Les femmes s’emparent de la rue pour clamer leur ras-le-bol
14 juin 2019Edition N°2518
A minuit, jeudi soir, un tohu-bohu sur la place Pestalozzi a marqué le lancement de la journée de grève des femmes. Les actions se sont succédé jusqu’à 17h22, vendredi, lorsque les militantes ont rejoint Lausanne.
Est-ce en raison de la pluie, ou parce qu’il est encore trop tôt pour que des anonymes rejoignent le collectif de la Grève des femmes? Toujours est-il qu’à la rue du Lac, ce vendredi 14 juin vers 9 heures à Yverdon-les-Bains, elles ne sont qu’une douzaine à scander leur slogan «so-so-solidarité avec les femmes de», en passant d’un magasin à l’autre.
Sifflet en bouche, clochette à la main, les militantes distribuent des badges aux couleurs de la manifestation et proposent du vernis ou du rouge à lèvres mauve aux travailleuses des enseignes qu’elles visitent. La plupart des vendeuses ne répondent pas, et affichent parfois un sourire gêné. Une femme, probablement de confession musulmane, refuse de prendre le badge que les manifestantes lui offrent. Elle voit dans le symbole féminin – qui représente le miroir de Vénus – la représentation d’une croix chrétienne. Les manifestantes n’insistent pas.
Des jeunes, des moins jeunes, des dames en tailleur, des femmes portant un foulard islamique rose: les revendicatrices appartiennent à tous les milieux, à tous les partis, à toutes les religions, et à tous les pays. Le petit cortège commence à grossir. Il est 10 heures et elles sont maintenant plus d’une vingtaine.
Les rangs s’étoffent au fil des heures
Un passage à l’EMS de la Plaine est prévu. Arrivées sur place, les femmes entonnent un chant italien du XIXe siècle, La Lega, remis au goût du jour: «Holi, hola, le 14 juin nous y voilà, la grève féministe, c’est la grève pour nos droits.» La plupart des résidentes ne comprennent pas vraiment ce qu’il se passe. Mais elles acceptent le foulard, le badge ou le bracelet que les manifestantes leur offrent. Leur passage est apprécié. Du côté du personnel, les femmes de ménage, lingères, et autres animatrices acceptent avec conviction de fixer le badge au revers de leur blouse. On sent que les revendications salariales et d’égalité ont une résonance.
Le groupe, qui continue à grossir, rejoint gentiment la place Pestalozzi. La statue de l’illustre pédagogue brandit une pancarte sur laquelle est inscrit «Pour soutenir les femmes, je garde les enfants». Les chants et les revendications se succèdent sur la place, désormais noire de monde. La manifestation a pris de l’ampleur. à vue d’œil, environ 400 personnes sont présentes. Quelques hommes solidaires ont monté les stands. L’ex-conseiller d’État Pierre-Yves Maillard, qui préside désormais l’Union syndicale suisse, est là. Il précise qu’il ne peut pas rester longtemps, car il doit aller chercher ses enfants à l’école.
Il est 15h30 et les discours s’enchaînent sur la place Pestalozzi. La foule a encore grossi. Elles doivent être maintenant un millier à applaudir, siffler, scander.
Un cortège se forme à 16h30 et se dirige vers la gare. Les femmes vont rejoindre Lausanne et leurs sœurs militantes déjà sur place.