler en F3 Alpine l’an prochain.

 

Un coup de pouce du Père Noël est nécessaire

 

Le contrat avec l’écuire R-Ace GP a été signé la semaine dernière. Léna Bühler s’est ainsi engagée, bien qu’elle n’ait par contre pas encore réussi à boucler le budget qui lui permettra de rouler la saison prochaine en Formule 3 Alpine. Un budget qui s’élève à un demi-million de francs tout de même. «Je suis super contente, mais reste toujours cette appréhension», reconnaît la jeune pilote, déterminée à mener rapidement à bien sa quête de soutien pécuniaire, indispensable à la concrétisation de sa saison.

Si elle s’est pareillement avancée, c’est que ses contacts sont sérieux, que ce soit avec des privés, capables de la soutenir en bonne partie, ou avec des entreprises aux moyens importants. «J’ai plusieurs rendez-vous ces prochains jours pour, je l’espère, finaliser les discussions. J’attends des confirmations, mais l’argent n’est pas encore sur le compte», annonce-t-elle, espérant un coup de pouce rapide du Père Noël.

«L’un des avantages du championnat auquel je vais participer, reprend Léna Bühler, c’est que les tests en circuit ne peuvent être effectués que lors des journées d’essais officielles. Cela signifie que que les pilotes qui ont plus de moyens ne peuvent pas en profiter pour rouler plus souvent que les autres. Comme ça, tout le monde se retrouve sur un pied d’égalité, par rapport aux budgets.» Et c’est sur la piste que tout se jouera.

 

Fusion des championnats européens de Formule 3

 

La Formule Renault Eurocup et la Formule Régionale Europe, c’est fini: voilà la Formule Régionale Europe par Alpine. Les deux championnats concurrents, situés entre le championnat mondial FIA F3 et la Formule 4 dans la hiérarchie des monoplaces, deviennent un seul et même championnat.

La nouvelle a été officialisée à la fin octobre, à Imola. Les F3 seront équipées d’un moteur Renault et de pneus Pirelli. Dix meetings de deux courses auront lieu, pour «un maximum de 36 voitures dans des écuries de trois monoplaces maximum, avec la possibilité d’en engager une quatrième si une femme est à son volant», avait alors annoncé la Fédération internationale de l’automobile.

Et Stefano Domenicali, président de la commission monoplace de la FIA, d’ajouter: «La consolidation de la Formule Régionale en Europe permet aux pilotes issus de la Formule 4 de poursuivre leur apprentissage et leur évolution dans un environnement fortement soutenu, solide et, c’est peut-être plus important encore, compétitif.»

Le nouveau championnat européen F3, auquel participera donc Léna Bühler, démarrera en avril sur le circuit Spa-Francorchamps, en Belgique, et se terminera fin octobre à Monza, en Italie. À Barcelone et à Monaco, courant mai, les F3 rouleront aux mêmes dates que la Formule 1. Une sacrée perspective pour les pilotes de demain.

Manuel Gremion