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Le monde rural veut garder ses abattoirs

19 février 2016
Edition N°1685

Orbe – Bouchers et agriculteurs régionaux se mobilisent pour reprendre le site, au nom de leur indépendance et du maintien d’une production de proximité.

Le rachat des abattoirs d’Orbe devrait être finalisé au mois de juin. © Michel Duperrex

Le rachat des abattoirs d’Orbe devrait être finalisé au mois de juin.

Un groupe de travail composé de représentants du milieu rural planche, depuis cinq ans, sur l’acquisition des abattoirs d’Orbe, que l’actuelle propriétaire souhaite remettre. «Marlyse Pilloud possède seule ce site, depuis le décès de son mari, il y a quelques années. Elle cherchait à le transmettre», explique Nicolas Pavillard, agriculteur à Orges.

Le passage de témoin est en bonne voie, puisqu’une promesse de vente a été signée le mois dernier. Quant au financement complet du projet, il est garanti, sous réserve de la constitution des fonds propres nécessaires par les futurs sociétaires. «C’est un ambitieux projet pour lequel nous avons besoin d’un peu plus de 200 000 francs de parts sociales», indique Jacques Nicolet, le conseiller national de Lignerolle, l’un des fers-de-lance de la démarche. Une campagne de communication, notamment par le biais de flyers et de séances d’information, va commencer dans cette optique. Les bouchers et les agriculteurs sont principalement ciblés.

«51% du capital doit être détenu par des exploitations agricoles. C’est une sécurité pour garder les abattoirs entre nos mains», précise Nicolas Pavillard.

Si tout se passe conformément aux espérances, la création de la Coopérative de l’Abattoir Régional d’Orbe sera officialisée en avril. Le 1er juin prochain est la date fixée pour le rachat effectif du site et la poursuite de son utilisation par la société coopérative.

Plusieurs avantages

Le maintien d’une distance réduite entre l’écurie -ou la porcherie-, l’abattoir et finalement la boucherie présente plusieurs avantages, et ceci pas uniquement d’un point de vue écologique et pour les acteurs des différents maillons de la production de viande. «Il faut prendre en considération le bétail. Un déplacement court réduit son stress», indique Nicolas Pavillard.

«En Suisse, l’abattage est soumis à des règles très strictes, dans le respect de l’animal. L’existence d’abattoirs de proximité assure, aussi, une bonne traçabilité à l’intention des consommateurs», relève, pour sa part, Jacques Nicolet.

Enfin, dans le cas de certains mets de boucherie, le laps de temps entre le moment de la mise à mort et la fabrication peut influer sur le produit fini à l’étal. «L’abattage des porcs a lieu dans la nuit de dimanche à lundi, à Orbe. La viande nous est livrée encore chaude à 5h30 du matin, et nous fabriquons la saucisse à rôtir dans l’enchaînement. Cette dernière a un aspect différent préparée à froid», indique Nicolas Pavillard, avant de rappeler «qu’à l’époque, on tuait le cochon au petit matin et on mangeait la fricassée à midi, après avoir terminé la fabrication».

Vers une plus grande activité

Doté d’infrastructures de bonne qualité, le site urbigène est le troisième plus important du canton en termes d’abattages. «Près de 5000 porcs et 500 à 700 animaux appartenant à la catégorie du gros bétail y sont tués chaque année. La capacité d’abattage pourrait être doublée en effectuant quelques adaptations. Cela permettrait une meilleure rentabilité», souligne Jacques Nicolet.

Marlyse Pilloud, qui a racheté, il y a presque vingt ans, les abattoirs d’Orbe avec son défunt mari, ne peut que se féliciter de la solution trouvée. «C’est important pour moi que la structure reste en mains régionales. Je n’avais pas forcément envie qu’une grande boîte l’acquiert», déclare-t-elle.

Deux collaborateurs, à plein temps, et une équipe d’auxiliaires travaillent actuellement au service de Marlyse Pilloud. Ils conserveront leur poste, malgré le changement d’employeur.

Les petits abattoirs dans une situation de plus en plus précaire

«La stratégie agricole du Canton consiste à maintenir des abattoirs de proximité. Il y en a un à Avenches, depuis le début de l’année dernière, et un autre projet devrait se concrétiser à Aubonne. Avec l’abattoir d’Orbe, la répartition sur le territoire cantonal est intelligente, car elle évite la concurrence», tient à préciser Jacques Nicolet. D’autres structures plus petites sont encore en activité, comme à Baulmes, Echallens et Sainte-Croix, mais des normes contraignantes font planer une menace sérieuse sur leur survie. «Depuis cette année, les contrôleurs de viande sont des vétérinaires agréés, ce qui implique des coûts supplémentaires», explique Jacques Nicolet, qui tient, toutefois, à préciser que le but de la société coopérative d’Orbe n’est pas de pousser à la fermeture les autres abattoirs subsistant dans la région.