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«Dois-je aller brouter l’herbe dans le pré d’à côté?»
© Michel Duperrex

«Dois-je aller brouter l’herbe dans le pré d’à côté?»

17 octobre 2020

L’autre soir, m’endormant devant les passes en retrait de l’équipe suisse de foot, dont les joueurs, entre parenthèses, devraient profiter dans leur bunker anti-COVID-19, d’apprendre les paroles de l’hymne national, j’ai zappé dans ma télé pour m’immerger dans Infrarouge sur la RTS, comme la rédaction me l’a «gentiment» suggéré. Ça tombe bien, de toute façon la Suisse était en train de perdre en Espagne.

Ainsi ai-je pu m’interroger si j’étais un vrai défenseur du climat, que dis-je, si je me battais vraiment pour sauver la planète… Entre les deux dames vertes, l’une intégriste et l’autre ménageant la chèvre et le chou, je n’ai pas su si je devais continuer à manger, parfois, une côtelette ou aller brouter l’herbe dans le pré d’à côté toujours en stand-by, à 1500 francs le mètre carré!

Bref, que dois-je faire? Liquider ma 2CV et m’acheter un vélo électrique, ou vendre en Afrique mon vieux Previa de 400 000 kilomètres et me ruiner à prendre le train?

Est-ce que je me comporte correctement pour diminuer ma pollution personnelle? En location, dans mon vieux chalet, où les jaquettes chauffent mieux que les radiateurs, les bûches de la cheminée viennent-elles vraiment d’une forêt purifiée, comme le Risoux de mon enfance, quand il fallait remplir deux bidons de myrtilles ou framboises, avant d’avoir droit aux «quatre heures»?

Les douches ne sont pas ma passion, sauf celles à l’intérieur du corps! Et je mange des restes la deuxième moitié de la semaine! Je ne possède aucun gadget asiatique, à part quelques crus importés d’ailleurs…

J’ai eu quelques lubies végétariennes, même si on nous dit que le petit bétail pollue moins que la machine, en broutant nos talus, et en maintenant la biodiversité de nos pâturages. On fait la vaisselle à la main, et les bougies remplacent les spots IKEA. On a été biberonné à l’écologie de l’adolescence, en buvant l’eau de citerne et en remplaçant le papier par des feuilles de gentiane…

Parfois, on s’offre néanmoins un coup de canif dans le contrat, comme disait un prolétaire au bar du Ritz, à Hawaiï: « Il vaut mieux se chauffer au caviar, que de bouffer du charbon! »

En plus, à la fin d’Infrarouge, les deux vertes pâle ou foncée m’avaient purgé psychiquement. Heureusement le match était fini, ce qui m’a évité une dépression! Alors j’ai ouvert le frigo et ai ingurgité un yaourt périmé…

«Vivons plus simplement», disait un copain de la vallée de Joux. «Je suis parti deux semaines en vacances, j’avais une chemise et deux cent francs. Quand je suis rentré, je n’avais changé ni l’un, ni l’autre.»

Denis Meylan