Choix du projet de Musée entaché d’opacité
9 octobre 2009Plutôt que de respecter le principe de transparence qu’il avait lui même posé, le Gouvernement vaudois a fait preuve d’une précipitation incompréhensible pour choisir, contre l’avis des experts, le site de la halle des locomotives à Lausanne pour le futur Musée des Beaux-Arts.
Pourquoi ce choix et tant de précipitation? Dix jours après la décision du Conseil d’Etat vaudois sur l’implantation du futur Musée cantonal des Beaux-Arts, la population et le monde politique s’interrogent. Le Gouvernement, qui avait posé des règles très claires en matière de procédure, les a changées en cours de route pour finalement décider et communiquer sa détermination dans l’urgence, la presse ayant été convoquée dans l’heure. A cette interrogation s’ajoutent d’autres, relayées notamment par le député socialiste yverdonnois Olivier Kernen et son collègue radical de la Côte Olivier Feller, qui viennent d’interpeller le gouvernement.
Au nom de ce principe de transparence, La Région Nord vaudois a décidé de publier, dans son édition du jour, les grilles du groupe de travail au terme de la procédure d’évaluation «Albatros» pour les quatre sites finalistes, soit Yverdon-les-Bains, Morges (La Prairie), et Lausanne (Musée Cité/Riponne, et halle aux locomotives des CFF). Ces grillles sont le résultat d’un minutieux travail du groupe d’évaluation (33 personnes), qui s’est lui-même appuyé sur les compétences d’un groupe technique composé de neuf experts.
Yverdon avait le meilleur projet
Les notes données par les membres du groupe d’évalutation tiennent compte des remarques des experts et y ajoutent un élément subjectif. Cette méthode «Albatros» aboutit à une couleur dominante. Le vert indique qu’il n’y a aucun obstacle, le jaune traduit des inconvénients ou problèmes qu’il est possible de résoudre, le rouge marque de sérieuses difficultés.
Une simple lecture de cette grille démontre que le projet présenté par la Ville d’Yverdon-les-Bains est le seul à ne comporter que la couleur verte. Autrement dit, au terme de l’évaluation «Albatros», c’est indiscutablement le meilleur projet.
La composante politique
A ce stade, il manque encore la composante politique, le projet choisi n’étant pas toujours le meilleur. Cela ressort, entre autres, lors des concours d’architecture. Ce qui est étonnant dans cette affaire, c’est la tournure des événements. En effet, après le premier tour, les auteurs des quatre premiers projets sont invités à répondre à un certain nombre de questions complémentaires. On notera au passage que la Commune de Lausanne n’a même pas répondu dans le délai imparti… C’est aussi à partir de ce moment-là que le Conseil d’Etat déroge au principe de la transparence. Pourquoi? Les ministres ont-ils été surpris par les résultats de la procédure d’évaluation? Le Gouvernement devra bien, à un moment ou un autre, répondre à ces questions.
La délégation du jury, accueillie par le Conseil d’Etat mercredi de la semaine dernière, a clairement donné sa préférence au projet de la Riponne (Musée Cité). Préférence que la municipale Lausannoise Silvia Zamora, au nom de l’Exécutif de la capitale, a elle aussi signalée dans sa lettre du 23 septembre, parce que ce projet «s’inscrit dans une vision urbanistique cohérente en relation avec la requalification de la place de la Riponne et les activités culturelles du site». A l’évidence, les autorités lausannoises devaient tenir compte du résultat du scrutin de février dernier, le projet de Bellerive ayant été sabordé par les partisans de la Riponne.
Et voilà que, dans les minutes qui suivent, le Gouvernement opte pour la halle CFF. Une décision surprenante, mais qui ne déplaît sans doute pas à la Municipalité de Lausanne.
«Le Conseil d’Etat voulait ouvrir les possibilités au reste du canton. C’est d’ailleurs Yverdon qui a allumé la mèche en se proposant rapidement. Le Gouvernement, suivant le postulat de Gabriel Poncet, a décidé que l’évaluation se passerait sous l’égide d’Albatros. Je suis surpris de cette fin en eau de boudin. Je suis favorable à la création d’un Musée des Beaux-Arts. Si on préconise la transparence, il faut alors expliquer ce choix. Si on nous avait donné les considérants après l’évaluation Albatros, on aurait mieux compris la décision», explique le député yverdonnois Olivier Kernen, qui attend avec intérêt les explications du Conseil d’Etat.