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Un an pour convaincre
Thaïs Hurni n'a foulé la pelouse synthétique de la Stockhorn Arena que lors de l’échauffement, mardi soir. © Gabriel Lado

Un an pour convaincre

17 avril 2021 | Edition N°2934

Football – Euro Féminin - La Suisse a validé son ticket pour l’Angleterre, mardi à Thoune (2-1 tab), mais les Nord-Vaudoises Sandrine Mauron et Thaïs Hurni n’ont pas joué une seule minute lors des deux matches de barrage contre la République tchèque. Elles ont désormais un peu plus de douze mois pour persuader le sélectionneur Nils Nielsen de leur réserver une place dans l’avion.

«Avoir pu remettre le pied en équipe de Suisse alors que je n’avais pas été appelée depuis presque deux ans, c’est déjà un grand pas. J’ai franchi un nouveau palier depuis que j’évolue à Servette Chênois, j’ai pu élever mon niveau de jeu et cela a stimulé mes performances», analyse Thaïs Hurni. Être régulièrement titulaire dans l’actuel meilleur club de Suisse ne suffit cependant pas forcément pour figurer dans la liste des joueuses convoquées par Nils Nielsen pour les rassemblements de l’équipe nationale féminine.

Car ce double match de barrage qualificatif pour l’Euro 2022 contre la République tchèque, Thaïs Hurni aurait tout aussi bien pu devoir le suivre depuis son canapé: l’Yverdonnoise n’était au départ que de piquet pour ce double rendez-vous, avant que le sélectionneur n’appelle quatre joueuses supplémentaires, début avril, pour pallier l’absence de certains éléments blessés.

«Avec mon petit mètre soixante, je dois prouver au sélectionneur que je peux compenser ma taille par ma technique et mes déplacements.» Thaïs Hurni

Un scénario qu’a également vécu Sandrine Mauron, pourtant régulièrement sur le terrain lors des matches de l’Eintracht Francfort, mais qui a dû observer quatre semaines de repos en fin d’année, touchée au ligament interne d’un genou. Pour être de la partie en Angleterre lors de l’Euro 2022, les deux Nord-Vaudoises devront prouver qu’elles méritent leur place sur la liste aux côtés de joueuses telles que Lia Wälti (Arsenal), Sandy Maendly (Servette Chênois) ou encore Luana Bühler (Hoffenheim).

«Pour avoir une chance de participer à l’Euro, ce sera important que je joue en club pour garder le rythme, et que je sois constante dans mes performances, note Sandrine Mauron. Après, cela dépend aussi du sélectionneur, car le style de jeu que Nils Nielsen cherche fait que j’ai peu eu ma chance avec lui jusqu’à présent.» La joueuse de Valeyres-sous-Montagny bénéficiait en effet de plus de temps de jeu en équipe nationale lorsque celle-ci était dirigée par Martina Voss-Tecklenburg, alors même que la demie de 24 ans évoluait encore au FC Zurich. «Le niveau est plus élevé à Francfort, et pourtant, j’ai aussi réussi à m’y faire une place. Mais je ne suis pas trop dans le viseur de Nils Nielsen, je n’ai jamais été du premier coup dans les 23, j’ai toujours été rappelée par la suite.»

Pas retenue par le sélectionneur suisse Nils Nielsen pour le match retour contre la République tchèque, Sandrine Mauron a passé sa soirée dans les tribunes, mardi. © Gabriel Lado

Pour Thaïs Hurni, qui réalise une très belle saison avec Servette Chênois, pas question d’aller tenter sa chance à l’étranger l’an prochain. «Jouer à Servette donne une grande visibilité. Ce serait bête de partir maintenant, alors que j’ai encore une année de contrat avec le club et que j’y ai de bonnes chances de pouvoir me montrer, glisse la défenseuse centrale de 22 ans. Après, avec mon petit mètre soixante, je dois prouver au sélectionneur que je peux compenser ma taille par ma technique et mes déplacements. Et il y a aussi une question de feeling avec l’entraîneur. Par exemple, Luana Bühler a été convoquée en équipe de Suisse en même temps que moi au début, mais Nils lui a laissé sa chance. Et si elle était un peu moins sûre les premiers temps et qu’elle a fait quelques bourdes, c’est désormais l’une des patronnes de la sélection nationale.»

Alors en un an, tout est possible, Thaïs Hurni en est convaincue. «C’est chouette de se dire qu’on a le temps pour progresser, que ce n’est pas une échéance qui tombe dans trois ou quatre mois, car dans ce cas, ça aurait été un peu court. Et disputer l’Euro dans un pays qui vit et respire foot, c’est le top!» «Participer à un Euro, jouer dans des stades pleins, c’est une expérience incroyable. Alors quand celui-ci a en plus lieu en Angleterre, où le foot féminin est en train d’exploser, on a forcément envie d’y retourner», abonde Sandrine Mauron, qui faisait partie de la sélection nationale lors de l’Euro 2017. Et Thaïs Hurni de glisser: «D’autant plus que derrière, il y a le Mondial 2023 (ndlr: dont les qualifications pour les équipes européennes débuteront cet automne) en Australie et en Nouvelle-Zélande. Qui n’a pas envie d’aller là-bas?»

Plus de stress en tribune que sur le terrain
Pas évident de suivre une rencontre avec un enjeu aussi important que celui de mardi depuis le bord du terrain. «Quand tu es dans les tribunes, tu stresses encore plus, car tu ne peux rien faire pour l’équipe à part l’encourager, souligne Sandrine Mauron. C’est devenu tendu après le 0-1, car on savait qu’il fallait absolument marquer pour au moins essayer d’aller en prolongations.»

«C’est fou, mais j’ai eu un très bon sentiment durant toute la journée, mardi, du coup j’étais calme en première mi-temps, raconte Thaïs Hurni. Et après le but des Tchèques, quand j’ai vu qu’il y avait une réaction et qu’on revenait à égalité, je me suis dit c’est bon, c’est ce qu’il nous fallait. Je ne sais pas pourquoi il faut qu’on en prenne un pour réagir, mais c’était déjà le cas au match aller.» La tension de l’Yverdonnoise est ensuite montée en prolongations, la faute en partie à Sandy Maendly, sortie peu avant l’heure de jeu. «Elle a stressé tout le monde en prolongations, c’était une vraie pile électrique», rigole Thaïs Hurni, qui côtoie également la milieu de terrain à Servette Chênois.

Et la nervosité est encore montée d’un cran lors de la séance de tirs au but, quand les Suissesses ont manqué leurs deux premières tentatives. «Heureusement que Gaëlle (ndlr: Thalmann, la gardienne suisse) a réussi à prendre les choses en main, salue Sandrine Mauron. En déviant le quatrième penalty des Tchèques sur le poteau, elle nous a redonné de l’espoir, et quand on a entendu le bruit de la transversale sur leur dernier tir… On ne réalise encore pas trop, mais c’est beau de se dire qu’on a fait partie du groupe qui est parvenu à décrocher sa qualification pour l’Euro 2022 au bout du dernier match!»

Muriel Ambühl