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Un popiste de Montreux rejoint l’UDC d’Yverdon
Cédric Marsens. Duperrex-a

Un popiste de Montreux rejoint l’UDC d’Yverdon

31 décembre 2024 | Textes: Jérôme Christen | Photo: Michel Duperrex
Edition N°3861

Cédric Marsens, ancien président du Parti Ouvrier Populaire (POP) Riviera, est désormais établi à Yverdon et a rejoint les rangs de l’UDC locale. Une transition qui peut surprendre.

Cédric Marsens a toujours baigné dans la politique. Il a grandi à Lausanne dans un milieu ouvrier. Son grand-oncle était maçon d’une famille d’ouvriers du Pays-d’Enhaut, militant du syndicat FOBB. Son grand-père était même le chauffeur du conseiller fédéral Paul Chaudet. «Mais mon aïeul n’était pas de tendance radicale!» précise-t-il aussitôt. «Déjà tout petit, je parlais politique à la maison avec ma maman et ma sœur et j’ai rapidement milité pour le POP, fréquenté la Maison du peuple et soutenu deux figures popistes locales telles que Josef Zisyadis et Marc Vuilleumier, devenus respectivement conseiller d’Etat et municipal par la suite.

Pirate, avant de rejoindre le POP

D’abord formé comme monteur-électricien, Cédric Marsens est devenu photographe après avoir suivi l’école d’arts visuels à Sierre. Arrivé à Montreux il y a 20 ans, il a d’abord commencé à tenir des stands sous l’étiquette du Parti Pirate tout en restant fidèle à ses convictions de gauche. Certains ayant un profil trop à droite, il a fini par décider de fonder le POP Riviera – dont les heures de gloire remontent à l’après-Seconde Guerre mondiale.

Ce mouvement n’a toutefois jamais trouvé un succès suffisant dans les urnes pour former un groupe d’élus communaux. Principalement en raison de la présence sur la Riviera d’un fort mouvement de gauche alternative, comme il en existe d’ailleurs un à Yverdon-les-Bains avec Solidarité & Ecologie. En 2021, Cédric Marsens a fini par se présenter comme popiste sur la liste du PS et est entré au Conseil communal en 2022, faisant partie des «viennent-ensuite».

C’est notamment la pandémie Covid qui a provoqué sa rupture avec le POP Vaud. «Alors que j’étais membre du comité central, j’ai participé à une manifestation du mouvement opposé aux mesures sanitaires où j’ai rencontré Ruben Ramchurn et d’autres militants de l’UDC d’Yverdon. J’y ai été présenté publiquement comme président du POP Riviera. Cela s’est su et j’ai été convoqué à la Maison du Peuple à Lausanne où j’ai reçu une volée de bois vert, que j’ai peu goûtée. Pour moi, la politique, ça ne doit pas être du dogmatisme, mais un échange d’idées. Cela faisait déjà un moment qu’il n’était plus possible de sortir de la ligne du parti. Les anciens ont été remplacés par des plus jeunes qui sont plus fermés. S’il faut constamment s’aligner, la politique n’a plus d’intérêt. Suivre le petit livre rouge de Mao, ce n’est pas ma tasse de thé.»

C’est aussi à ce moment-là que Cédric Marsens a ressenti le besoin de quitter la Riviera. «Montreux, c’est un esprit très villageois, il n’y a aucune discrétion, on y est constamment observé. J’aurais voulu m’installer à Lausanne où vivent mes parents et ma famille. Mais c’est très compliqué d’y trouver un logement et c’est finalement à Yverdon que j’ai trouvé un appartement grâce à un ami.»

«Les extrêmes se rejoignent»

Arrivé à Yverdon, il ne se sentait pas l’énergie de relancer un mouvement tout seul, de repartir de zéro et de refaire le même cheminement que sur la Riviera: «J’aurais bien adhéré à un mouvement libre ou indépendant, mais il n’en existe pas à Yverdon. Or, il se trouve qu’à Montreux, j’avais déjà des affinités avec l’UDC. Je ne suis pas en accord avec certaines de leurs positions, mais avec une grande partie de leur programme. Les idées se ressemblent beaucoup. Ne dit-on pas que les extrêmes se rejoignent?»

Cédric Marsens dit adhérer à leur position sur le trafic de drogue de rue: «Cette vente dans un lieu public qui attire des toxicomanes près d’un parc où jouent des enfants n’est pas admissible. Dans les trains, c’est comme à l’époque où les employés CFF passaient dans les wagons avec leurs chariots pour demander si on voulait quelque chose à manger ou à boire. Maintenant, on nous demande ce que nous voulons comme drogue… C’est devenu une zone de non-droit.»

Mieux défendre les milieux ouvriers

A l’instar des alternatifs, les popistes ne se préoccupent plus de la vie de «monsieur et madame Tout-le-Monde» estime Cédric Marsens. A l’instar du député François Ruffin en France, il dénonce une gauche radicale qui ne défend pas assez les milieux ouvriers: «Il n’y en a que pour la Palestine, l’Ukraine et toutes sortes de minorités. Il y a des gens qui vivent ici, qui travaillent ici, qui ont envie de sortir de chez eux sans se faire proposer des substances illicites. Ils oublient ceux qui se préoccupent d’avoir quelque chose dans leur assiette quand ils rentrent chez eux le soir.»

Même si son cœur reste à gauche, à Yverdon comme à Montreux, Cédric Marsens dit avoir désormais plus d’accointances avec l’UDC qu’avec une gauche dans laquelle il dit ne plus se reconnaître.


Le POP est un parti démocratique!

Luca Schalbetter, président du POP Vaud et conseiller communal à Yverdon réagit ainsi au «transfert» de Cédric Marsens et à ses critiques: «Le POP est une organisation démocratique, qui fonctionne avec des instances élues et des décisions prises à la majorité des assemblées. Tous les membres sont évidemment libres de participer aux débats, mais comme partout, on ne peut pas toujours être en accord sur tout.»
Le popiste yverdonnois ajoute que «chaque personne est libre d’entrer et de sortir du parti quand elle le souhaite. Cédric a bien fait de partir s’il ne s’y sentait plus à l’aise. Ses critiques doivent être adressées à la gauche comme camp politique large, car au POP, nous tenons fermement à rester une gauche authentique et populaire, représentée par des gens de la base, et qui s’adresse à la majorité de la population, au monde du travail, sur ce qui la rassemble, les questions de conditions de travail, de coût de la vie, etc. Et nous n’avons jamais fait de la sécurité un tabou. Le droit à la tranquillité doit être garanti, particulièrement dans les quartiers populaires.»
Il conclut en relevant «qu’il est juste curieux d’ensuite adhérer à un parti dirigé par des milliardaires, très proche du grand patronat et des assureurs de ce pays. Mais les transferts politiques semblent à la mode à Yverdon.»