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Le vent va-t-il tourner pour les éoliennes ?

15 novembre 2017 | Edition N°2124

Lausanne – La Cour de droit administratif et public a entendu, hier, les opposants et les initiateurs du projet de parc éolien Sur Grati. Le dossier pourrait toucher bien plus que les communes de Premier, Vallorbe et Vaulion.

Après s’être baladée dans les alpages nord-vaudois afin de constater l’impact réel sur le paysage, la Cour administrative du Tribunal cantonal a entendu, hier, les arguments des différentes parties. ©Blanchard-a

Après s’être baladée dans les alpages nord-vaudois afin de constater l’impact réel sur le paysage, la Cour administrative du Tribunal cantonal a entendu, hier, les arguments des différentes parties.

Après que la Cour de droit administratif et public (CDAP) s’est promenée, en mai dernier, sur les hauteurs de la commune de Premier (lire La Région Nord vaudois du 22 mai), c’était au tour des opposants et des initiateurs du projet de parc éolien Sur Grati de se déplacer, hier, à Lausanne, pour une audience au Tribunal cantonal, lequel doit statuer sur les recours.

Or, d’entrée de cause, les opposants ont demandé à ce que l’affaire soit suspendue. «Grati se situe entre deux autres parcs (ndlr : Bel Coster et Mollendruz), il est donc impossible de juger ses impacts sur le paysage sans avoir une vision d’ensemble», a expliqué Maître Laurent Trivelli, au nom des recourants. Si la CDAP ne s’est pas encore déterminée sur cette requête de suspension, le sujet qui fâche, déjà longuement débattu lors de la séance de mai dernier, a immédiatement été abordé, à savoir les atteintes à l’environnement.

 

Les bécasses en danger

 

Les experts du Canton de Vaud ont simplement rappelé que «le projet respecte toutes les directives de la Confédération» et que «l’impact est insignifiant dès 10 km». Pour les opposants en revanche, le fait que des machines mesurant 207 mètres de haut -pales comprises- soient situées sur les crêtes du Jura les rendent plus visibles.

Un autre élément qui met en rogne les recourants concerne la faune. En effet, l’installation des hélices pourrait nuire à la vie et à l’habitat d’une espèce d’oiseaux menacées, les Bécasse des bois. Si l’association BirdLife Suisse considère qu’il est impossible de compenser les pertes que ce projet engendrera sur ces volatiles, d’autres spécialistes, y compris au Canton, pensent le contraire.

«Dès que nous avons appris l’existence de cette colonie, nous avons pris des mesures : suivi de l’espèce, déplacement d’une éolienne, choix de mât plus haut, garantie d’une compensation sur 170 hectares au cas où un impact est identifié, arrêt des pales durant les périodes de croules», explique VO Energies Eole S.A., porteur du projet avec les Communes de Premier, Vallorbe et Vaulion. «Des arrêts qui ne sont pas calculés dans la production d’énergie», a rétorqué Maître Trivelli.

 

Doute sur l’utilité de Grati

 

Pour les recourants, l’un des points clés du dossier repose sur la productivité énergétique des six hélices de Sur Grati. Car c’est bien ce critère qui a permis de le placer dans le top dix des projets éoliens vaudois. Pourtant, ces opposants ont estimé qu’il y avait un problème dans le calcul du potentiel énergétique présenté par les promoteurs : «Les porteurs du projet ont retenu un forfait de perte de 5%, alors qu’il devrait être bien plus important si l’on considère les arrêts pour les périodes de croules, pour le gel et pour les pannes éventuelles», a précisé Maître Trivelli.

Un argument qui n’a pas l’air de faire trembler les promoteurs : «Même s’il perdait quelque rang (ndlr : Sur Grati est en 9e position sur les 19 projets retenus), il resterait parmi les meilleurs du plan directeur cantonal», a souligné Maître Alain Thévenaz, représentant des communes porteuses du projet.

 

Au-delà du Nord vaudois

 

En invoquant des arguments d’intérêt public, comme l’atteinte au paysage ou la protection de la faune, les opposants espèrent, en fait, bien plus qu’un simple report du projet Sur Grati. Ils reprochent la façon dont le Canton a sélectionné les projets de parcs éoliens pour établir son plan directeur cantonal (PAC). «En laissant des entreprises proposer des sites, ce n’est pas lui qui a réfléchi aux meilleurs endroits, il a juste tenté de les classer en fonction de ce qu’on lui proposait, témoigne une recourante. On a l’impression qu’il n’a pour objectif que la transition énergétique, mais qu’il ne prend pas en compte l’ensemble des aspects du projet.»

Comme celui-ci est le deuxième -après celui de Sainte-Croix- à passer entre les mains du Tribunal cantonal, l’issue de ce recours pourrait bien faire jurisprudence pour les parcs à venir, à savoir celui de Bel Coster et du Mollendruz, voire également celui de Bavois, qui a récemment été remis sur les rails.

Il appartient désormais à la CDAP de vérifier la pertinence des pesées d’intérêts effectuées par les autorités cantonales et communales.

 

En chiffres

 
6 Comme le nombre d’éoliennes prévues Sur Grati. Le projet est estimé à près de 60 millions de francs.

207 Mètres. Soit la hauteur des machines, pales déployées, prévues sur les hauteurs de Premier.

11 000 Soit le nombre de ménages qui pourraient être approvisionnés en énergie durant un an grâce au projet.

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Christelle Maillard