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Des frontières qui restent à franchir

10 février 2017 | Edition N°1932

Vallorbe – La complexité de la question des échanges transfrontaliers, qui implique aussi l’Europe, a été au coeur de discussions entre élus, diplomates et chefs d’entreprises venus de Suisse et de France.

Entre la Suisse et l’Union européenne, les échanges commerciaux atteignent 1,4 milliard de francs chaque jour ouvrable. ©Carole Alkabes

Entre la Suisse et l’Union européenne, les échanges commerciaux atteignent 1,4 milliard de francs chaque jour ouvrable.

Parce que Vallorbe constitue une porte d’entrée -et de sortie- du pays, parce que la densité du trafic aux heures de pointe témoigne d’une forme de vitalité des échanges transfrontaliers, la Commune s’imposait comme l’endroit idéal pour parler de cette problématique.

Pour l’évoquer, une belle brochette de personnalités : diplomates, conseillers d’Etat, chefs d’entreprise et élus locaux venus de France et de Suisse. Et le souci, pour tous ces interlocuteurs de rester à l’écoute «de la vraie vie», comme le soulignait le Sainte- Crix Pascal Broulis, conseiller d’Etat en charge du Département des finances.

Main d’oeuvre

Alors, ce terrain si cher à ceux qui occupent les postes à responsabilité, il dit quoi ?

«Dans un pays où l’on sent un frémissement économique positif, la proximité de la Suisse s’avère une richesse et un atout pour notre bassin local», notait André Boisier, le patron d’Armstrong Building Products à Pontarlier. Cette entreprise américaine spécialisée dans les plafonds acoustiques y achève l’implémentation d’un investissement de 20 millions d’euros.

Mais le climat d’affaires n’est pas forcément dégagé pour tout le monde, car «les entreprises du secteur sont confrontées à un double problème. «Celui de la rétention de main-d’œuvre et celui de la formation qui représente un investissement pour nos sociétés», soulignait-il.

Sept milliards

Ces dernières éprouvent des difficultés à conserver leur personnel qualifié tout autant qu’à en recruter. C’est que, 9 février 2014 ou pas, la Suisse reste toujours aussi attrayante, même si elle offre un marché du travail d’une bien plus grande flexibilité par rapport à sa voisine.

«Pour le canton de Vaud, quelque 30 000 frontaliers génèrent 2,2 milliards de salaires reversés à la France», notait Pascal Broulis, qui sait toujours ce que parler d’argent signifie. Et ce montant grimpe même à sept milliards de francs, sans tenir compte de Genève, mais en embrassant un secteur qui va de la région nyonnaise à Soleure.

Un destin commun

«On recense en France 400 000 travailleurs frontaliers, soit 40% des frontaliers européens», soulignait le diplomate français Maxime Lefebvre. Et selon son homologue Olaf Kjelsen, ambassadeur et chef de la coopération transfrontalière au Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), près de «300 000 frontaliers de différents pays entrent chaque jour en Suisse.» Enfin, si l’on ajoute à cette masse des statistiques qui indiquent que près de 200 000 Suisses résident en France et que 120 000 Français sont installés en Suisse, on peut se questionner sur la notion de «destin commun», soulignait encore Pascal Broulis.

Complexité

Ainsi la notion de coopération transfrontalière apparaît bien plus complexe que la simple vision liée aux nuisances occasionnées par les bouchons. Un dossier d’autant plus complexe qu’il reste sujet à bien des à-coups politiques.

«La Suisse n’est d’ailleurs pas un partenaire facile pour la France, car elle reste en dehors de l’Union européen (UE) et de l’Espace économique européen (EEE). Quand la France a voulu simplifier son découpage administratif en supprimant des régions, les cantons suisses ont enregistré une période de flottement sur les dossiers en cours. Il en a été un peu de même, au niveau européen, là ou se mettent en œuvre ces programmes de coopération «Interreg», qui permettent d’avancer sur le terrain en matière d’équipements, de transport, de mobilité. Bruxelles, déjà confrontée à la mise en œuvre du l’initiative du 9 février, s’est trouvée paralysée par la question du Brexit. Par ailleurs, face à un Etat français jacobin, la Suisse offre une galaxie fédérale de 26 cantons, «dont certains pèsent autant qu’un Etat européen», soulignait encore, non sans fierté, Pascal Broulis.

Mais, au-delà de ce débat, la coopération transfrontalière pourrait aider André Boisier et ses pairs de France ou de Suisse à résoudre certains de leurs problèmes. «Je cherche des ingénieurs process, si vous en connaissez, faites-moi signe», lançait-il à l’assemblée, tout en suggérant l’instauration, en matière de main-d’œuvre, «d’un système de vases communicants sur des métiers ciblés». Une demande qui émane du terrain et de la «vraie vie»…

Rencontre annuelle

Les échanges de Vallorbe se sont déroulés dans le cadre de la rencontre annuelle de l’aire de proximité Mont d’Or-Chasseron de la Conférence transjurassienne (CJT). Cette instance est coprésidée par Patrick Genre, maire de Pontarlier, et Jean-Daniel Carrard, syndic d’Yverdon-les-Bains. Cet espace de coopération vise à promouvoir le développement économique et social des deux pays. La Suisse a besoin de main-d’œuvre et la France ne perd pas de vue ses rentrées fiscales.

Frontaliers et plans de mobilité

Au nombre des intervenants figuraient aussi Jean-François Cardis, directeur des Établissements hospitaliers du Nord vaudois (EHNV). Il s’agit d’un des plus gros employeurs de la région avec 1800 salariés, dont 14% de frontaliers. «Une proportion de nos effectifs qui reste stable», notait-il. En raison de la mise en œuvre des plans de mobilité, il notait que cette catégorie de salariés se trouvait confrontée à des temps de transports rallongés, car contrainte à stationner en périphérie.

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Philippe Villard