Logo

Métiers masculins traduits au féminin

8 mars 2017 | Edition N°1950

Nord vaudois – Mécanicienne, bûcheronne ou électronicienne, elles nous parlent de leur formation à l’occasion de la Journée de la femme, qui a lieu aujourd’hui.

Anne-Lydie Curchod a réussi son apprentissage de mécanicienne. ©Michel Duvoisin

Anne-Lydie Curchod a réussi son apprentissage de mécanicienne.

Difficile de trouver des femmes dans des domaines tels que la mécanique, la soudure, l’ingénierie et l’électronique. Pourtant, certaines ont choisi des parcours professionnels qui sont classifiés comme des métiers d’hommes. Dans le cadre de la Journée de la femme, La Région Nord vaudois s’est penché sur les apprentissages dans lesquels ces dames se font rares.

Parmi les centres de formation yverdonnois, l’Union professionnelle suisse de l’automobile (UPSA) peine particulièrement à trouver des apprenties. Cette année, sur environ 500 étudiants, toutes filières confondues, seuls seize sont des filles. Anne-Lydie Curchod était l’une de celles qui ont emprunté cette voie. Pourtant, elle se prédestinait à devenir infirmière, et c’est par hasard, suite à un stage d’une semaine conseillé par sa mère, qu’elle a trouvé sa vocation. Mécanicienne de formation, elle est aujourd’hui cheffe d’exploitation au Garage de la Plaine, à Yverdon-les-Bains. Mais elle a parfois dû se battre pour y arriver et faire sa place : «Dans un monde d’hommes, j’ai dû montré que je faisais aussi bien, voire mieux qu’eux pour obtenir leur respect.»

Si elle n’a jamais essuyé de remarques misogynes, Anne-Lydie Curchod a parfois été «boudée» par des clientes femmes. «Elles ont peut-être plus de préjugés. Avec les hommes, dès qu’ils voyaient que je m’y connaissais en technique, ils étaient contents de parler à une femme», confie-t-elle.

Comme l’UPSA, d’autres centre de formation manquent de dames dans leurs cours, à l’instar de l’Institut Suisse de la soudure (SWI) d’Yverdon-les-Bains, où plus de 90% des participants aux cours de brasage électronique sont des femmes. Alors qu’elles ne sont qu’environ 1% à suivre une formation de soudage. Selon Pierre Rogé, responsable communication au SWI, cela s’explique par le fait que le métier de soudeur demande de porter des charges lourdes et de travailler sur des chantiers.

Parité pas acquise

Bien que le bilan ne soit pas si contrasté à la HEIG-VD, la parité n’est pas acquise dans les domaines de l’ingénierie, qui ne motive que 13% de femmes. Et particulièrement les filiales de l’informatique (9%) et du système industrielle (4%). Mais la Haute Ecole a prévu une stratégie d’information et de sensibilisation pour améliorer ce ratio. «Nous avons remarqué qu’il y a une parité dans les ateliers que nous organisons pour les très jeunes. Car ces derniers ne sont pas influencés par les modèles sociaux», explique la directrice de la HEIG-VD, Catherine Hirsch, qui rappelle l’existence d’une classe préparatoire réservée aux jeunes filles. Ne serait-ce pas une forme de discrimination ? Absolument pas, selon notre interlocutrice : «Le but est d’offrir aux jeunes filles la possibilité de renforcer leur choix dans une formation d’ingénieure. Car, parfois, il faut se rappeler, entre filles, que les mathématiques, par exemple, ce n’est pas que pour les garçons.»

Audrey Dällenbach, Sylvie Goncalo et Lara Wittwer. ©Michel Duvoisin

Audrey Dällenbach, Sylvie Goncalo et Lara Wittwer.

«J’ai trouvé ma voie !», lance Audrey Dällenbach, étudiante en électronique au Centre Professionnel du Nord vaudois (CPNV). Elle n’a que 20 ans mais elle a eu une vraie révélation lorsqu’elle a testé la brasure. Lara Wittwer et Sylvie Goncalo suivent également cette formation, qui n’intéresse que peu les femmes, selon Michel Tatti, directeur du CPNV.

Ces jeunes filles n’ont pas échappé aux remarques de leurs camarades, qui leur disaient que ce n’était pas «un métier de fille». «On a assez de caractère pour leur répondre !», fait remarquer Audrey Dällenbach. Mais au début, elle a eu quelques doutes : «J’avais peur d’être la seule fille toute la journée, confie-t-elle. Après, je me suis dit qu’il valait mieux tenter le coup pour ne pas avoir de regret». Aujourd’hui elle souhaite poursuivre ses études dans les énergies renouvelables.

Sylvaine Jorand a suivi une formation de forestière-bûcheronne. ©Camille Jorand

Sylvaine Jorand a suivi une formation de forestière-bûcheronne.

Sylvaine Jorand a trouvé sa vocation en suivant un apprentissage de forestière-bûcheronne.

Cette Tapa-Sabllia est l’une des quatre femmes de la région à travailler encore dans ce domaine. Car aujourd’hui, elle met ses compétences en sylviculture au profit d’un bureau d’ingénieur forestier à Yverdon-les-Bains. Mais à l’origine, elle pensait devenir maîtresse d’école.

Meilleures années de sa vie

Sylvaine Jorand se rappelle très bien de ses trois années d’apprentissage : «C’était mes meilleures années de formation.» Pourtant, ce métier physique n’est pas à la portée de tous. «Au début, j’avais peur de ne pas y arriver, mais je sentais que c’était ce que je devais faire et je ne me suis pas posé de questions, confie-t-elle. Certes, j’avais moins de force que les hommes, mais je compensais avec la technique.» Le directeur du centre de formation du Canton de Vaud a d’ailleurs précisé que les femmes sont caractérisées, dans ce métier, pour être plus malines. Car au lieu de montrer leurs muscles, elles réfléchissent davantage en amont pour utiliser des leviers.

Enregistrer

Christelle Maillard