Logo
« L’un des efforts les plus violents que j’aie faits »
Coach à Vertical Sports, Mélanie Fusco (devant, 2e depuis la g.) a pu compter sur le soutien de plusieurs adeptes de dénivelé du club.

« L’un des efforts les plus violents que j’aie faits »

10 octobre 2024 | Textes: Muriel Ambühl | Photos: DR
Edition N°3806

Mélanie Fusco a relevé un sacré défi, mi-septembre aux Rasses : couvrir le plus grand dénivelé positif possible en effectuant des allers-retours pendant 24 heures. La citoyenne de Lignerolle a cumulé plus de 10 000 m de D+, soit la 6e meilleure performance mondiale chez les femmes !

Mélanie Fusco a couru en rond pendant 24 heures. C’est ainsi que l’on pourrait presque résumer l’impressionnant défi qu’a relevé la traileuse de Lignerolle. Samedi 21 septembre, à 8h du matin, la sportive de 37 ans s’est élancée sur un tracé d’environ 150 m de long, pour 50 m de dénivelé positif, aux Rasses, sur le terrain qui sert de piste de luge en hiver. «Je mettais en moyenne entre trois minutes trente et quatre minutes pour monter, plutôt en mode marche rapide, et une minute pour descendre. J’avais préalablement contacté la Commune de Bullet pour savoir si c’était ok que je fasse ça, et le vice-syndic, Serge Gander, a été super sympa, il m’a préparé toute une bande pour que je puisse avancer plus facilement. Car il n’y a personne qui passe là-bas, pas de chemin, et les herbes sont hautes. »

Adepte de longues distances et de dénivelé, la coureuse avait vu qu’un tableau existait avec les personnes ayant couvert le plus grand dénivelé positif possible en 24 heures, composant ainsi un classement mondial. «Je me suis dit que c’était vraiment chouette comme défi, et j’ai décidé de le réaliser aux Rasses pour mettre en avant la station et rappeler que, malgré le fait que cela devienne compliqué pour le ski, on peut y faire d’autres activités. Et c’était chouette de pouvoir faire ça à la maison. »

Le détenteur du record mondial chez les hommes étant un Neuchâtelois, Christophe Nonorgue, Mélanie Fusco lui a demandé quelques conseils. «Il m’a notamment expliqué comment faire homologuer mon challenge. Un géomètre a dû venir mesurer la pente, et il a fallu que je passe des tests antidopage. Le protocole était assez strict.» Le but de l’opération, au-delà du défi sportif ? Figurer sur le tableau des meilleures performances mondiales. « Et j’ai réussi ! Je suis 6e chez les femmes, avec 10 170 m de dénivelé positif en 24 heures, pour un total de 65 km. C’est cool, même si je pense qu’il n’y a pas beaucoup de filles qui font ça, donc il faut relativiser… »

Si le trail fait partie de sa vie, Mélanie Fusco ne s’est pas entraînée plus spécifiquement que ça pour son challenge, elle qui avait déjà avalé pas mal de dénivelé cette année. «Je me suis vraiment décidée en juillet, donc l’échéance de septembre est arrivée assez vite. Mais je m’étais fixé la barre des 10 000 m à atteindre, ce qui représentait 200 tours, alors je suis contente d’y être parvenue.» Cela n’a-t-il donc pas été trop difficile de tourner en rond durant 24 heures ? « On ne va pas se mentir, c’est un gros travail mental. Mais ce qui était cool, c’est qu’il y a des moments où des gens sont venus avec moi, d’autres où j’étais seule avec ma musique, ce qui variait un peu. J’ai eu un gros coup de mou en fin de journée, le samedi vers 19h. J’en avais marre, et c’était trop pour mes jambes, je n’avais jamais vécu quelque chose d’aussi difficile au niveau musculaire. C’est l’un des efforts les plus violents que j’aie faits. Lors des ultratrails auxquels je participe, il y a des moments où tu peux souffler. Là, jamais. Tu ne fais que monter et descendre sur une pente à 34%. En plus, je n’ai pas réussi à m’alimenter tout de suite, je me suis retrouvée en hypoglycémie, c’était hypercompliqué. »

Celle qui est maman d’une petite fille s’est alors posée, et l’un de ses amis lui a fait des pâtes. «Ça a en quelque sorte coupé mon challenge, ce qui fait que, quand je suis repartie, j’avais l’impression que c’était pour quelque chose de nouveau. Et ensuite, la nuit est tombée, c’était magique, ça m’a de nouveau apporté de la variation. Mes amis ont mis de la musique quand c’est redevenu un peu plus compliqué pour moi, entre 2h et 4h du matin. Toute seule, j’aurais sûrement abandonné, alors que là, grâce aux autres, je me suis dit que je ne pouvais pas arrêter. Puis j’ai eu droit à un magnifique lever de soleil. Et, au final, plus que le résultat, je retiens les échanges qu’il y a eu pendant ces 24 heures, les gens qui sont venus me soutenir, que ce soient mes amis, ma famille, mon copain. On a beaucoup ri, et on s’est côtoyés dans des circonstances différentes que d’habitude pour certains. J’ai trouvé cool d’avoir
organisé un événement rassembleur, qui a fait plaisir aux gens ! »

Maintenant qu’elle a découvert ce que ce défi implique en le réalisant une première fois, Mélanie Fusco compte bien réitérer l’expérience. «Je ne m’attendais pas à ce que ce soit si difficile, ni à ce que j’aie de la peine à bien m’alimenter, ce qui n’est habituellement pas mon cas en course. Je prévois de m’entraîner spécifiquement pour ça l’une de ces prochaines années afin de réaliser un résultat encore meilleur. 10 000 m de montée, c’est difficile, mais c’est surtout la descente qui fait mal ! »

La Nord-Vaudoise, qui enseigne à Chavornay, n’a d’ailleurs pas pu descendre correctement les escaliers pendant deux jours, ce qui a fait sourire les élèves. Qui se sont montrés admiratifs, une fois que Mélanie Fusco leur en a expliqué la raison.


Un gros coup de stress à cause du chronométrage

Afin de faire homologuer sa performance, Mélanie Fusco a notamment dû trouver un système de chronométrage. «Il y avait à chaque fois une personne en bas et en haut qui devait biper mes tours. Donc ça a été une organisation dingue d’avoir tout du long des gens qui s’en chargeaient, pour garantir que je ne trichais pas. »

La traileuse a cependant vécu un gros coup de stress le jour avant la course, quand elle a découvert que le matériel de chronométrage n’était pas arrivé. «Sans ça, c’était fini, je ne pouvais pas faire mon défi. Alors, mon copain est allé plus loin qu’Annecy, là où se trouvait le gars qui devait nous fournir les affaires, pour récupérer le matériel.» Et Mélanie Fusco a ainsi pu prendre le départ comme prévu.