Un engagement profond pour le Fort
16 août 2024 | Texte et photos: Jean-François ReymondEdition N°3768
Président de la Fondation du Fort de Vallorbe, Jean-Michel Charlet a consacré plus de trente ans de sa vie au service de ce lieu militaire emblématique.
Le Fort de Pré-Giroud se cache discrètement au-dessus de Vallorbe, sur une terrasse qui domine le col de Jougne, passage frontalier entre la Suisse et la France. Construit, mais surtout creusé entre 1937 et 1941, cet édifice avait un effet stratégique évident de défense contre l’invasion d’une armée étrangère en direction de la Suisse. En 1945, en plein conflit, ce fort a abrité plus de 200 soldats en faction aux canons d’artillerie dans les cinq cellules différentes reliées par de longues galeries à la caserne centrale située à 50 mètres de profondeur.
Classé secret militaire, le lieu est tombé dans l’oubli jusqu’en 1988, au moment où l’armée s’est séparée de ce genre d’ouvrages de défense devenus obsolètes. C’est la Fondation privée du Fort de Vallorbe, tout juste constituée, qui le rachète. Le but est de l’ouvrir au public pour des visites. Et cela a été une véritable aventure… C’était le premier fort militaire suisse qui est devenu touristique, alors qu’il y en a 58 aujourd’hui.
Entrer dans l’aventure
C’est là que Jean-Michel Charlet, natif de Vallorbe, entre dans cette aventure… Même un peu avant, en 1986, il est conseiller communal et devient membre de la commission nommée pour l’ouverture du fort. En tant qu’officier premier-lieutenant et fusilier de montagne, il était l’homme de la situation. « J’ai été embrigadé de force ! », se plaît-il à commenter avec humour… Et ça continue, à la constitution de l’Association des Amis du Fort de Pré-Giroud, il est recruté comme membre du comité avant de se retrouver vive-président durant seize ans.
C’est ensuite à la Fondation du Fort de Vallorbe qu’il entre au comité en 2003. Le président de l’époque, Gérard Jaillet, décède en 2005. Jean-Michel Charlet prend sa succession en 2006 et en assume la présidence depuis 18 ans déjà ! Et quand on lui dit amicalement qu’il est vraiment « l’âme du fort » , il rétorque avec modestie que c’est grâce à une équipe soudée et fidèle que le site entame sa 36e saison d’ouverture.
« Il faut être passionné pour ça »
Jean-Michel Charlet explique ensuite que sa fonction n’est pas de tout repos… Il y a de nombreux problèmes d’entretien à résoudre comme l’humidité notoire partout dans les galeries et les locaux dont la température constante se situe autour de 8 degrés. Et le vénérable ascenseur d’origine, la colonne vertébrale de l’ouvrage, dont il a fallu changer les câbles en 2022. La Fondation entretient, en plus, une quinzaine de fortins secondaires situés dans la région comprise entre Le Day, Ballaigues, et le massif du Suchet. « On en ouvre temporairement certains pour des visites de groupes sur demande » , précise-t-il
« En plus d’entretenir, il faut savoir aussi se renouveler et animer le lieu. Avec notre équipe actuelle de dix guides, par ailleurs pas faciles à trouver, il faut attirer un potentiel de nouveaux visiteurs, surtout de l’extérieur. Nous avons entièrement repensé notre exposition intérieure en lui donnant une allure moins militaire, en insistant sur les réfugiés civils et les internés. Des réjouissances gastronomiques sont aussi agendées (ndlr : lire ci-dessous). »
Et cet officier aux mille jours de service dans les forts de Savatan et Dailly, «prisonnier » de l’ambiance fermée des forteresses, de conclure : « En tant que dernier survivant des membres qui ont créé tout cela, je n’ai qu’un espoir, celui d’assurer la continuité en mémoire de ces pionniers garde-fort. Il faut perdurer et montrer avec fierté ce que nos ancêtres ont accompli pour la défense de notre pays ! »