Football – Euro 2016 – La France accueille, dès demain, la phase finale du tournoi européen. Défenseur tricolore du FC Le Mont, l’expérimenté François Marque nous présente l’évènement.
Enfin! Depuis le temps qu’on en parle, l’Euro 2016 débute demain avec le match d’ouverture France – Roumanie, à Saint- Denis (21h). Alors que la Suisse et l’Albanie complètent le Groupe A, La Région Nord vaudois a demandé à François Marque, l’arrière central du Mont, de présenter les enjeux de la manifestation.
François, en quelques mots, ça vous inspire quoi cette phase finale de l’Euro 2016 dans votre pays?
C’est un évènement super attendu. Le souvenir de la Coupe du monde 1998, que la France avait organisée (ndlr: et remportée) est encore très vivace. Il y a beaucoup d’attentes mais aussi une petite crainte car on ne peut malheureusement pas faire abstraction du contexte politique et du risque d’attentats, après les attaques dont la France a fait l’objet.
Concentrons-nous sur l’aspect purement sportif de cet Euro et parlons plus particulièrement de l’équipe de France, une sélection sur laquelle reposent beaucoup d’espoirs. Que pensez-vous des choix opérés par Didier Deschamps?
D’abord, il s’est toujours tenu à sa ligne de conduite. Chez lui, l’aspect groupe a toujours primé sur les individualités. Il attache également une grande importance au comportement des uns envers les autres. Le fiasco de Knysna et la mauvaise image répandue par les Bleus en Afrique du Sud en 2010 (ndlr: en conflit avec leur sélectionneur Raymond Domenech et de son staff, les joueurs s’étaient mis en grêve, en plein Mondial), l’a sans doute consolidé dans ses choix. Pour ma part, j’ai toutefois de la peine à comprendre l’éviction d’Hatem Ben Arfa. Ceci dit, si la France va au bout de son Euro, personne ne parlera plus jamais des décisions de Deschamps. Et n’oublions pas que Didier est quelqu’un de très expérimenté. Il est remonté en Serie A avec la Juventus, contre toute attente, il a ensuite conduit Monaco en finale de la Champions League et il a ramené le titre à Marseille. C’était un meneur d’hommes comme joueur, il l’est d’autant plus comme coach. Après, il ne faut pas se leurrer, ce sont les joueurs qui gagnent les titres, car c’est sur le terrain qu’il faut savoir faire preuve d’efficacité.
Pour leur dernier match de poule, les Français croiseront le fer avec l’équipe de Suisse. Comment jugez-vous le potentiel de la Nati?
Elle m’a laissé une impression mitigée. Ses derniers matches n’ont pas été très rassurants. Par ailleurs, le fait qu’il n’y ait pas de titulaire en puissance dans l’axe derrière peut constituer une source de problèmes. Par contre, comme le Groupe A a l’air très ouvert pour la deuxième place derrière la France, elle aura un coup à jouer. J’ai évolué avec plusieurs cadres actuels de l’équipe de Suisse (ndlr: au FC Bâle), Yann Sommer, Granit Xhaka, Xherdan Shaqiri et Fabian Frei, et je connais leur potentiel. Ils étaient encore tout jeunes et commençaient à s’entraîner avec le groupe pro. Après son titre de championne du monde M17 (ndlr: acquis en 2009 au Kenya), cette génération suscite de grosses attentes et elle devrait gentiment arriver à maturité. Cependant, je trouve qu’elle manque de joueurs capables de tirer le groupe vers le haut. A mon sens, elle ne possède pas de leader du calibre d’un Didier Deschamps de l’époque. Un Xherdan Shaqiri, par exemple, est pétri de talent, mais je ne le sens pas capable de porter l’équipe sur son dos. Il n’a pas la force d’un Lilian Thuram, d’un Claude Makelele ou d’un Zinédine Zidane, qui eux, avaient la capacité de forcer le destin pour tout un groupe. Enfin, ce qui peut être rassurant, concernant la Suisse, c’est qu’on a vu au Mondial -lorsqu’elle a poussé l’Argentine, future finaliste, en prolongations- qu’elle était capable de chatouiller les meilleurs. Il ne faut pas tuer l’équipe avant le tournoi. Les gens doivent être derrière la Nati!
La Roumanie et l’Albanie complètent la poule A. Qu’attendez-vous de ces deux formations de l’Est?
L’Albanie n’aura aucune pression. Elle dispute sa première phase finale d’un grand tournoi et dispose d’un formidable soutien populaire au pays. Elle n’est pas trop mal sur le plan technique. Je suis content pour Taulant Xhaka qu’il fasse partie de cette aventure, c’est un bon garçon (ndlr: il l’a aussi fréquenté lors de son passage au FC Bâle). Quant à la Roumanie, elle est très solide sur le plan défensif. Elle a posé bien des problèmes à l’Espagne en amical (ndlr: la Roja avait été tenue en échec 0-0, fin mai). Elle est très difficile à manoeuvrer.
Et sinon, quelles équipes seront, selon vous, au rendez-vous?
La France, je la vois bien passer et aller au moins jusqu’en demi-finales. Elle possède beaucoup d’options sur le plan offensif. Peut-être trop? C’est parfois un problème quand il y a trop de solutions. Idéalement, il faudrait que des titulaires se dégagent. Malgré la désillusion qu’elle a vécue lors du Mondial brésilien (ndlr. élimination au premier tour) et sa défaite contre la Géorgie (ndlr: 0-1), je vois l’Espagne très forte. Elle peut tabler sur son expérience en matière de gestion d’évènements et dispose de super joueurs. Evidemment, l’Allemagne, quelles que soient les circonstances, est toujours là. Elle est handicapée par les blessures, surtout derrière, mais attention à elle! Le Portugal, pourrait, pourquoi pas, aller au bout. Quant à la Croatie, elle a les moyens de créer la surprise avec son magnifique milieu composé d’Ivan Rakitic, Luka Modric et Mateo Kovacic, et la présence de Mario Mandzukic devant.
Comment François Marque suivra-t-il cet Euro?
Je ne vais pas regarder tous les matches, mais sans doute les grosses affiches. Habituellement, j’aime bien suivre les rencontres, quel que soit leur niveau, mais je ne calque pas ma vie privée en fonction des horaires des rencontres. J’aime bien assister aux émissions où s’expriment les spécialistes. C’est souvent très intéressant. On y comprend mieux certains choix, certains évènements, grâce aux infos des initiés.