Nord Vaudois – Coutumier en hiver, le recul du lac de Neuchâtel est exceptionnellement marqué cette saison, suite à l’absence prolongée de précipitations. La situation actuelle n’est toutefois pas critique pour les représentants des milieux concernés interrogés.
Le retrait de l’eau consécutif à une importante période de sécheresse dessine des paysages singuliers aux abords du lac de Neuchâtel. Les bancs de sable se dévoilent, la coque de certains bateaux restés au port menace de toucher le fond et les pontons se déploient à une distance respectable de l’onde. Les chiffres confirment la nature exceptionnelle de ce phénomène. Il faut, en effet, remonter jusqu’en 1990 et 1985, dans les statistiques, pour obtenir des valeurs similaires à celle enregistrée hier à la station fédérale de Grandson. «Le niveau du lac est descendu à 428,79 mètres à 14h. Il faut remonter à 1978 pour avoir un résultat inférieur. C’est environ dix à quinze centimètres de moins que la moyenne à cette période de l’année», indique Michel Antoniazza, collaborateur scientifique pour l’Association de la Grande Cariçaie.
Pas le scénario de la mer d’Aral
Pas question, toutefois, de tirer la sonnette d’alarme à ce stade. La catastrophe de la mer d’Aral n’est pas sur le point de se répéter dans le Nord vaudois.
De l’aveu du biologiste de la Grande Cariçaie, l’impact sur la faune lacustre n’est pas négatif. Au contraire, si l’on se fie au comportement des canards de surface croisant dans la baie d’Yvonand.
«Ils sont beaucoup plus nombreux que d’habitude près du bord du lac, car l’accès à la nourriture y est plus facile. Les rouleaux d’algues arrachés par la bise les attirent et on observe les canards et les hérons sur les bancs de sable, qui seraient prisés par les espèces migratrices si elles n’étaient pas actuellement en Afrique ou en Méditerrannée », commente Michel Antoniazza.
Marc Miéville, chef de secteur des lacs et cours d’eau pour le Nord vaudois, rappelle que, bien que particulièrement frappant en ce moment, le recul du lac en hiver est un phénomène normal. «La neige interrompt généralement l’alimentation des rivières et des ruisseaux. Le niveau d’eau remonte au printemps avec la fonte», déclare-t-il.
Plus marqué par le passé
Michel Antoniazza signale, pour sa part, qu’avant la deuxième correction des eaux du Jura (les travaux se sont terminés en 1973), le lac se recroquevillait davantage. A l’air libre en hiver, la tourbe périclitait, laissant le champ libre aux craies lacustres, terreau «inhospitalier pour les cultures». Sans oublier le risque d’inondations printanières lié à l’affaissement du sol.
A Grandson, le garde-port Didier Rosenberg n’a pas été incommodé outre mesure par la rareté de l’élément liquide. Tout juste a-t-il dû déplacer quelques bateaux menacés par la proximité du fond. Marc Miéville indique, pour sa part, que la période hivernale est idéale pour entreprendre des petits travaux de réparation et de maçonnerie sur les berges. «Il n’y a, ainsi, pas de souci de pollution des eaux», relève-t-il.