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L’intérêt public prime
Vu depuis Vaugondry, le mât de téléphonie serait implanté au-dessus du pylône visible sur la gauche. raposo

L’intérêt public prime

25 mars 2025 | Texte et photo: I. Ro.
Edition N°3916

Une antenne de téléphonie obtient le feu vert du Tribunal cantonal.

Le projet d’implantation d’une antenne de téléphonie au nord de Villars-Burquin avait suscité un tollé. Malgré le refus de la Municipalité de délivrer le permis de construire, la Cour de droit administratif et public (CDAP) du Tribunal cantonal vient de donner le feu vert à ce projet. Dans le cas particulier, les éléments d’ordre esthétique doivent s’incliner devant l’intérêt général. L’Exécutif de Tévenon devra donc délivrer le permis de construire.

La procédure a débuté il y a plus de deux ans lorsque l’opérateur a déposé une demande de permis de construire pour la construction d’un mât de quelque 25 mètres de hauteur, destiné à supporter neuf antennes de téléphonie 3G, 4G et 5G, au nord d’une parcelle classée en zone à construire, et en bordure d’une forêt.

Le projet a suscité une levée de boucliers et de nombreuses oppositions, dont celle des propriétaires d’une parcelle voisine.

L’opérateur avait obtenu toutes les autorisations spéciales nécessaires des services cantonaux, y compris celle relative au rayonnement non ionisant, le projet respectant la valeur limite d’immissions.

Refus municipal

Malgré ces prérequis, la Municipalité de Tévenon a refusé le permis de construire en mai de l’année dernière, principalement pour des motifs esthétiques, en raison de l’impact d’une antenne de 25 mètres dans une zone construite de faible densité, mais aussi en raison de la visibilité du mât ainsi que de la proximité du village de Vaugondry, situé en contrebas et bénéficiant d’une protection, soit la note A dans l’Inventaire fédéral des sites construits à protéger en Suisse (ISOS).

L’opérateur a contesté ce refus devant la Cour cantonale. Une inspection locale organisée en novembre dernier a permis aux parties de s’exprimer et à la Cour de se faire une petite idée. En effet, en raison des chutes de neige, la visibilité était mauvaise. Mais les parties ont eu l’opportunité d’apporter des photos au dossier après l’audience. Une opportunité qui n’a pas été saisie.

Les griefs écartés

Dans un arrêt très détaillé, dans lequel il est fait état des nombreuses décisions du Tribunal fédéral en la matière, la CDAP a examiné les griefs des opposants qui ont participé à la procédure, et de la Municipalité.

Les juges relèvent notamment que «l’application des normes d’esthétique ou de protection des sites ne peut rendre impossible ou compliquer à l’excès la réalisation de l’obligation de couverture qui incombe à l’opérateur en vertu du droit fédéral».

Il faudrait notamment que les dispositions communales se justifient par un intérêt public prépondérant, «tel que la protection d’un site ou d’un ensemble de bâtiments présentant des qualités esthétiques remarquables», selon une définition retenue à plusieurs reprises par le Tribunal fédéral.

Et la Cour d’ajouter: «[…]si l’on ne peut nier qu’une antenne de téléphonie mobile présente nécessairement un aspect visuel déplaisant, encore faut-il, pour exclure son implantation, qu’elle péjore de manière incontestable les qualités esthétiques d’un endroit donné.»

La Municipalité a soutenu que le terrain en forte pente favorise l’effet de surplomb, «compromettant l’harmonie du quartier composé de chalets et villas, et en particulier incompatible avec la vue sur le village de Vaugondry qui figure à l’inventaire ISOS».

Un site déjà sacrifié…

Mais les juges cantonaux relèvent que le village de Villars-Burquin, lui, ne figure pas à l’inventaire ISOS, et surtout, sans doute point charnière, que le site choisi «à proximité d’un imposant pylône électrique préexistant relativise fortement l’impact du mât prévu sur le paysage».

Par ailleurs, les zones forestières voisines dissimuleront le mât depuis différents points de vue. «Compte tenu de l’implantation du pylône à haute tension existant, il ne peut être retenu que l’installation projetée porterait atteinte à un paysage encore intact dont elle péjorerait de manière inacceptable les qualités.»

En se penchant plus particulièrement sur le village de Vaugondry, situé 400 mètres plus  bas, les juges considèrent que l’antenne ne va pas à l’encontre de l’objectif de protection défini par l’ISOS. Et d’ajouter: «De plus, la parcelle ne se trouve pas dans les échappées dans l’environnement délimitées par cet inventaire fédéral.»

En rappelant une fois encore que l’impact d’une antenne n’est pas «insignifiant», la CDAP considère que dans le cas particulier cela ne suffit pas à justifier un refus de la délivrance du permis de construire pour des motifs d’esthétique et d’intégration.

Une fois encore donc, dans le cadre de la pesée d’intérêts qui s’impose, «l’intérêt du public à disposer d’un réseau de téléphonie mobile de bonne qualité» l’emporte.

En ce qui concerne les éléments relatifs à la santé, les juges se rallient à l’opinion des services cantonaux compétents. Le principe de prévention est donc réputé assuré.

L’Exécutif de Tévenon devra donc délivrer le permis de construire. A moins qu’il ne décide de recourir au Tribunal fédéral. Mais les probabilités de succès sont minces. Dans notre région, le seul refus confirmé ces deux dernières années concerne un projet d’implantation d’antenne près du château de Sainte-Croix, en raison de la protection ISOS.