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«Les joueurs  du RCY sont engagés, déterminés»
© Muriel Ambühl

«Les joueurs du RCY sont engagés, déterminés»

10 mars 2022

Ancien joueur semi-professionnel, Blessing Motaung a rejoint le RC Yverdon durant l’hiver. Après avoir évolué en Afrique du Sud et aux États-Unis, il s’apprête à découvrir le championnat suisse de LNA avec les Yverdonnois, dimanche contre Stade Lausanne (15h aux Vuagères).

Blessing Motaung arrive aux Vuagères dans la voiture bien remplie de l’un de ses coéquipiers, passé le chercher à la gare. Depuis cet hiver, le Sud-Africain de 27 ans saute dans le train à Thoune, deux fois par semaine, une fois sa journée de travail terminée, pour venir s’entraîner avec le RC Yverdon. Rencontre avec celui qui met un point d’honneur à glisser les quelques mots de français appris jusqu’ici entre deux phrases dans un anglais parfait.

Blessing Motaung, après deux ans passés aux Etats-Unis, qu’est-ce qui vous a poussé à venir vous installer en Suisse?

J’avais toujours rêvé de venir en Europe après avoir participé à un tournoi d’une semaine en Allemagne quand j’étais jeune. Je suis finalement arrivé en Suisse en janvier 2021. Je parlais en ligne avec celle qui est maintenant devenue ma femme, et j’essayais de trouver un travail pour venir la rejoindre en Suisse. J’ai finalement été engagé au pair dans une famille à Altendorf (SZ) pendant dix mois. Désormais, je vis à Thoune avec ma femme, tout en travaillant dans la construction et l’entretien d’hôtels à Interlaken. Et en parallèle, j’essaie de voir si ma carrière de rugbyman peut redémarrer, car le Covid a stoppé beaucoup de choses.

Tout ne s’est d’ailleurs pas déroulé comme espéré aux USA…

En effet. J’ai eu une opportunité d’aller jouer là-bas, et je suis finalement passé par une dizaine d’Etats, où j’ai essayé d’évoluer avec différents clubs, dont le Old Glory DC à Washington. C’était toujours compliqué, car on me disait que j’étais suffisamment bon, mais que le problème était de m’obtenir un visa. J’ai fini par me retrouver dans une position difficile, et le Covid est arrivé. Alors je me suis dit «ok, j’abandonne avec les USA, j’ai fait tout ce que j’ai pu et personne ne peut m’aider».

Qu’avez-vous alors décidé de faire?

J’ai décidé que cette fois-ci, j’allais essayer d’aller en Europe. C’est le rêve de tous les enfants d’Afrique du Sud de jouer en France ou au Royaume-Uni. Mais à cause du Covid, des équipes comme celle de Pontarlier ne pouvaient pas me faire venir. Donc j’ai accepté un travail au pair à Altendorf car, au moins, je pouvais voir ma copine.

Et comment avez-vous atterri au RCY?

Il y avait un ou deux agents qui m’avaient contacté en ligne pour me demander si je jouais toujours et je leur ai dit que je n’étais pas sûr, car j’étais éloigné du rugby depuis une année. Puis je suis tombé sur le compte Instagram de Dominic Gorman, qui fait partie de l’équipe de Suisse, je l’ai contacté, et il m’a dit «oui, viens jouer pour mon club!» Donc j’ai appelé le président du RCY, Vincent Piguet, et tout s’est fait facilement.

On imagine que la petite structure yverdonnoise doit vous changer de ce que vous avez connu jusque-là…

Je pense qu’il y a beaucoup de potentiel et j’aime la façon de coacher d’Alex Farina. Il est à la fois drôle et très focus. Et le président fait de son mieux pour proposer une structure aussi professionnelle que possible aux joueurs. Du coup, les gars se donnent à fond, se poussent et se motivent les uns les autres. C’est tout ce qu’il faut, tu n’as pas besoin des meilleurs talents du monde. J’apprécie à quel point les joueurs sont engagés, déterminés. Je ne me suis par exemple jamais retrouvé à un entraînement où il n’y avait que cinq personnes présentes.

Vous ne parliez pas du tout français à votre arrivée. Avez-vous tout de suite trouvé votre place au sein de l’équipe?

Oui, les gars sont drôles et m’ont tout de suite un peu charrié, ce que j’adore. Plus ils le font, plus j’apprends le français. Ce n’est pas évident, car je suis déjà en plein apprentissage de l’allemand et du suisse-allemand. Par contre, certains de mes coéquipiers ont de la peine à prononcer mon prénom. Du coup, je leur ai demandé quelle était la traduction en français, ils ont opté pour «bénédiction», donc je leur ai dit qu’ils pouvaient m’appeler «Béné» (rires).

Yverdon est actuellement 1er de LNA et peut légitimement rêver de titre. Connaissez-vous un peu le championnat suisse?

Non, pas tellement pour être honnête. J’ai juste commencé à regarder l’équipe nationale récemment. Mais ce serait gratifiant pour le club d’être récompensé pour tout le dur travail accompli et tous les trajets réalisés. Et c’est toujours un beau sentiment de remporter un titre.

 

 

Dans une équipe universitaire en tant que semi-pro

C’est en regardant jouer l’équipe de son école que Blessing Motaung a eu envie de se mettre au rugby, alors qu’il avait une dizaine d’années. «Mais j’étais un peu effrayé à l’idée de sauter le pas, car je me disais que ces gars allaient me briser, rigole-t-il. A cette époque, je faisais du football, et je me suis demandé pourquoi j’avais peur, puisqu’il y avait aussi des contacts.»

Dans la foulée, l’un des joueurs qu’il admirait s’est mis a coaché l’équipe de son école. «Je l’ai approché, il a commencé à m’apprendre quelques bases, et je me suis mis à adorer ça.»

Celui qui joue principalement comme demi de mêlée mais peut aussi évoluer à l’aile a par la suite intégré une grande école de rugby de Johannesbourg. «C’est là que j’ai découvert que le rugby pouvait me donner un futur. Mais je dirais que j’ai éclos sur le tard, car j’ai eu beaucoup de difficultés au début, notamment pour apprendre à lire le jeu.» Ce qui ne l’a pas empêché, à force de travail, d’intégrer une équipe universitaire de la métropole sud-africaine. «Avec les autres joueurs, nous étions là-bas pour évoluer en tant que semi-professionnels. Les cours étaient vraiment secondaires. Mais j’ai quand même étudié le business et le marketing, ce qui m’a servi dans ma carrière, notamment pour trouver des sponsors.»