Provence – Les bénévoles de la Cabane des Rochat, qui organisent des activités avec les requérants d’asile, ont organisé, hier, une fête aux couleurs de la Guinée. Elle marque la fermeture de la Caserne des Rochat, prévue le 30 avril prochain.
«Une page se tourne et il faudra s’en remettre, même si cela va être très difficile», témoigne Yvette Fischman, présidente de l’Association auprès des requérants d’asile de Vallorbe oeucuménique et humanitaire (ARAVOH). C’est elle qui a mis en place, il y a trois ans, la Cabane des Rochat pour aider les étrangers en attente d’un permis de séjour à communiquer et à s’intégrer. Mais d’ici le 30 avril prochain, la caserne qui accueille ces requérants hommes pour la nuit va fermer définitivement ses portes et, par conséquent, la cabane également. Alors pour réunir une dernière fois tout le monde, la vingtaine de bénévoles qui y travaillent ont organisé une fête, qui visait aussi à montrer leur mécontentement au conseil général de Provence, suite à sa décision de ne pas prolonger l’ouverture de la caserne.
Et c’est avec un repas aux saveurs de la Guinée que la fête a commencé. Au menu : Mafitiga, un plat cuisiné avec de la pâte d’arachide, des légumes et de la viande. Aux fourneaux, quatre requérants de la Caserne des Rochat qui viennent d’arriver en Suisse. «Je suis là parce que les gens de la cabane sont tellement plein de bonnes volonté que je voulais leur redonner quelque chose en retour», explique Emile Aséfat. Ce Guinéen est arrivé en Suisse le jour de la Saint-Valentin et cela fait quelques semaines qu’il a été déplacé aux Rochat. «Il faut vraiment beaucoup de courage pour vivre ici, parce qu’il y a peu des gens pour pouvoir communiquer et aucun endroit pour se divertir», poursuit le jeune homme, qui souhaite reprendre ses études en relations internationales si les autorités helvétiques le lui permettent.
En sursis et loin de tout
Comme Emile Aséfat, d’autres ont ressenti ce manque d’activités dans la région. C’est pourquoi celles organisées par les bénévoles de la Cabane des Rochat étaient très appréciées par les requérants d’asile. Des bénévoles qui leur offrent des biscuits et une oreille attentive, comme une vraie maman. «Les requérants appellent tous les bénévoles, hommes et femmes, Mama Aafrica ou Mama tout court», confie Yvette Fischman.
Et certains de ces bénévoles sont des aumôniers, comme Thérèse Aubert, qui a annoncé, hier, après le repas, qu’elle arrêtait de venir dans les centres de requérants d’asile : «C’est trop dur, au niveau émotionnel, d’entendre les histoires terribles de ces hommes et de voir des jeunes en bonne santé pleurer», témoigne-telle. On devrait reconnaître notre tâche comme un accompagnement en fin de vie.» Le plus dur, selon elle, c’est de discuter avec des personnes qui ont vécu un enfer et qui arrivent en Suisse en pensant y trouver refuge. Mais ceux qui sont envoyés à la Caserne des Rochat sont ceux qui n’ont presque aucune chance d’être acceptés, révèle-t-elle. «Et je ne peux pas leur dire qu’il faut qu’ils arrêtent d’espérer», ajoute-elle.
Un besoin de communiquer
Pourtant, certains requérants de passage au Rochat ont réussi à s’établir en Suisse, comme Azim Khaleghi. Invité d’honneur au repas des bénévoles pour présenter son parcours, ce jeune Afghan de 23 ans a trouvé une place d’apprentissage comme électronicien à Fribourg : «Quand je suis arrivé, j’ai été très étonné de voir toute l’aide de ces bénévoles qui ne nous connaissent pas du tout et qui, pourtant, nous aident à nous en sortir.»
Mais en plus des discussions, c’est aussi et surtout un accès à Internet qui leur est offert à la Cabane des Rochat. Un outil indispensable pour rester en contact avec leur famille et leurs amis restés au pays. Le grand chef de ces installations informatiques, c’est Roland Suter, bénévoles et informaticien, qui a également pris des photos portraits de requérants de passage. «Ces derniers voulaient avoir une belle image d’eux pour exister après tout ce qu’ils avaient vécu, alors ils posaient avec des amis, avec des bénévoles ou à côté de belles voitures», raconte-il. Ces clichés ont d’ailleurs été exposés sur les murs de la salle des fêtes de Provence lors du repas des bénévoles. «J’espère que ces images permettront aux autres citoyens d’avoir un petit peu plus d’empathie», conclut le photographe de Mauborget.