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Tout ça pour ça:  aborder l’absurdité de l’existence
Antonio Troilo est né à Yverdon-les-Bains en 1968. Photo: Céline Michel

Tout ça pour ça: aborder l’absurdité de l’existence

30 novembre 2023

Arts de la scène – Bien connu des aficionados de l’émission 52’, le comédien et humoriste yverdonnois Antonio Troilo jouera pour la toute première fois son spectacle Tout ça pour ça au théâtre de l’Echandole à Yverdon ce jeudi.

Sur la scène, un décor qui ne semble pas être entièrement terminé: un banc auquel il manque des lattes, une chaise qui n’a pas de dossier. Ces objets ne paraissent pas cassés ou usés, juste inaboutis. Au-dessus, un grand drap blanc accroché des deux côtés de la scène. Et derrière, le vide, comme si ce lieu était au milieu de nulle part. Un personnage erre au centre de cet étrange décor, dans l’attente de sa naissance. Il se demande à quoi va ressembler sa vie, si ses parents pourront bien s’occuper de lui, s’il sera beau ou laid, quel métier il pourra faire. Au fur et à mesure de ces questions, il commence à douter, à se rendre compte qu’il ne va peut-être pas toujours avoir le choix. Mais dans cet espace suspendu entre le temps et l’espace, il va pouvoir goûter à plusieurs ingrédients de la vie, rencontrer différents personnages, tester de nombreuses professions, comme une sorte de laboratoire avant une vie peut-être déjà toute tracée.

Et lorsque sonne l’heure de sa venue au monde, le personnage hésite encore, tiraillé entre la curiosité et la crainte de se retrouver limité par sa condition d’être humain. Pourquoi ne pas rester dans cet endroit où toutes les vies semblent possibles? Naître ou ne pas naître? Telle est la question.

Parlez-moi de l’absurde

Avec ce seul en scène d’une heure et quart mis en scène par Alain Borek, Antonio Troilo souhaite évoquer l’absurdité de l’existence dans tout ce qu’elle a de drôle et de cruel à la fois. «Déjà tout petit je me demandais à quoi cela servait de vivre si c’était pour mourir à la fin. Et encore aujourd’hui, je me pose beaucoup de questions sur mon identité. Être comédien me permet d’en explorer des centaines, de calmer un peu ces angoisses. Pour moi, ces grandes questions sont une véritable mine d’inspiration.» Il faut dire que l’artiste s’est cherché durant de longues années.

Né à Yverdon-les-Bains en 1968, Antonio Troilo n’est pas issu d’une famille d’artistes. Pour ne pas froisser ses parents, il a d’abord été monteur électricien jusqu’à l’âge de 30 ans. C’est à cette période qu’il décide de se réorienter totalement, donnant carte blanche à ses rêves de comédie. Au grand désarroi de son père, il intègre l’école de théâtre Serge Martin où il rencontre l’acteur et humoriste Vincent Kucholl qui l’invitera quelques années plus tard à participer aux sketches de l’émission 52’ sur la RTS. «Pour le coup, c’était vraiment un rêve de gosse qui se réalisait. Quand j’avais 12 ans et qu’on me demandait ce que je voulais faire dans la vie je répondais « acteur de cinéma comique », parce que j’avais été très marqué par les films de Laurel & Hardy et de Charlie Chaplin. En grandissant, j’aimais faire l’idiot devant les copains et je voyais que j’arrivais bien à capter l’attention. Mais pour mon père, comédien n’a jamais été un métier digne de ce nom. Ça n’a pas été facile.»

La comédie avant tout

Fidèle à ses premières amours, l’auteur ne souhaite pas exclure l’humour de son spectacle, comme lors de la scène où une femme vient visiter le personnage principal. Tout maladroit, tout timide, le pauvre ne sait comment s’y prendre avec elle, ne peut qu’essayer plusieurs approches. Même si les angoisses existentielles auxquelles il se confronte ne disparaîtront sûrement jamais, Antonio Troilo confesse avoir trouvé un endroit qui lui permet d’aborder la vie plus sereinement: l’absurde. Une thématique très présente au théâtre depuis plus de cinquante ans avec l’émergence d’auteurs comme Samuel Beckett ou Eugène Ionesco, deux dramaturges dont l’écriture a beaucoup influencé l’Yverdonnois.

A l’approche de la première, Antonio Troilo ne cache pas le plaisir qu’il éprouve à jouer dans sa ville natale. «C’est ici que j’ai grandi. Quand j’étais jeune, il y a avait encore un côté très alternatif à Yverdon. Des punks, des gens qui se revendiquaient du mouvement new wave, il y avait un brassage culturel que je n’ai pas retrouvé ailleurs. En tout cas, je trouve que cette ville ne mérite pas la mauvaise réputation qu’elle conserve au-delà de ses murs.»


Infos pratiques

Où voir le spectacle? 

Au théâtre de l’Echandole à Yverdon-les-Bains le jeudi 30 novembre et le vendredi 1er décembre à 20h30.

Au théâtre du Pré-aux-Moines à Cossonay le jeudi 25 janvier 2024 à 20h.

Textes: Dimitri Faravel