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« C’est l’un des caïds de la Vallée »
Yverdon, 18 novembre 2018. Parc des 4 Marronniers. © Michel Duperrex

« C’est l’un des caïds de la Vallée »

24 novembre 2018 | Edition N°2382

Vallée de Joux – La Gendarmerie a interpellé quatre jeunes impliqués dans le meurtre des Quatre-Marronniers, dont un Combier de 19 ans, auteur présumé du coup de feu mortel à Yverdon-les-Bains. La région est ébranlée par ce drame.

Les forces de l’ordre ont débarqué lourdement armées dans un petit village de la vallée de Joux, mercredi dernier. «Une armada de policiers est arrivée et  ils ont bloqué tout le quartier, c’était impressionnant», témoigne un habitant. Mais ce n’est que deux jours plus tard que ce Combier, tout comme l’ensemble de la région, a découvert la raison de cette opération du Détachement d’action rapide et de dissuasion (DARD) de la Police cantonale vaudoise. En effet, celle-ci a annoncé, vendredi, qu’elle avait procédé à l’interpellation de quatre jeunes, dont deux mineurs (lire encadré), impliqués dans le meurtre des Quatre-Marronniers, survenu le samedi 17 novembre aux alentours de 22h30 à Yverdon-les-Bains.

Le dispositif qui a paralysé tout un quartier a permis l’arrestation de l’auteur présumé du coup de feu qui a ôté la vie à un jeune Yverdonnois de 21 ans. Le Combier, un Espagnol de 19 ans, a reconnu avoir tiré sur la victime. Celle-ci est décédée à l’hôpital après avoir reçu une balle en pleine tête.

Toute la région sous le choc

Samedi, le village était plongé dans le calme, les commerçants vaquaient à leurs affaires. Pourtant, la rumeur s’était bien propagée à travers la Vallée. «Ils en ont même parlé au sein du Conseil communal parce qu’il y a eu une séance de commission», rapporte un Combier. D’ailleurs, lorsque l’on évoque le meurtre, la discussion tourne court. «Pas de commentaire», lance une habitante. «Je ne peux rien vous dire», rétorque une autre, avant de lâcher: « Il était connu parce qu’il faisait des conneries mais jamais je n’aurais pensé qu’il irait si loin.»

Derrière ce silence se cache une véritable émotion. Dans le village, tout le monde se connaît et c’est justement ce qui a rendu le geste du jeune meurtrier présumé d’autant plus incompréhensible. «Je ne comprends pas, il vient d’une bonne famille, son frère a même fait l’Université», glisse un habitant du quartier. «Ce gamin était adorable et il a mal tourné. C’est inexplicable», souligne un autre. «Je l’ai eu deux ou trois fois dans mon bureau, mais c’était pour des petites histoires», explique pour sa part son ancien directeur d’école. C’est tellement de vies gâchées.» Quant aux parents du jeune homme, ils n’ont pas souhaité témoigner.

Abattu pour 500 grammes de marijuana

Toutefois, selon plusieurs Combiers, le jeune Espagnol de 19 ans n’est pas un enfant de chœur. «C’est l’un des plus grands caïds de la Vallée», commente l’un d’eux. «Tout le monde savait qu’il ne fallait pas laisser de voitures, de portes ou de fenêtres ouvertes parce que lui et sa bande risquaient de venir», ajoute une mère de famille. «Quand je le voyais, il avait un regard menaçant qui m’a toujours fait peur, note une jeune femme. Il était déjà très violent dans les mots qu’il utilisait, alors ça ne m’étonne pas plus que cela qu’il ait dépassé les limites. Mais c’est dommage.»

Selon la police, le tireur présumé était déjà connu de ses services pour des actes de violence, des infractions contre le patrimoine et d’autres à la Loi sur les stupéfiants. Ce serait d’ailleurs pour acheter de la marijuana à la victime que le Combier se serait rendu à 22h à Yverdon-les-Bains, le 17 novembre, avec plusieurs autres jeunes de la région (lire La Région Nord vaudois du 20 novembre). La drogue, soit 500 grammes de marijuana – dont le prix équivaudrait à environ 2500 francs – a été retrouvée à côté du corps.

Pas d’explications

Impossible de savoir, pour l’heure, comment le jeune tireur a acquis une arme à feu. «Apparemment, il venait de se la procurer et il avait même posté des photos de lui, posant fièrement avec son pistolet sur les réseaux sociaux», rapporte une jeune femme. Un fait que la police n’a ni infirmé ni confirmé.

«Désormais, nous avons des éléments d’informations complets, mais nous ne pouvons pas tout communiquer car nous n’en sommes qu’au début de l’enquête», commente Jean-Christophe Sauterel, porte-parole de la Police cantonale vaudoise.

Les enquêteurs, placés sous l’autorité du procureur chargé de l’affaire et de la présidente du Tribunal des mineurs, poursuivent leurs investigations afin d’établir le déroulement exact des faits et le rôle de chaque protagoniste.

Depuis le soir de l’homicide, plus d’une centaine de policiers ont été engagés dans les recherches, les perquisitions, les auditions et les investigations techniques. Plusieurs dizaines de personnes ont été contactées et une trentaine entendues par les forces de l’ordre.


Trois autres jeunes arrêtés

A la suite de l’interpellation de l’auteur présumé du meurtre des Quatre-Marronniers, la gendarmerie a arrêté, jeudi, un Suisse de 21 ans domicilié à Vallorbe. A l’issue de son audition, il a reconnu avoir conduit la voiture utilisée pour se rendre sur les lieux du crime. Lui et le jeune Espagnol ont été placés en détention préventive, à la disposition du procureur chargé de l’affaire, qui a demandé leur mise en arrestation au Tribunal des mesures de contrainte.

Deux autres personnes ont été interpellées vendredi à la vallée de Joux, à leur domicile. Il s’agit de deux Combiers âgés de 15 ans. La présidente du Tribunal des mineurs les a entendus et a ordonné leur mise en détention provisoire.

Christelle Maillard