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Les candidats à la Municipalité face-à-face

11 décembre 2014

A quelques jours du deuxième tour de l’élection complémentaire à Yverdon, le socialiste Stéphane Balet et la PLR Valérie Jaggi Wepf se sont prêtés, pour La Région, au jeu de l’interview croisée.

Réunis hier dans la salle de briefing du journal à l’heure du café-croissant, Stéphane Balet et Valérie Jaggi Wepf ont vivement débattu des questions politiques du moment. © Michel Duperrex

Réunis hier dans la salle de briefing du journal à l’heure du café-croissant, Stéphane Balet et Valérie Jaggi Wepf ont vivement débattu des questions politiques du moment.

Comment vous sentez-vous à dix jours du deuxième tour du 21 décembre?

Valérie Jaggi Wepf: Je suis fatiguée, mais motivée. Je suis consciente que rien n’est gagné (ndlr: au premier tour, le 30 novembre, Valérie Jaggi Wepf a obtenu 47% des suffrages contre 38% pour Stéphane Balet). Au foot, les buts se reportent en deuxième mi-temps. Là, on repart à zéro.

Stéphane Balet: Tout reste ouvert. On ne sait pas comment les gens vont se mobiliser. Le taux d’abstention sera plus important, en raison de la période de Noël et de l’absence de votations fédérales. Sur un plan stratégique, nous avons changé notre campagne. Au premier tour, nous avions beaucoup axé sur l’excellent bilan de la Municipalité. Mais, au vu de notre résultat, le moins que l’on puisse dire, c’est que cet avis n’est pas partagé. Il y a un mécontentement de la population. Nous en prenons acte et faisons preuve d’humilité.

Comment allez-vous remobiliser les électeurs de gauche?

S.B.: Nous devons recentrer le débat sur la politique que nous défendons à gauche. Au premier tour, nous avons été trop généralistes. Nous allons rappeler les enjeux d’un changement de majorité. Il y a des options stratégiques qui ont été prises en termes de mobilité et d’urbanisme. Le PLR a une vision différente. Tout changement aura un coût. Ma crainte, c’est qu’on en vienne à couper dans le social ou la culture.

V.J.: Absolument pas! Ce n’est en aucun cas notre intention. Nous n’allons pas tout mettre par terre. Pour gagner des ressources, il faut permettre à l’économie de se développer. Faire venir de nouvelles entreprises amènera automatiquement une manne financière.

Tous les partis veulent attirer des entreprises. Comment arriverez-vous à faire mieux?

V.J.: Premièrement en changeant d’état d’esprit. Jusqu’à présent, il y a peu d’ouverture.

S.B.: Au contraire, il y a eu beaucoup de création d’emplois, des emplois intéressants et moins sensibles aux variations de l’économie. Je rappelle la crise des années 80, où Yverdon a souffert de n’avoir que de grosses entreprises qui employaient beaucoup de personnel. Aujourd’hui, nous avons de petites entités, basées sur le high-tech, grâce au développement du parc scientifique.

Les électeurs ont manifesté un désir de changement. Qu’est ce qui va changer si vous êtes élus?

V.J.: Davantage de sécurité, car il est impératif que nous ayons une .présence policière accrue. Et -on va encore nous reprocher de focaliser sur la mobilité-, mais celle-ci représente un des gros soucis de la population. On ne trouve pas de places de parc! On doit composer avec le fait qu’Yverdon a 29 000 habitants, mais que 40 000 personnes viennent de l’extérieur. Il faut leur trouver des solutions et leur faciliter l’accès au centre-ville. Il y a, enfin, tout l’aspect du logement. C’est mission impossible, pour des personnes âgées, de trouver des appartements protégés.

Concrètement, comment remédier au manque de logements?

V.J.: Il faut commencer par être à l’écoute. Il y a des gens qui veulent transformer des bâtiments et à qui on met des bâtons dans les roues. Il faut, au contraire, faciliter ces projets, même de manière provisoire, en attendant la réalisation de Gare-Lac.

S.B.: Le PLR, vous dénoncez en permanence un manque d’ouverture de l’actuelle Municipalité. J’en prends acte. Mais c’est une critique excessive. On a un peu le sentiment en vous écoutant, que rien ne va. Que l’on a favorisé ni l’économie, ni le logement, qu’on est dans un système totalement fermé où on ne peut jamais rien faire. Alors que nous essayons de faire avancer des projets, comme Gare-Lac, dont, je rappelle, que le débat au Conseil communal a été repoussé, jeudi dernier, par le PLR.

V.J.: D’une seule semaine… Nous ne sommes pas opposés à Gare-Lac.

S.B.: C’est une bonne nouvelle… Mais il n’y a pas que les appartements protégés, que vous citez, il y a les appartements à loyer modéré et les logements pour étudiants. Et là, il y a des projet qui démarrent.

V.J.: Qui démarrent… Le projet de logements pour étudiants de la rue de Neuchâtel devait être en livraison en novembre dernier. Aujourd’hui, il n’y a pas encore eu le moindre coup de pioche. Encore une fois, il y plein de projets, mais qui restent au fond d’un tiroir, à l’état d’étude. Il n’y a rien qui bouge.

S.B.: Vous ne pouvez pas dire que rien ne bouge! Vous savez très bien que cela n’est pas aussi simple. Mais je me réjouis de voir comment vous aller régler le problème, si toutefois vous êtes élue. Parce que je remarque que ceux qui reprochent que les projets n’avancent pas assez vite contribuent au ralentissement. J’en veux pour preuve les nombreuses oppositions du PLR sur bien des préavis. Quand on voit tout ce qui s’est fait en cinq ans, on ne peut pas dire que rien n’a été fait.

V.J.: Qu’est ce qui a réellement été fait?

S.B.: Prenons dans l’ordre: déjà la place Bel-Air…

V.J.: Il s’agit de l’aménagement d’une place, pas de la construction de logements. S.B.: Il est vrai que concrètement, dans ce domaine, il y a peu à montrer, mais il y a énormément de choses qui ont démarré. On ne peut pas dire que la démolition du Café du Raisin (ndlr: liée à l’important projet immobilier de l’avenue Haldimand) est encore à l’étude…

Le ton est plus vif qu’au premier tour. C’est une volonté de durcir le débat…

V.J.: Non, pas pour moi.

S.B.: De mon côté, oui, clairement. Car je regrette, pour ma part, le double discours tenu par le PLR. D’un côté, vous souhaitez du dialogue et, d’un autre, vous axez toute une campagne sur le mécontentement sur quelques points précis. Finalement, le travail de la gauche est globalement bon, si la préoccupation principale des Yverdonnois est les places de parc. Et je me réjouis, en cas de reprise de la majorité, de voir comment vous aller pouvoir, par exemple, améliorer la fluidité du trafic, tout en garantissant la sécurité des cyclistes, comme vous l’avez promis.

V.J.: Ce n’est pas juste de dire que nous contestons tout ce qui a été fait par l’actuelle Municipalité. Nous sommes juste à l’écoute du ras-le-bol des gens, comme par exemple, celui des habitants du quartier des Prés-du-Lac.

Les problèmes de mobilité et de stationnement ont beaucoup monopolisé l’attention. Mais, que manque-t-il, selon vous, à Yverdon pour assumer pleinement son statut de deuxième ville du canton?

V.J.: C’est l’ouverture vers les autres communes. Nous devons travailler en termes de région. Le Nord vaudois a un potentiel énorme et on est en train de se faire dépasser par la Broye, où tous les villages travaillent main dans la main avec Payerne. Ils ont une ouverture d’esprit et ils vont de l’avant. L’Arc lémanique est saturé. La population et l’activité économique se déplacent. Il ne faut passer à côté et jouer aujourd’hui notre carte. Dans cinq ans, il sera trop tard.

S.B.: Yverdon a tout ce qu’il faut pour réussir. C’est une ville qui rayonne par sa culture, avec la Maison d’Ailleurs et L’Amalgame. De mon côté, je miserais sur les technologies. Nous sommes en passe de gagner notre pari. C’est pour cela qu’il ne faut pas assouplir le règlement d’Y-Parc. Il y a des projets comme Kinder-city, l’équivalent du Technorama pour les enfants, qui envisage de s’installer. Il y a des échanges possibles avec les starts-up du site et l’école d’ingénieurs. Quelque 1800 emplois ont été créés ces dernières années dans ce domaine-là, où nous sommes reconnus au niveau suisse. La ville est à un carrefour. On aimerait être une grande ville, mais on garde une mentalité de gros village. Il faut oser le pari de la croissance.

Yan Pauchard