Avec l’acquisition des téléréseaux de la région de Grandson, la compagnie consolide sa position dans le Nord vaudois.
«C’est un juste retour des choses.» Syndic de Grandson, François Payot commente ainsi la reprise des téléréseaux de la région par VOénergies. En effet, il y a une douzaine d’années, lorsque les téléréseaux des onze communes allant de Concise à Suscévaz ont été mis en vente, les actionnaires ont clairement privilégié le candidat qui offrait le meilleur prix. «Il faut dire que nous avions des actionnaires privés et ceux-ci avaient un intérêt financier peut-être plus marqué que celui des collectivités», explique l’élu. Les téléréseaux ont donc fini dans l’escarcelle du groupe bâlois EBL.
Pourquoi le propriétaire a-t-il décidé de s’en défaire? «C’est une décision stratégique de notre conseil d’administration», commente Adrian Koessler, porte-parole d’EBL. Cette décision en annonce-t-elle d’autres, soit un retrait organisé de Suisse romande? «Ce n’est pas le cas. D’ailleurs, nous avons un bureau à Avenches», conclut le porte-parole.
Pourtant, dès la reprise des téléréseaux de la région de Grandson, la compagnie bâloise, qui est aussi très active dans le domaine de l’énergie et en particulier du chauffage à distance, n’a cessé de faire des offres à sa clientèle et, ces dernières années, un véritable bouquet, au gré d’un partenariat conclu avec UPC Cablecom, a été proposé.
Mais le succès, même si la compagnie bâloise ne dit rien sur ce point, a dû être limité. Il faut dire qu’en matière de vente, la clientèle locale devait s’adresser à un bureau situé à Delémont. Par ailleurs, la concurrence sur ce marché est rude, non seulement avec Swisscom, mais aussi des acteurs régionaux, tel VOénergies.
On ne peut toutefois s’empêcher de constater que la stratégie d’EBL dans le Nord vaudois a été hésitante. Même dans le domaine de l’énergie. En effet, l’installation de chauffage à distance (CAD) construite par Grandson en partenariat avec Romande Energie – elle alimente, entre autres, le nouveau Centre sportif de Borné-Nau – aurait dû l’être par EBL, qui a par ailleurs réussi à pénétrer le marché dans la Broye et la région d’Oron.
En ce qui concerne les téléréseaux de la région de Grandson, leur acquisition par VOénergies est saluée très positivement par les acteurs locaux. «Lorsque nous avons été approchés par EBL, nous avons demandé à ce que ce partenaire soit privilégié», explique François Payot. Non pas parce que les communes avaient quelque chose à se faire pardonner, mais tout simplement parce qu’elles avaient leur mot à dire. En effet, lors de la transaction passée avec EBL à l’époque, le contrat prévoyait un droit d’emption en faveur des collectivités publiques dans le cas où la société bâloise décidait de revendre les téléréseaux.
Dès la décision du conseil d’administration prise, l’entreprise bâloise a donc logiquement contacté les anciens propriétaires. Les collectivités publiques ont décliné l’offre, mais certaines d’entre elles n’ont pas caché qu’elles verraient d’un bon œil la reprise des téléréseaux par un acteur régional de référence… En son temps, la direction de VOénergies n’avait pas caché sa déception.
Directeur général de VOénergies, Christian Tinguely se réjouit du résultat de la transaction, dont le montant reste confidentiel. «Nous allons investir pour moderniser les téléréseaux», assure-t-il. L’intégration s’effectuera par étapes. En effet, les abonnés qui disposent du bouquet UPC ne subiront pas de changement dans l’immédiat. «Nous devons respecter les contrats jusqu’à la fin de cette année», précise le directeur de VOénergies. Passé ce délai, la compagnie nord-vaudoise proposera son bouquet. A ce stade donc, les contrats sont repris tels quels et cette opération n’occasionne aucun changement pour la clientèle.
Soixante communes désormais desservies dans la région
Avec l’acquisition des téléréseaux de la région de Grandson, VOénergies dessert désormais une bonne soixantaine de communes de Concise à la région de La Sarraz et conforte sa position d’opérateur multimédias bien au-delà de son bassin d’origine, la vallée de l’Orbe.
VOénergies est née de la fusion des compagnies électriques du Châtelard (Vallorbe) et des Usines de l’Orbe (Orbe). Des métiers d’origine, liés à l’électricité, elle a diversifié ses activités avec la distribution du gaz et les services de télécommunication (télévision, internet, téléphonie fixe et mobile) dans le Nord vaudois.
A l’instar de sa grande sœur Romande Energie, qui a débuté ses activités par l’exploitation de la force électrique dans la même région, VOénergies dispose d’un actionnariat solide et stable, constitué à majorité par des collectivités publiques, qui détiennent les deux tiers du capital.
Ils voulaient acheter VOénergies…
A l’annonce de l’acquisition des téléréseaux de la région de Grandson, un visage s’est illuminé d’un large sourire. Celui de Claude Madörin, ancien patron de VOénergies. A l’époque, il avait ressenti le choix d’EBL comme un crève-cœur: «Nous étions sûrs d’emporter l’affaire. Nous avions pratiquement l’assurance des syndics de Grandson et de Concise. Je ne sais pas ce qui s’est passé, mais finalement, c’est EBL qui a été choisie. Je suis originaire de Bâle-Campagne, et je peux vous dire que cela m’a fait mal.»
Mais les dirigeants de VOénergies n’en sont pas restés là. «On se demandait comment ils allaient piloter des téléréseaux depuis Liestal. Avec Claude Recordon – alors syndic d’Orbe et président de VOénergies – nous avons décidé d’aller les trouver. Non seulement nous avons été déçus du résultat de notre démarche, mais en plus ils voulaient nous acheter! Nous avons décidé d’en rester là. Il n’y avait plus qu’à attendre que le vent tourne en notre faveur», témoigne Claude Madörin.
Et le vent a fini par tourner. Difficile en effet de gérer ce type d’affaires à distance. C’est sans doute le constat réalisé, au terme d’une longue expérience, par le conseil d’administration d’EBL.