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YS relégué: l’échec d’une politique
Tout le désarroi du capitaine William Le Pogam. GABRIEL LADO

YS relégué: l’échec d’une politique

26 mai 2025 | Textes: Manuel Gremion
Edition N°3949

YS n’a pu échapper à la relégation, au terme de sa deuxième saison dans l’élite. La direction en porte une grande partie de la responsabilité.

Les joueurs se tiennent debout, hagards, face aux supporters du Kop 14, à partager un dernier au revoir cette saison. Malgré la victoire 3-2, jeudi contre Zurich, ils ont failli. Yverdon Sport n’a jamais tenu plus de deux saisons dans l’élite du football suisse. Il n’en a pas été autrement cette année. Le président Jamie Welch et le président du football Jeffrey Saunders ont rejoint l’équipe devant les fans. D’autres, comme Paul Bernardoni, peinent visiblement à digérer l’échec, tantôt la tête dans les mains, tantôt les yeux en direction du ciel. Le coup est terriblement dur à encaisser.

Petit club de Super League, petit budget, Yverdon Sport faisait forcément partie des potentiels suspects pour une relégation. Comme Grasshopper et Winterthour, d’ailleurs. Mais voilà, à la lecture du classement à la mi-mars, quand les Verts comptaient encore 12 points d’avance sur «Winti», finalement sauvé avec un point de mieux qu’YS, et 5 sur GC, qui a obtenu le droit de défendre sa place lors des barrages contre Aarau grâce à son goal-average, les regrets sont vifs.

Cet échec est celui de l’équipe, oui, mais avant tout celui de toute une politique. Celle du trading, instaurée par la direction sportive – incarnée par Jeffrey Saunders et Filippo Giovagnoli – arrivée à la tête du club il y a deux ans, lors de la promotion d’YS: trop de changements, pas assez d’ancrage local, voire national, trop de paris manqués, le départ de Kevin Carlos jamais compensé en matière d’efficacité devant le filet. Cela fait beaucoup.

La douleur prédominait au soir de la sentence. William Le Pogam racontait la sienne: «C’est vraiment difficile, peut-être encore plus pour ceux qui ont eu la chance de connaître les promotions.»

Les Yverdonnois n’ont pas connu beaucoup de bons moments en première partie de championnat. Cela a été mieux après la trêve hivernale, avant le très gros trou d’air des deux derniers mois. Le tour final a mal été négocié. «Comme on dit souvent, une saison est un marathon. Si on en est là, c’est qu’on n’a pas fait tout juste tout au long de l’exercice», analysait le latéral, avant de regretter les deux premiers matches du tour final à domicile, au terme desquels l’équipe n’a obtenu que deux points, n’ayant à chaque fois été à la hauteur qu’une seule mi-temps durant.

Il n’a, au final, vraiment pas manqué grand-chose. Un point ici, un but là… De quoi aviver les regrets. «J’espère que ça va servir de leçon, que ce soit aux joueurs ou même à la direction, admettait très franchement le capitaine. Il s’agira de se servir de ces moments difficiles pour repartir de la meilleure des façons.»

«On descend tous ensemble»

Tandis que Winterthour, qui mise sur une identité bien plus helvétique, s’est maintenu, la formule yverdonnoise, très cosmopolite, souffre la comparaison. La relégation est l’échec d’un système. «Pas forcément, contre l’auteur du 2-0. Comme je l’ai souvent répété, la chance qu’on a eue ici, c’est qu’on a toujours formé un supergroupe, avec de supergars. Certes, il est vrai que changer pas mal de joueurs chaque année requiert du temps pour que la sauce prenne, pour que chacun se sente comme à la maison. Après, ça fait partie du job. On est amenés, même en étant sous contrat, à devoir partir, à être prêtés. C’est à nous de nous adapter. Je pense qu’il s’agit d’un échec global, de nous, sur le terrain, et de la direction, qui n’a pas fait tout juste non plus. On ne va pas viser qui que ce soit en particulier: on est montés tous ensemble, on descend tous ensemble.» Le message résonne comme celui d’un capitaine.

Un homme qui affirme que, malgré la culbute, il aurait grand plaisir à pouvoir honorer sa dernière année de contrat à Yverdon. «C’est mon club de cœur. J’espère une dernière danse avec ce club et, pourquoi pas, créer une surprise.»

William Le Pogam représente beaucoup de tout ce dont YS aurait eu besoin, en plus grande quantité, afin de se maintenir, et ce dont il aura besoin pour rebondir. Une opportunité autant qu’un défi.


Des contrats et des contraintes

Qui va rester, qui va s’en aller? Inévitablement, une relégation implique de nombreux changements dans l’effectif de la saison prochaine, aussi pour des raisons réglementaires.

A l’heure actuelle, sans connaître les éventuelles clauses d’annulation en cas de relégation dans les contrats de chaque joueur, les footballeurs suivants ont encore un bail valable avec Yverdon Sport pour la saison prochaine au moins: Paul Bernardoni (2026) comme gardien; Djibril Diop (2027), Mohamed Tijani (2027), Vegard Kongsro (2027), William Le Pogam (2026) en défense; Jason Gnakpa (2027), Cristian Nuñez (2026), Moussa Baradji (2026), Magnus Grodem (2026) à mi-terrain; Antonio Marchesano (2026), Marley Aké (2027), Mauro Rodrigues (2027), Hugo Komano (2026), Aimen Mahious (2026, il a été prêté cette saison), Jessé Hautier (2026, il a été prêté cette saison) et Mitchy Ntelo (2027) en attaque.

Parmi eux, de nombreux joueurs qui n’ont pas été formés localement (non HTP). Or, si 17 éléments non HTP étaient autorisés sur un contingent de 25 noms qu’il est autorisé d’inscrire en Super League (les joueurs M21 formés localement ne sont pas comptés), le règlement de la Challenge League est bien plus restrictif: en deuxième division, un club ne peut placer que 9 joueurs non HTP dans son effectif (7 sur la feuille de match), pour un contingent de 21 hommes (toujours sans compter les M21 formés localement). Enfin, les joueurs étrangers (non européens) sont limités à 3 seulement.

C’est dire s’il y aura de nombreux dossiers à résoudre pour bâtir l’effectif de la prochaine saison. Une connaissance du sérail suisse est primordiale et le laps de temps très court, avec la reprise du championnat prévue le 25 juillet.


L’échec Paolo Tramezzani

Recruté pour ses capacités à transmettre son énergie à son équipe, Paolo Tramezzani n’est pourtant pas parvenu à sauver Yverdon Sport de la relégation. Au même titre qu’il n’y était pas arrivé avec le FC Sion en 2023.

Le technicien italien n’a pas fait tout faux. A son arrivée, son équipe a effectivement montré un bien meilleur visage que celui affiché en fin d’année 2024, quand les Verts alors dirigés par Alessandro Mangiarratti ne présentaient absolument plus rien sur le plan offensif et se retrouvaient en péril, bien qu’encore au-dessus la barre (10es).

Le message d’«Il Tram» est d’abord passé: un YS de nouveau apte à se projeter vers l’avant, à créer régulièrement du danger. Un YS meilleur à l’extérieur aussi. Un YS qui s’est tout bonnement remis à faire des points. C’était à la fois mieux dans le jeu et, également, au totomat.

Deux derniers mois et une série de neuf matches sans victoire ont toutefois mis abruptement fin à l’idylle naissante. A l’heure de tirer le bilan, se trouvent plusieurs pierres dans le jardin de Paolo Tramezzani.

Le Mister n’a jamais été capable d’inverser la tendance depuis fin mars, même si son équipe aurait mérité des points supplémentaires à quelques reprises. Il a clairement payé sa gestion de l’effectif, accordant sa confiance à un groupe très (trop) restreint de joueurs. Les autres, privés de minutes de jeu, n’ont pas su répondre présent lorsque les événements – blessures et suspensions – ont poussé le coach à les réutiliser. On pense à ce match charnière au Letzigrund, contre GC, de la 36e journée, alors que Varol Tasar est blessé, un véritable coup dur pour YS: Ronaldo Tavares, qui n’avait plus compté depuis deux mois aux yeux du coach, n’a pas su retenir son enthousiasme, emporté par son désir de bien faire. Il a été expulsé après 4’30  de jeu, déjà averti une deuxième fois.

Le problème Cespedes

Le cas le plus incompréhensible, et impardonnable, demeure celui de la mise à l’écart de Boris Cespedes. Comment l’entraîneur a-t-il pu se priver volontairement du joueur le plus décisif – dans les moments chauds, devant le but adverse malgré son statut de demi défensif, et même sur sa propre ligne de but cette saison – d’Yverdon, une équipe à la fois en mal de buteur et à la lutte pour le maintien?

Là où Uli Forte a réussi avec les honneurs sa mission sauvetage à la tête d’un FC Winterthour qui a fini fort dans le money time, Paolo Tramezzani a tout bonnement échoué. Dans ces conditions, difficile d’imaginer qu’il soit encore sur le banc d’YS à la reprise.


commentaire

Apprendre des erreurs commises

Yverdon Sport annonçait, jeudi soir, après la défaite – à défaut que Jamie Welch ou un autre membre de la direction prenne la parole –, qu’un communiqué serait transmis le lendemain. Dans lequel le président et propriétaire allait réaffirmer son engagement pour le club.

On ne doute pas de l’attachement que porte le Texan né en Australie à YS. Il le démontre depuis deux ans par les importants investissements consentis et par sa présence très régulière aux matches, malgré les déplacements.

A leur arrivée, les investisseurs ont placé leurs hommes. Une manœuvre attendue. Le manager général de l’époque, Marco Degennaro, l’avait d’ailleurs bien compris, la qualifiant de logique et normale. Les Américains ont toutefois sous-estimé l’importance de s’appuyer sur plus de personnes du sérail, au fait des réalités du football suisse, et au réseau national établi. Les campagnes de transferts en témoignent.

On dit Jamie Welch très conscient des erreurs qui ont été commises. Intelligent, on a bon espoir que l’homme saura en tirer les enseignements et remettre de l’ordre dans ses équipes.  Manuel Gremion

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