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Deux villages préparent leurs fiançailles

12 décembre 2019 | Edition N°2644

 

Afin que leurs voix ne comptent plus pour des prunes vis-à-vis des localités voisines, les organes délibérants de Bonvillars et d’Onnens ont accepté d’étudier la faisabilité d’une fusion de communes, lundi.

D’un côté, il y a l’écrevisse rouge à une pince d’Onnens. Et de l’autre, une croix bleu, coiffée de trois étoiles de la même couleur, sur un fond blanc. Mais peut-être qu’à l’avenir, ces deux armoiries n’en formeront plus qu’une, tricolore. Les Municipalités des deux villages ont effectivement proposé à leur organe délibérant respectif de réfléchir à une fusion. Chaque commune a accepté à une large majorité d’investir un total de 20 000 francs pour entamer une étude de faisabilité, lundi soir.

Bonvillars, 30 novembre 2017. Route du Tertre. © Michel Duperrex

«Pourquoi est-ce qu’on veut le faire? En premier lieu, c’est parce qu’on a toutes les deux des difficultés à renouveler nos Exécutifs», a expliqué le syndic d’Onnens, Alain Portner. Mais ce ne sont pas les seules raisons qui ont poussé les politiciens à se mettre autour d’une table en septembre dernier. Entre les problèmes que ceux-ci rencontrent pour garder leurs écoles ouvertes et leur travail autour de la zone industrielle que se partagent les deux localités, les élus livrent déjà des batailles similaires et entretiennent d’étroites collaborations, mais ils ne possèdent pas encore de stratégie ou de projets communs. «C’était le gros dossier de la séance, assure le syndic de Bonvillars, Frédéric Piguet. Il est passé à l’unanimité moins quatre abstentions. Je pensais bien que le préavis serait accepté, mais je ne m’attendais pas à une si grande unanimité!» Pour l’édile, une fusion permettrait notamment d’atténuer des difficultés liées à la gestion de la zone industrielle. «Elle est appelée à se développer prochainement. Je ne parle pas d’un horizon à six mois, mais à trois ans.»

Le regard tourné à l’ouest

Même si rien ne se jouait lors de cette séance, les élus d’Onnens ont déjà argumenté sur le fond de la démarche. «Dieu sait que je suis favorable à une fusion de communes parce que cela permet de combler un déficit démocratique, mais pourquoi s’unir à Bonvillars?», a attaqué d’entrée de jeu Jean-François Righetti. Avant d’expliquer: «Pour l’avoir vécu, plus on est petit, moins on est entendus dans les associations intercommunales. Mais je ne suis pas sûr qu’on retrouverait nos compétences si on fusionnait avec Bonvillars. Il faudrait au moins s’allier à Champagne pour retrouver un pouvoir de discussion.»

Une piste qui n’a pas été évoquée par les Exécutifs concernés. Il faut dire que le projet d’une fusion entre les communes de Provence, Mutrux, Bonvillars, Onnens, Corcelles-près-Concise et Concise, avorté il y a une dizaine d’années, a laissé quelques cicatrices. «À l’époque, j’étais municipal. J’avais demandé si on pouvait faire un mariage sous le régime de la séparation de biens (ndlr: Onnens et Bonvillars ayant une bonne situation notamment grâce à l’hébergement de Philip Morris). On m’avait répondu non. Après deux ou trois séances de travail, on s’est retirés du projet parce qu’on voyait qu’on ne pouvait pas garder notre capital pour nos travaux, on devait aider les communes qui n’arrivaient pas à tourner», se rappelle le syndic de Bonvillars. «On ne va pas vers n’importe qui, a expliqué Alain Portner à ses conseillers généraux. Là, on a choisi une commune saine.» Le projet de carrière à Concise, sans même parler de l’état de ses finances, ont aussi poussé les autorités «à regarder à l’ouest».

Outre les similarités économiques, topographiques et géographiques, Serge Willenegger, conseiller général à Onnens, a analysé les différences politiques entre les deux communes. «Quand on déplace une frontière, il faut déjà savoir pourquoi elle était là, rappelle-t-il. Sur les cinq dernières années de votations fédérales et cantonales, on constate qu’il y a très souvent des écarts de 10 à 15% d’opinions entre les deux communes. Onnens est plus progressiste que Bonvillars, notamment sur les questions liées à l’immigration et à l’environnement.» Le Nord-Vaudois a aussi identifié six cas où les résultats étaient radicalement différents. «Bonvillars étant une commune un peu plus grande qu’Onnens (ndlr: 495 habitants dans la première nommée en début d’année contre 477 dans la seconde), l’avis de Bonvillars serait dominant.»

Mais la crainte de Serge Willenegger qu’Onnens perde son identité n’inquiète pas les municipaux. «On ne vous propose pas une méga fusion, juste une alliance avec la commune d’à côté pour voir si on ne peut pas faire un peu mieux à deux», a souligné François Julia. Nous n’avons peut-être pas encore de stratégie globale, mais cette vision doit être rêvée à deux plutôt que chacun dans son coin.»

Christelle Maillard